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L’histoire du Fantôme de l’Opéra, telle que racontée dans le roman de Gaston Leroux publié en 1910, est entrelacée de faits avérés, de mythes populaires et d’inventions de l’auteur. Les récits populaires non vérifiés concernant l’existence, l’origine et le vécu du fantôme de l’opéra se présentent en quelques déclinaisons, les faits historiques se mêlant aux anecdotes. Si bien que l’histoire de l’homme masqué qui était plus qu’une ombre en est une qui continue depuis sa création d’entretenir le mystère et de brouiller la frontière entre le fictif et le réel.
Des faits attestés
Avant de se tourner vers la fiction, Gaston Leroux avait été sténographe judiciaire, critique de théâtre et reporter pour Le Matin. En sa qualité de journaliste, il avait couvert en profondeur l’histoire de l’Opéra de Paris, bastion de la Commune de Paris. Puis, ayant suivi la construction du Palais Garnier, de 1861 à 1875, l’auteur était aussi informé de quelques faits secrets.
Une rumeur parvenue à Leroux, selon laquelle un des architectes, nommé Erik, avait requis de vivre parmi les fondations de la structure et n’avait plus été revu à la surface, a donné son prénom au Fantôme. Le Palais Garnier, comme dans le récit, abritait également un lac. En creusant les fondations de l’Opéra, les ouvriers avaient semble-t-il touché un bras de la Seine et, l’eau n’ayant jamais pu être endiguée, un système de citerne a été mis en place pour la contrôler. Ce bassin sous-terrain, ressemblant effectivement à un lac artificiel, est utilisé aujourd’hui par les sapeurs-pompiers, qui s’y entraînent à nager dans l’obscurité.
Un autre fait réel imbriqué dans le roman est la tragédie survenue en 1896 à l’Opéra Garnier, quand un contrepoids du grand lustre se détacha, tuant une concierge durant une représentation. Leroux enchevêtre cet incident avec le point culminant du récit où Erik se venge en causant la chute du lustre avant d’enlever Christine dans le tumulte qui s’en suit. Les faits historiques sont rappelés dans la scène : « Mon dessein n’est point de faire revivre ici une heure historique. Les curieux n’ont qu’à ouvrir les journaux de l’époque. Il y eut de nombreux blessés et une morte. »
Les Urnes de l’Opéra
Dans son avant-propos, où la figure du narrateur détective se mêle à celle de l’auteur, Leroux explique que le corps du Fantôme aurait été trouvé durant l’enterrement des enregistrements phonographiques de l’Opéra. Or, si l’histoire ne dit pas si un corps a réellement été trouvé, l’enfouissement des enregistrements a bien eu lieu. En 1907, la Compagnie française du Gramophone a scellé vingt-quatre enregistrements dans deux jarres avant de les ensevelir dans la crypte de l’opéra pour les cent prochaines années. Les enregistrements ont été récupérés en 2007, numérisés par EMI et distribués sous le titre Les Urnes de l’Opéra.
Christina Nilsson (1843-1921), une soprano suédoise prisée à l’époque, n’a, contrairement à d’autres divas de l’opéra, jamais eu d’enregistrement phonographique de sa voix. D’ori-gine modeste et admirée pour son charme nordique, elle était entre autres reconnue pour son interprétation brillante de Marguerite dans le Faust de Gounod. C’est elle qui aurait inspiré à Leroux le personnage de Christine Daaé.
La malédiction
Plusieurs se plaisent encore à entretenir le mystère, certains allant même jusqu’à fomenter l’idée d’une malédiction. L’incendie du Théâtre Mogador peu avant la première à Paris du Fantôme de l’Opéra en 2016 a donné du souffle aux superstitions. Interviewé par le Telegraph, le curateur du Palais Garnier, Pierre Vidal, qui est aussi familier avec le mythe du repaire lacustre qu’avec la froide réalité technique de la citerne, confie que même si personne n’a vu de fantôme à l’Opéra Garnier, c’est encore le Fantôme qu’on accuse (à la blague) lorsqu’une chose inexplicable se produit1.
1 Everett, Lucinda (2010-02-17). “Where the Phantom was born: the Palais Garnier”. Daily Telegraph. ISSN 0307-1235. Récupéré le 27-04-2018.
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