Le Spirio de Steinway & Sons – la reproduction sonore réinventée

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Que diriez-vous si Lang Lang, Yuja Wang, Vladimir Horowitz ou même Sergueï Rachmaninov se proposaient de venir jouer un morceau dans votre salon ? Au mois d’octobre, l’entreprise Pianos Bolduc présentait à Montréal le Spirio, une récente invention de Steinway & Sons. Ce piano à queue comprend une technologie de pointe capable de restituer avec une extrême précision la musique qu’on y a jouée. Il ne s’agit plus simplement de rendre les notes à la manière d’un piano mécanique. Ici, le clavier, les marteaux, les cordes et les pédales reproduisent fidèlement les moindres subtilités (toutes les nuances, tous les accents et toutes les variations rythmiques). Le nom Spirio vient du verbe latin spirare (souffler, vivre, respirer), qui renvoie à l’inspiration poétique et à l’âme. Il y a effectivement dans les capacités de cet instrument quelque chose qui touche à l’essence d’une interprétation.

À première vue, le Spirio est identique aux pianos à queue Steinway. La seule différence perceptible consiste en un fil sous l’instrument qui alimente en électricité le système de reproduction sonore. Ce dernier, intégré au moment de sa fabrication, fait l’objet d’un minutieux camouflage. De même, le son bénéficie d’une précaution particulière, tant qu’entre pianos de même catégorie on ne saurait le différencier. Bref, les concepteurs avaient à cœur de faire du Spirio un instrument tout aussi agréable à jouer que les autres pianos haut de gamme. En Amérique du Nord, la compagnie propose deux modèles, soit le modèle B (modèle de chambre, d’une longueur de 6 pieds 11 pouces) et le modèle M (d’une longueur de 5 pieds 7 pouces). Le Spirio est principalement destiné aux particuliers et son prix se chiffre à plus d’une centaine de milliers de dollars.

Les prouesses technologiques du Spirio sont possibles grâce à un logiciel breveté qui mesure la vitesse des marteaux (1020 niveaux de nuances sont discernables, à raison de 800 échantillons par seconde) ainsi que l’activité des pédales forte et douce (256 degrés à raison de 100 échantillons par seconde). Des solénoïdes (bobines de fil conducteur), qui actionnent les touches du clavier et les pédales, assurent la reproduction sonore. Cette technologie est le fruit d’un partenariat entre Steinway & Sons et Wayne Stahnke, spécialiste des pianos automatiques modernes.

Un iPad accompagne le piano, pour lequel une application a été créée, qui donne accès à une bibliothèque de plus de 3000 morceaux. Celle-ci s’accroît de quelque quatre heures de musique tous les mois. En effet, plusieurs artistes, à l’invitation de Steinway, l’enrichissent périodiquement en jouant leur musique sur un Spirio. Les utilisateurs peuvent donc faire jouer à loisir des pianistes comme Yuja Wang, Olga Kern, Pascal Rogé, mais aussi Jason Moran, Bill Charlap et David Benoit.

Or, la bibliothèque du Spirio ne se limite pas à ce qu’on enregistre à même le piano. Elle comprend également des interprétations dites historiques, livrées et enregistrées bien avant les nouvelles technologies. Les techniciens Steinway se sont effectivement attelés à la tâche de convertir d’anciens enregistrements en prestations Spirio. Les résultats sont surprenants. On peut écouter en temps réel, sans le truchement de haut-parleurs, le Vol du bourdon de Rimski-Korsakov joué par Rachmaninov, issu d’un enregistrement de 1929 (notons au passage que l’interprétation du grand compositeur russe est sèche et serrée en comparaison de celle d’Olga Kern pratiquée sur le même Spirio, mieux aérée à notre avis), ou encore I Got Rhythm de George Gershwin, version tirée d’un enregistrement de 1931. Le dernier récital de Vladimir Horowitz, donné en 1987, s’y trouve aussi. Il est saisissant d’écouter ces grands musiciens et de voir le clavier reproduire dans le détail les mouvements que leurs mains ont autrefois accomplis.

Au total, incluant les prestations fixées à même le piano et celles qualifiées d’historiques converties pour l’instrument, plus de 1700 artistes composent la bibliothèque du Spirio.

L’application de l’iPad permet d’ajuster le volume d’une reproduction sonore, selon qu’on souhaite l’écouter dans sa pleine intensité, telle qu’elle a été fixée, ou qu’on préfère lui donner les allures d’une musique d’ambiance. La diminution du volume ne va pas d’ailleurs jusqu’à étouffer les notes qui, dans la prestation originale, étaient jouées piano ou pianissimo. Elle n’engage que les notes dépassant le niveau de volume voulu.

Les possibilités déployées par cette innovation technologique sont multiples. Si elle donne l’occasion à des auditeurs d’accéder sans intermédiaire à de grandes interprétations dans le confort de leur logis, elle laisse aussi entrevoir une utilité pour les pianistes de profession et les étudiants en musique. Plus claire, plus nette et enrichie d’une expérience visuelle, l’audition permise par ce nouveau genre de piano augmente à coup sûr la capacité des interprètes de perfectionner leur jeu.

www.pianosbolduc.com
www.steinwayspirio.com

 

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