Critique | Clandestines: Pro-choix, un récit

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Clandestines imagine un futur proche et très envisageable où l’avortement est devenu un acte illégal et où les membres des réseaux qui aident celles n’ont d’autre choix que de recourir à cette intervention prennent des risques énormes. Un thriller politique engagé. Au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, jusqu’au 11 février.

2025. Le texte de Marie-Eve Milot et Marie-Claude St-Laurent campe une vieille cuisine. Ce sont les derniers locaux d’une clinique d’avortement clandestine, car les médecins hésitent de plus en plus à pratiquer l’intervention. La clinique doit donc déménager souvent et se protéger à l’aide de protocole de téléphones et de codes bien établis. Une médecin et une sage-femme, pleines d’empathie, assurent la permanence. En dépit de leur profond engagement, elles redoutent les autorités. L’émissaire d’un réseau pro-vie fera tout basculer.

L’ensemble de la première partie de la représentation est percutante et efficace. Dans leur volonté d’offrir un tableau complet, les autrices dépeignent ensuite avec beaucoup de détails le mouvement Pro-vie comme une manipulation politique qui utilise des êtres aisément malléables. La seconde partie de la pièce aurait néanmoins pu être un brin plus courte.

S’appuyant sur la baisse de natalité qu’affiche le Québec, un parti populiste veut présenter un projet de loi qui rendra quasi impossible toute interruption de grossesse au-delà de 24 semaines, dans le but de renouveler le bassin de « travailleurs payeurs ». On pense évidemment à la dystopie de Margaret Atwood, à l’enfer que vivent déjà nombre de nos voisines étasuniennes, à celui qu’endurent depuis des années les femmes de plusieurs pays d’Amérique latine, passibles de prison sur simple dénonciation ou soupçon d’interruption de grossesse.

Car rien n’est jamais acquis en matière de droit des femmes à disposer de leur corps. Aux États‑Unis, la Cour suprême est revenue en juin 2022 sur sa jurisprudence de 1973, qui considérait pourtant l’interruption volontaire de grossesse comme un droit garanti au niveau fédéral. Depuis, plusieurs États fédérés ont interdit ou restreint le recours à l’interruption volontaire de grossesse. En Europe, Malte interdit l’avortement tandis qu’en Pologne et en Hongrie ce droit a été drastiquement restreint. La France a, par contre, décidé d’enchâsser la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse dans la Constitution.

Clandestines est donc un texte nécessaire. Au moment où des députés canadiens d’arrière-banc n’ont de cesse d’essayer d’ouvrir à nouveau le débat sur la légalité de l’avortement et que cet accès n’est même pas accessible à toutes les femmes du pays, il n’a en effet jamais été aussi important d’animer la conversation autour de ce droit fondamentalement.

Clandestines. Au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, jusqu’au 11 février.–

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