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Analekta4
Brahms : Symphonie n° 1. Schumann : Symphonie n° 1. Clara Schumann : Concerto pour piano op. 7. Gabriela Montero : cinq improvisations. Gabriela Montero, piano. Orchestre du Centre national des Arts/Alexander Shelley. Analekta AN 2 8877-8. Durée totale : 122 min 17.
Clara, Johannes et Robert (Schumann, Brahms et Schumann) font depuis longtemps l’objet d’une fascination voyeuriste. En 1947, le film sentimental Passion immortelle était, paraît-il, inspiré de leur relation triangulaire. Maintenant, il y a Les favoris des muses, un album sérieux de l’Orchestre du Centre national des Arts dirigé par Alexander Shelley. Sur cette compilation, la musique orchestrale des trois compositeurs côtoie un ensemble de miniatures pour piano improvisées destinées à sonder leur univers spirituel commun. Même si on retrouve peu de liens biographiques, les deux disques combinent des prestations très écoutables.
Le Concerto pour piano que Clara Schumann a composé en 1835 devrait occuper une place plus importante dans les programmations de concerts. L’intro audacieuse du piano est surprenante même après plusieurs écoutes et la confiance avec laquelle les thèmes sont développés laisse l’auditeur déçu que le premier mouvement soit si court. Dans la Romanze, le piano mélodieux est accompagné par un violoncelle obligato (chaleureusement joué par Rachel Mercer). Le finale étincelant (le premier mouvement à avoir été composé, également plus long que les deux autres combinés) suggère l’influence de Chopin plutôt que du professeur de Clara Schumann (qui a peut-être participé à l’orchestration). Brahms, né en 1833, n’a évidemment rien à voir avec cette partition, même si son Concerto pour piano n° 2 présente lui aussi un imposant solo de violoncelle dans le mouvement lent.
Gabriela Montero joue tantôt avec panache virtuose, tantôt avec l’intimité d’un monologue, selon les besoins. Quiconque a entendu la Vénézuélienne en récital peut témoigner de ses remarquables pouvoirs d’improvisatrice. Ici, nous avons cinq échantillons de son art dans un style approprié du XIXe siècle, apparemment basés sur des thèmes originaux. Les pièces sonnent comme des intermezzos pour une écoute de salon plutôt que comme des fantaisies pour la salle de concert. L’exquise Improvisation n° 5, avec une coda mélancolique en mode mineur, évoque avec succès les esprits de Clara et Brahms. Il serait intéressant dans les prochaines compilations (trois autres sont prévues) d’entendre Montero jouer les improvisations inédites que Clara a composées en 1895 et qu’on peut trouver en ligne sous forme manuscrite.
Tout se passe rondement du côté de l’orchestre sous la direction de Shelley. La Symphonie n° 1 de Schumann (« Printemps ») est dynamique, énergique et robuste : les triples-forte du premier mouvement m’ont incité à baisser le volume d’un cran. Aussi bon que soit cet enregistrement, je trouve la version de 2014 de Yannick Nézet-Séguin avec l’Orchestre de chambre d’Europe (DG 479 2437) plus ferme comme artefact audio. Dans tous les cas, aucun des chefs ne s’attaque vraiment aux nombreux contrastes forte/piano que Schumann emploie (comme dans le morceau de violoncelle cantabile du Larghetto). La Symphonie n° 1 de Brahms démarre trop rapidement. Une fois que nous atteignons l’Allegro, cependant, le parcours est plus régulier. L’Andante sostenuto nous rapproche du compositeur à son plus tendre. Les solos sont doux et le rythme est naturel. Le troisième mouvement est détendu − plus lent de presque une minute de celui de Charles Mackerras et de l’Orchestre de chambre d’Écosse − et les cordes dans le finale (renforcées par des musiciens surnuméraires, à en juger par la liste du livret d’Analekta) ont l’ampleur requise. Deux autres demandes pour les parutions à venir : la Symphonie en sol mineur (« Zwikau ») de Schumann et le Konzertsatz en fa mineur (également inachevé) de Clara. Nous avons déjà pas mal d’enregistrements des standards !
Traduction par Andréanne Venne
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