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J’ai eu le grand plaisir récemment de m’entretenir avec Joseph Rouleau, notre basse québécoise de réputation internationale, 89 ans bien sonnés, toujours plein de travail et de projets.
Lorsque je lui ai demandé pourquoi, au milieu d’une carrière de chanteur qui aurait rempli plus d’une vie, il s’est intéressé au développement des jeunes artistes, il a répondu sans hésiter : « C’est pour aider les jeunes, aider à faire réussir nos jeunes talents. Si on retourne aux années 1950, il n’y avait pas grand-chose. Nous, les André Turp, les Robert Savoie, les Maureen Forrester, nous avons fait nos premières tournées avec les Jeunesses Musicales. J’ai fait ma première tournée en 1950-1951 avec les Jeunesses Musicales et cela m’a permis de chanter dans plus de 40 concerts et de faire de l’argent (50 $ par concert) pour aller étudier en Italie. »
Évoquant ses années de professeur à l’UQAM, à partir de 1980, il dit : « Je n’avais jamais enseigné le chant de ma vie. Mais j’avais assez travaillé pour savoir ce que c’était. Je me suis occupé des étudiants. J’ai fondé l’Atelier d’opéra de l’UQAM pour leur permettre d’apprendre ce que c’est de monter sur la scène, leur apprendre les mouvements, comment jouer un rôle, la pédagogie du chant et la technique vocale. »
Il m’a également parlé de ses 25 ans à la présidence des Jeunesses Musicales du Canada, dès 1989 :
« Quand j’ai été élu président des Jeunesses Musicales du Canada, le mouvement était en train de mourir. Je me suis trouvé des collaborateurs, je me suis mis à l’ouvrage pour essayer de remonter le mouvement. Nous avons refait les structures, nous avons remonté la réputation des Jeunesses Musicales auprès des institutions qui nous aidaient financièrement. J’ai aussi pris la présidence de la Fondation des Jeunesses Musicales pendant deux ans. La Fondation avait été créée pour aider le mouvement des Jeunesses Musicales, pour aider la mission qui était l’éducation des jeunes dans la musique classique et le développement de carrière pour les meilleurs artistes canadiens. On le faisait et on le fait encore avec nos tournées de concerts en leur donnant 40,50,60 concerts par année. Notamment un opéra chaque année, avec des auditions de Halifax à Vancouver pour donner la chance de jouer un grand rôle. On a monté Don Juan, Les Noces de Figaro, etc. Cela prend de bons chanteurs, avec de jeunes metteurs en scène, décors, costumes, maquillages, mise en scène, surtitrage, au Québec, en Ontario et dans les Maritimes. »
Il est aussi très fier du Concours musical international de Montréal (CMIM) dont il est cofondateur avec André Bourbeau et membre du jury. « En 2001, j’ai créé avec mon ami André Bourbeau le formidable CMIM qui a été créé initialement comme le concours des Jeunesses Musicales. On n’avait pas un sou quand on l’a mis sur pied. Aujourd’hui, c’est un concours reconnu internationalement. Cette année, qui est consacrée au chant, nous avons eu près de 500 inscriptions provenant de 52 pays [le concours se tient chaque année en alternance, chant, violon, piano]. Il y a deux catégories, aria et mélodie/lieder, auxquelles sont attachés de magnifiques prix de développement de carrière. C’est quelque chose pour un lauréat de pouvoir se trouver une agence, d’enregistrer des disques, etc. »
Parlant des qualités essentielles du jeune artiste d’aujourd’hui qui veut faire carrière, il a dit : « Une excellente technique vocale, qui est appropriée à la voix de l’artiste qui chante un certain répertoire qui lui convient. Une technique solide, et un bon talent de musicien. La plupart de ces jeunes aujourd’hui sont aussi pianistes. Ils sont bien préparés par les conservatoires et les universités et ils ont besoin de l’aide qu’on leur donne pour dépasser ce niveau, pour aller vers la carrière professionnelle. Les jeunes aujourd’hui jouent très bien sur scène, grâce à la télévision et au cinéma. Ils développent le pouvoir de communication de la figure et du physique sur la scène. »
Et l’avenir ?
« Du côté collecte de fonds, c’est mieux qu’avant. Il y a eu un développement général de la société. La société québécoise n’est plus seulement sur les terres et l’agriculture. Beaucoup de gens ont atteint un haut niveau du point de vue de l’économie, ils ont des maîtrises en économie ou en administration. Et cela se reflète sur les arts. Beaucoup de ces personnes adorent la culture et deviennent mécènes, des individus et des entreprises. Je tiens en particulier à souligner le travail de la Fondation Azrieli qui fournit une aide remarquable aux Jeunesses Musicales et à d’autres organismes. Nous recevons aussi des montants des gouvernements. En ce qui me concerne, je suis devenu et je suis encore un “quêteux professionnel” (rires). Ça prend de l’argent. Je suis dans une position où, grâce à ma carrière, à ce que j’ai réussi, beaucoup de gens ont aimé ce que je fais et ne me trouvent pas trop déplaisant. Je leur parle d’un projet et ils m’aident beaucoup. Ils m’accompagnent. »
Il a terminé ses propos sur son évaluation d’un grand problème à résoudre.
« L’institution primordiale, c’est l’Opéra de Montréal. Le nombre des productions a beaucoup diminué, on doit tous aider à le développer pour qu’il joue pleinement son rôle. C’est un réservoir essentiel pour nos jeunes et l’institution doit également avoir les fonds pour inviter les plus grands chanteurs internationaux. Il nous faut une maison d’opéra à nous, avec une salle de 1500 ou 1600 sièges, où on présente non seulement de l’opéra, mais aussi de l’opérette et de la comédie musicale. On donne tout au public. On est au service du public. »
Merci, Joseph Rouleau, pour cette rencontre mémorable.
Jeunesses Musicales du Canada www.jmcanada.ca
Concours musical international de Montréal www.concoursmontreal.ca
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