Jan Ladislav Dussek aurait pu être un bon candidat si seulement Mozart était né ailleurs et à une autre époque. Dussek (1760-1812) n’a ni les bonnes dates, ni les bonnes compétences. Toutes les deux mesures, il choisit une note que Mozart aurait rejetée pour un meilleur choix et, même si Dussek peut se relever et nous offrir ce qui passerait pour du très bon Clementi, votre oreille appréhende déjà le prochain faux pas. Parmi les trois concertos proposés ici, deux sont contemporains de la fin de Mozart en 1787 et 1791, mais ont seulement les numéros d’opus 3 et 14.…
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Un dilemme de critique. Le violoncelliste Steven Isserlis est un copain. Il vit au coin de la rue et nous nous saluons lorsque nous nous croisons dans le quartier. Il sait que j’ai reçu sa dernière version pour examen. Il sera déçu si je l’ignore et grincheux si j’y trouve des fautes. Critique ou pas critique ? Si je ne voulais pas faire de critique sur mes amis, je devrais éliminer la moitié des enregistrements. De même, si je mentionnais une amitié chaque fois que j’écrivais une critique, les lecteurs passeraient à un autre appel. Alors que faire? Il y a…
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Trois compositeurs se partagent cette première coproduction entre la maison Analekta et les Prix Azrieli de musique. Brian Current et Wlad Marhulets, gagnants respectifs de la commande et du prix Azrieli 2016, côtoient l’Américain Lukas Foss. L’Orchestre symphonique national tchèque est dirigé par Steven Mercurio, le chœur par Miriam Nemcová et les œuvres mettent en vedette la soprano Sharon Azrieli, le clarinettiste David Krakauer et le ténor Richard Troxell. Dans les Sept Salles célestes, Brian Current transpose en musique sa lecture du Zohar, ouvrage de référence de la Kabbale. Tensions dans l’orchestration, tumulte des voix, envolées mystiques et densité d’écriture…
Rachmaninoff, Concertos pour piano no 2 et 4 – Deutsche Grammophon Daniil Trifonov – Philadelphia Orchestra, Yannick Nézet-Séguin Au milieu de l’excitation suscitée par la redécouverte d’un enregistrement des Danses symphoniques par Rachmaninoff, voici une nouvelle lecture de deux concertos avec l’orchestre préféré de Rachmaninoff, interprétés par le pianiste vivant qui lui ressemble le plus. Deutsche Grammophon a intitulé l’album Destination Rachmaninoff. Départ, où figure en couverture un portrait du soliste Daniil Trifonov, assis dans le genre de compartiment de chemin de fer contemporain des disques de gomme-laque. Ne vous laissez pas distraire par ces coups de marketing. Trifonov ouvre avec…
Chansons d’amour d’Acadie et de France – Chœur Louisbourg, dir. Monique Richard ; Skye Consort Le Chœur Louisbourg dirigé par Monique Richard et le Skye Consort se rassemblent autour de l’amour pour nous offrir des pages aussi belles que méconnues. Le folklore acadien réharmonisé pour l’occasion y côtoie l’œuvre renaissante du compositeur franco-flamand Jacotin Le Bel. Cet album donne un heureux écho musical à des publications des dernières décennies. Les chansons folkloriques acadiennes sont tirées de deux compilations parues en 1988 et 1996. Tous les tons y passent, de la langueur dans Écrivez-moi à la légèreté du Moine Simon et à la ruse…
Apogee est un album de cinq pièces du compositeur canadien d’origine iranienne Farshid Samandari. À l’instar des savants orientaux des siècles passés, Samandari s’inspire des arts, de la littérature, de la philosophie et des sciences pour trouver les concepts-clés de ses œuvres. Des haikus de Bashō à la poésie mystique de Rûmî, du théâtre nô japonais à la physique des particules, le compositeur nous propose un voyage d’influences colorées, en témoigne la pochette où figure une magnifique peinture à dominante bleue du calligraphe iranien Mehrdad Shoghi. Établi à Vancouver, Farshid Samandari est compositeur en résidence du Vancouver Inter-Cultural Orchestra, lui…
La seule chose qui m’empêche de décerner cinq étoiles à cet album, c’est qu’il est à l’envers. Il débute par une performance tout à fait décente du Concerto pour violon no 1 de Béla Bartók par la virtuose norvégienne Vilde Frang, avec l’Orchestre philharmonique de Radio France dirigé par Mikko Franck. Frang, qui a 32 ans, se produit depuis l’âge de dix ans. Tout ce qu’elle fait est parfaitement charmant et agréable. Le premier concerto de Bartok, œuvre de jeunesse, effusion d’amour innocent, ne va pas changer nos vies. L’Octuor, lui, pourrait. Georges Enesco était l’un des plus grands violonistes de…
Deux symphonies problématiques d’un compositeur torturé sont expédiées par le Boston Symphony et son chef d’orchestre letton avec une quasi-nonchalance. La 4e Symphonie, conservée par le compositeur pendant un quart de siècle à cause de l’attaque de Staline contre Lady Macbeth de Mtsensk, est ultra-mahlérienne dans son orchestration et son ironie et refuse totalement de suivre le positivisme à outrance préconisé par le parti. Le secret des intentions du compositeur échappe à de nombreux chefs d’orchestre. Andris Nelsons adopte une sorte de neutralité balte en minimisant les émotions extrêmes de la partition dans l’espoir de ne pas être attaqué par…
Le regretté Michael Kennedy, critique musical de longue date au Telegraph, m’a dit une fois qu’il avait perdu de l’intérêt pour la nouvelle musique, à la fin de la soixantaine. Michael avait connu Ralph Vaughan Williams et Benjamin Britten; il trouvait que leurs successeurs n’étaient pas à la hauteur. Nous avons eu des discussions sur les mérites de Birtwistle et de Turnage mais ses oreilles n’étaient pas en faveur de la musique d’avant-garde et je respectais sa franchise d’au moins l’admettre. Moi-même, à peu près au même âge, je suis toujours doublement curieux: impatient de voir ce que de vieilles…
Si je devais choisir entre Elgar et Vaughan Williams pour un voyage sur une île déserte, je sais lequel ce serait. Elgar semble de nos jours trop familier, tandis que Vaughan Williams ne perd jamais une occasion de nous surprendre. Vous ne le devineriez pas automatiquement dès la première pièce de cet enregistrement de l’Orchestre symphonique de Toronto: la “Serenade to Music” de 1938, une oeuvre exubérante faite de morceaux de Shakespeare et de broderie anglaise. Assez rapidement, nous passons au concerto pour hautbois de 1944. Il s’agit d’une consolation exquise composée durant la guerre, une promesse de champs verts…