Musicothérapie : Aider les retraités dans leurs transitions de vie

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«Je pense que tout le monde peut tirer profit d’une thérapie, qu’il s’agisse de musicothérapie ou de pratiques verbales », explique Kiki Chang, professeure de musicothérapie à l’université Capilano de North Vancouver et ancienne présidente de l’Association canadienne des musicothérapeutes. « Il n’est pas nécessaire d’avoir des talents musicaux ou une expérience préalable de la musique pour ressentir les bienfaits de ce type de thérapie. »

Kiki Chang

Chang explique que les objectifs de la musicothérapie pour les personnes âgées peuvent varier, mais qu’ils comprennent l’expression des émotions, le traitement du deuil, la réduction de l’anxiété et le maintien des capacités motrices. Les musicothérapeutes comme Chang aident les participants à atteindre leurs buts grâce à une grande variété de méthodes. Ceux qui souhaitent réduire leur anxiété peuvent écouter le thérapeute, souvent lui-même musicien de formation, jouer une chanson familière. Ceux qui souhaitent maintenir leurs capacités motrices peuvent choisir de jouer d’un instrument ou de suivre le rythme en tapant des doigts.

Chang raconte l’histoire d’un client particulier qui lui a laissé un souvenir marquant, un retraité qui cherchait de l’aide pour traiter une dépression sévère. « Après avoir pris sa retraite, explique Chang, il avait l’impression que sa vie n’avait plus ni but ni sens. » Comme il avait du mal à parler de cette expérience, son équipe clinique l’a orienté vers Chang dans l’espoir que la musicothérapie l’aiderait à s’exprimer.

Ce qu’il a vécu n’est pas rare chez les personnes qui vivent ce que les sociologues appellent une « transition majeure dans leur vie », c’est-à-dire un changement important dans leur situation qui modifie fondamentalement la structure de leur vie quotidienne. Les personnes âgées, en particulier, vivent des transitions majeures lorsqu’elles prennent leur retraite, font face à un deuil ou déménagent. Ces événements peuvent augmenter les facteurs de risque de troubles mentaux, tels que la dépression et l’anxiété.

L’isolement et la solitude sont deux des facteurs de risque les plus importants chez les personnes âgées. Lorsque les individus quittent la vie professionnelle, ils peuvent perdre le rôle social auquel ils se sont identifiés durant la majeure partie de leur vie. Dans les sociétés occidentales, où le domaine et la carrière choisis par une personne déterminent souvent son identité, la retraite peut ainsi entraîner une perte de repère. Sans découvrir de nouveaux rôles sociaux, ces personnes peuvent facilement se sentir à la dérive et éloignées de tout lien social significatif.

Les interventions collectives et communautaires semblent de bonnes avenues pour atténuer ce type de difficultés. Afin d’y remédier, les praticiens s’efforcent de renforcer les facteurs protecteurs dans la vie des patients, c’est-à-dire les aspects bénéfiques d’un mode de vie qui contribue à réduire la probabilité de développer des troubles mentaux graves. La musique est l’un des moyens efficaces pour y parvenir.

Photo : Tulane Public Relations

Dans son travail avec le retraité, Chang a adopté cette approche axée sur les facteurs protecteurs et s’est attachée à l’aider à renforcer ses liens sociaux, tant avec elle qu’avec les personnes importantes dans la vie du participant. Comme dans les contextes sociaux, la musique utilisée en thérapie peut susciter des émotions et créer une proximité entre les personnes qui discutent d’un intérêt commun et d’une passion pour une forme d’art. Chang estime que la relation thérapeutique est ce qui distingue la musicothérapie des autres activités recourant à la musique. Les musicothérapeutes et les participants peuvent établir une relation individuelle grâce à la musique en complément d’autres activités, comme la psychothérapie ou ce qu’on appelle « thérapie par la parole ».

Elle reconnaît toutefois que de telles relations ne s’établissent pas toujours du premier coup. Dans le cadre de son travail avec le retraité, il lui avait fallu quelques semaines pour établir une relation thérapeutique et comprendre à quel point la musique était importante pour lui. Peu à peu, elle a remarqué une tendance. « Il se souvenait facilement de la chanson qui passait à la radio lorsqu’il a rencontré sa femme pour la première fois et de la chanson préférée de son fils lorsqu’il a obtenu son diplôme d’études secondaires. » Elle a alors proposé qu’ils travaillent ensemble pour créer une autobiographie musicale composée d’enregistrements de chansons qu’il associait à différentes périodes de sa vie.

Photo : Mushfiq Ali Khan

Ce n’est là qu’une des nombreuses formes que peut prendre la musicothérapie. L’improvisation musicale, qui fait appel à la voix, à des instruments et même à des objets ménagers, est une technique de plus en plus populaire parmi les intervenants. Certains participants s’expriment à travers un instrument familier lorsque les mots leur semblent insuffisants, tandis que d’autres apprennent à jouer d’un instrument pour la première fois afin d’entretenir leur dextérité. D’autres encore se contentent d’écouter les musicothérapeutes jouer des morceaux familiers, une pratique qui peut être utile pour entretenir la mémoire et les fonctions cognitives.

Chang maintient que l’expérience de travailler avec cet homme lui a beaucoup apporté et espère qu’il en a été de même pour lui. « La dernière chanson de son autobiographie musicale était celle de son mariage, et il a exprimé le souhait de la chanter lui-même pendant que je l’accompagnais au piano. Nous avons enregistré la chanson ensemble et il a dédié son autobiographie à sa femme, la remerciant de l’avoir soutenu. »

Retrouvez Association canadienne des musicothérapeutes sur www.musictherapy.ca.

Traduction : Andréanne Venne

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