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La pianiste Shirley Wu a suivi l’édition piano du CMIM de cette année et nous fait part de ses réflexions sur la demi-finale. Les finalistes ont été annoncés et se produiront les 15 et 16 mai.
Michelle Candotti, Italie (27 ans)
Lauréate du deuxième prix de nombreux concours internationaux et l’une des deux seules pianistes féminines en demi-finale de la CMIM 2024, Michelle Candotti a commencé sa prestation avec humour par la Coronavirus Etude for Piano and Disinfecting Wipe. Dans son introduction, elle a parlé avec assurance de son répertoire, notamment de la Dante Sonata -Fantasia Quasi Sonata de Franz Liszt, une composition profondément liée à son héritage culturel et inspirée par la Divine Comédie.
Avec des vers poignants faisant écho aux mots d’Hugo, le jeu de Candotti a plongé dans les profondeurs de l’enfer, évoquant d’obsédantes plaintes d’angoisse qui reflétaient l’intensité de son regard, résonnant avec l’inquiétant « intervalle du diable ». Cependant, au milieu des ténèbres, des moments de joie céleste ont émergé, s’écoulant gracieusement dans des passages d’octaves techniquement exigeants. Cependant, malgré son talent indéniable, l’interprétation de Candotti n’a peut-être pas réussi à saisir pleinement les contrastes dynamiques et les luttes internes inhérentes à cette pièce. Il s’en est fallu de peu pour qu’elle n’accède à la finale.
Par rapport à son collègue, Vitaly Piserenko, issu de la même école que Dmitri Alexeev, membre du jury du concours de cette année, ou même par rapport à Elias Ackerley, l’interprétation de Candotti n’a pas atteint les sommets infernaux recherchés par les juges exigeants. L’exécution des passages rapides laissait à désirer en termes de vélocité. En outre, des perturbations mineures, telles qu’une brève interruption de la pédale de la main gauche pendant la section piu tosto ritenuto e rubato quasi improvisario, et la nécessité de pauses plus longues pour permettre au public de s’immerger pleinement dans le lugubre motif de la « mort » (culminant avec une interprétation de 16 minutes), ont probablement contribué à cette divergence d’évaluation.
Elias Ackerley, Corée/Royaume-Uni (22 ans)
Le comportement d’Ackerley fait écho à son jeu, incarnant un mélange d’humilité et de profondeur. Il a révélé peu d’émotions ou d’extraversion dans son discours d’introduction. Cependant, cette présence tranquille cachait une profondeur captivante de concentration et d’expression intérieure.
Dans son interprétation de la Sonate de Dante lors de la première épreuve, il a entrelacé sans difficulté les thèmes du paradis et de l’enfer. Avec une autorité imposante, Ackerley a guidé le piano sans effort. Sa maîtrise de la technique et sa perspicacité artistique ont élevé sa performance au-delà de la simple compétence, soulevant des comparaisons avec Liszt lui-même. Son interprétation a également approfondi la recherche de la pureté et de l’ascétisme sur fond de complexité humaine.
Ensuite, Ackerley nous a plongés dans l’introspection de la Sonate n° 4 Op. 30 de Scriabine. Dans le premier mouvement, il a peint avec la lumière, l’ombre et la couleur, imprégnant chaque note d’un soupçon de désir et de curiosité. Le Prestissimo volando du deuxième mouvement a rapidement modifié la narration, chaque récurrence du motif marquant un nouveau chapitre, tandis que le finale a éclaté dans une célébration jubilatoire, signalant une émergence triomphante de la confusion et du désespoir désolant. Malgré quelques fausses notes notables dans Liszt au premier tour et dans Beethoven au second tour, l’art d’Ackerley lui a valu l’indulgence du jury.
Jaeden Izik Dzurko, Canada (24 ans)
Dzurko a commencé sa prestation de manière tout à fait inhabituelle avec la composition canadienne de Barbara Assiginaak, interprétée entièrement de mémoire. Ce choix a non seulement mis en valeur ses prouesses techniques, mais a également souligné sa volonté de défendre les œuvres des compositeurs canadiens. En tant que seul concurrent né et élevé au Canada, Dzurko a reçu deux distinctions : le prix André-Bachand pour la meilleure interprétation d’une œuvre canadienne et l’accolade pour la meilleure interprétation d’une sonate.
La Sonate n° 1 de Rachmaninov, bien que moins connue que sa deuxième sonate, exige une endurance exceptionnelle, un contrôle précis de la dynamique et une intensité inébranlable pour transmettre le drame à son public. Dzurko s’est acquitté de ces tâches avec un talent remarquable. Dans le premier mouvement, il a su capter la passion ardente voulue par Rachmaninov, évoquant l’esprit de Faust. Le deuxième mouvement est empreint d’innocence, offrant un contraste saisissant avec l’ascension infernale du troisième mouvement. Il a su naviguer dans le paysage émotionnel complexe de Rachmaninov avec subtilité et profondeur, donnant l’impression que ses grandes mains se baladaient sans efforts devant l’auditoire.
Derek Wang, États-Unis (25 ans)
Dès le premier tour du concours avec Don Juan, Derek Wang a fait preuve d’une grande maturité musicale et technique, comme en témoigne son récent deuxième prix au concours Liszt d’Utrecht. Son interprétation était inéluctable, comme si elle était destinée à captiver tous ceux qui l’écoutaient.
Lors de la demi-finale, Wang a ingénieusement imbriqué le Nocturne n° 4 en do mineur de Francis Poulenc dans deux improvisations du même compositeur. Son interprétation du Nocturne lyrique a été livrée avec une telle intimité qu’il semblait plonger dans la mélodie les yeux fermés, ce qui lui a valu l’admiration du public. Alors que la pièce de Barbara a connu un petit faux pas au début, la confiance de Wang a brillé. Exécutant la Sonate Hammerklavier de Beethoven, notoirement difficile, avec un dévouement inébranlable à la partition, la puissante articulation des doigts de Wang a franchi les passages exigeants avec engagement. Les rythmes syncopés de la sonate font écho aux éléments jazzés introduits par Poulenc, insufflant au concours classique une touche de spontanéité et de flair.
Jakub Kuszlik, Pologne (22 ans)
Après avoir entendu un rubato inhabituel dans Reflets dans l’eau de Debussy, juxtaposé à une interprétation presque parfaite de la Sonate n° 3 de Chopin au premier tour, on pourrait percevoir la performance de Kuszlik comme quelque peu instable… ou imprévisible.
Au deuxième tour, il a opté pour la Fantaisie n° 3 de Mozart, relativement plus simple, qu’il a interprétée avec pureté et innocence, bien qu’elle n’ait pas la précision dont Derek Wang avait fait preuve au premier tour dans la Fantaisie n° 4. En outre, sa présence sur scène semblait quelque peu inadaptée à l’innocence de Mozart. En revanche, son interprétation de Brahms a été convaincante et a trouvé un écho dans le public.
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