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Chaque année, La Scena Musicale réunit un jury informel qui écoute, note et évalue les 24 participants du Concours musical international de Montréal (CMIM). Pour cette nouvelle édition Voix, une équipe composée des spécialistes de La Scena dans ce répertoire, Adrian Rodriguez, Justin Bernard, Wah Keung Chan et Gianmarco Segato, a établi ses meilleurs pronostics pour les lauréats du concours.
AR : Jingjing Xu possède ce qui ne peut être décrit autrement que comme une technique de bel canto sans faille. Sa voix est constamment alignée et ses coloratures, impeccables. Elle peut chanter autant forte que piano. Elle est sur une voie prometteuse, puisqu’elle a récemment remporté le concours international de chant Mirjam Helin en 2024. La maîtrise et les nuances sans effort de Mme Xu rendent ses interprétations de mélodies naturelles et non forcées. GS : Elle fait partie d’un petit groupe de concurrents qui, même à ce stade précoce de leur carrière, montrent déjà des signes d’interprète complet. Mme Xu n’a peur de rien lorsqu’elle chante un texte et sait que la perfection du son n’est pas toujours l’essentiel. Dans l’art de la mélodie, elle se distingue par sa capacité à communiquer d’une manière singulière, de sorte que la voix et le texte sont inextricablement combinés. JB : La mezzo-soprano chinoise témoigne d’une maturité vocale remarquable et d’un souci pour l’expression dramatique rare à son âge. Sa personnalité artistique semble mieux correspondre au caractère intérieur des mélodies qu’à celui, plus éclatant, des arias d’opéra. Un élément important à prendre en compte ici est le volume de sa voix, qui paraît moins développé que chez d’autres candidats. Son engagement émotionnel est l’une de ses grandes forces. Déjouera-t-elle les pronostics pour succéder à Simone McIntosh, une mezzo-soprano qui avait remporté le premier prix dans la catégorie Aria en 2022 ?
Ricardo Garcia, ténor, Nicaragua/États-Unis
Aria 1er : Justin Aria 2e : Adrian, Wah Keung Mélodie 3e : Adrian
JB : On se souvient de Mario Bahg en 2018, qui avait offert une interprétation mémorable de Salut, demeure chaste et pure. C’est peut-être un autre air français, comme Ah ! Lève-toi, soleil !, qui pourrait voir Ricardo Garcia l’emporter. Ce ténor originaire du Nicaragua chante avec ses tripes. Extrêmement mature pour son âge, il possède une voix puissante, héroïque, qui remplira sans effort la Maison symphonique. Il est surtout capable d’exprimer des émotions fortes qu’affectionnent tant les passionnés d’opéra. AR : Sa voix de stentor et l’aisance rare de son registre aigu le distinguent parmi de nombreux interprètes doués. Cependant, son sens du style et sa diction – notamment en français – manquent encore de raffinement, ce qui pourrait compromettre ses chances, surtout dans une ville francophone comme Montréal. Avec une voix si dramatique et opératique, je ne m’attendais pas à ce qu’il soit un grand mélodiste, mais j’ai été agréablement surpris par son interprétation de l’emblématique Erlkönig de Schubert sur YouTube. S’il choisit le bon répertoire et qu’il y ajoute quelques canciones, il pourrait certainement séduire le public et convaincre le jury par son style poignant.
Ruby Dibble, mezzo-soprano, États-Unis
Aria 1re : Wah Keung Aria 2e : Gianmarco Aria, élément surprise : Adrian Mélodie 2e : Justin, Adrian
GS : Ruby Dibble est une mezzo au charmant timbre sombre, du haut jusqu’en bas de sa tessiture considérable. Elle vous plonge dans le personnage grâce à son excellente compréhension du texte. C’est une interprète polyvalente qui est convaincante aussi bien dans le nouveau répertoire que dans les classiques. JB : L’Américaine possède un timbre riche et étoffé comme du velours, une technique solide et un don pour les interprétations expressives. Un équilibre presque parfait qui pourrait la voir faire une belle prestation aussi bien dans la catégorie Mélodie qu’Aria. Avantage plutôt pour les airs en allemand et en anglais, sa langue maternelle, que la mezzo-soprano sait magnifiquement rendre en musique. AR : Le timbre chaud et expressif de Mme Dibble semble particulièrement bien adapté à l’intimité requise dans l’art de la mélodie.
Fanny Soyer, soprano, France
Aria 2e : Justin
JB : La concurrence est féroce, notamment avec Julia Muzychenko-Greenhalgh et la mezzo-soprano Ruby Dibble, mais la Française Fanny Soyer paraît avoir l’avantage en termes de qualités vocales pures, de maîtrise des nuances et de sens artistique. Un autre trait distinctif est son absence d’effort visible qui lui permet de se hisser naturellement au sommet.
Karoline Podolak, soprano, Canada/Pologne
Aria 3e : Adrian, Wah Keung
AR : La colorature canadienne d’origine polonaise a tout pour elle : charisme, excellente maîtrise de la voix, talents d’actrice, beauté extérieure et expérience au CMIM, dont elle est repartie les mains vides. Je suppose que cet échec a renforcé sa détermination à obtenir un prix cette fois-ci.
Magdalena Kuźma
Magdalena Kuźma, soprano, États-Unis/Pologne
Aria 2e : Gianmarco Aria, élément surprise : Justin Mélodie, 2e : Gianmarco
GS : Cette soprano immensément talentueuse comprend vraiment que l’opéra est une question de voix et de mots. Une diction dramatique, des pauses et des rallentandi bien pensés s’ajoutent à l’excitation lyrique – et elle a de très bons aigus ! Dans le répertoire des mélodies, elle comprend déjà l’importance de maintenir une immobilité corporelle qui n’est pas synonyme de rigidité. Elle laisse son visage et ses couleurs vocales communiquer. JB : La soprano américano-polonaise a une voix puissante et un timbre comparable à un métal brillant. Elle respire l’opéra et la passion du chant.
Valentin Ruckebier, bass, Allemagne
Mélodie 3e : Justin, Gianmarco
GS : Compte tenu de l’importance du lied dans le domaine de la mélodie, la basse allemande Valentin Ruckebier se distingue par son interprétation nuancée. Cette dernière pourrait le desservir dans le concours d’opéra, mais je trouve son approche discrète rafraîchissante. JB : Qui de mieux qu’un Allemand pour interpréter le répertoire des lieder ? La nationalité de la basse n’est pas un facteur dans notre appréciation générale, mais elle contribue à la qualité de la langue dans laquelle il s’exprime. De tout ce que l’on a pu observer de ses prestations, c’est son plaisir et son goût pour l’interaction avec le public qui transparaissent.
Pete Thanapat, baryton-basse, Thaïlande
Aria 3e : Justin
JB : Pour être une basse de ce calibre, il faut avoir une maturité vocale exceptionnelle. C’est le cas de Pete Thanapat, qui a déjà tous les attributs d’un chanteur professionnel. Son timbre d’une richesse incomparable et sa voix imposante forcent l’admiration. Le Thaïlandais a des chances de se classer très haut, même si ce sont d’habitude les voix plus aiguës qui prennent la lumière.
Jaeeun Shin, soprano, Corée du Sud
Mélodie, élément surprise : Justin
JB : Ses interprétations de mélodies m’ont énormément plu. La soprano sud-coréenne possède une voix très élégante, raffinée dans son élocution.
Hedvig Haugerud, soprano, Norvège
Aria, élément surprise : Gianmarco
GS : Dans un monde de chanteurs qui semble parfois comme un moule, l’opéra a besoin de plus de sopranos comme elle. Sa technique n’est peut-être pas encore parfaite, mais son timbre unique, aux tons clairs et à l’ancienne, est fascinant à écouter.
Nikolai Zemlianskikh, baryton, Russie
Mélodie, élément surprise : Gianmarco
GS : Un baryton dont le timbre clair et sans affectation et l’interprétation conviennent parfaitement au répertoire de la mélodie, en particulier dans sa langue maternelle, le russe. Je le verrais bien faire une percée dans cette partie du concours.