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Alpha Classics4
Franz Schubert savait ce qu’il faisait lorsqu’il a écrit des chansons en cycles. Cela a empêché les chanteurs de les mélanger au hasard dans leurs récitals mettant de l’avant leurs propres talents plutôt que ceux du compositeur. L’art de créer un récital voix et piano a reculé au cours du siècle actuel, et rares sont ceux – sauf Matthias Goerne et Alice Coote, parmi les exceptions récentes et cohérentes − qui veulent et peuvent présenter un programme dans lequel les chansons individuelles sont liées les unes aux autres et à une idée plus large.
Bienvenu est donc ce nouvel album du baryton allemand Benjamin Appl et de son pianiste britannique James Baillieu. La notion de fruit défendu tirée du jardin d’Eden est appliquée à notre époque où la permissivité totale est la norme. Un verset de la Genèse relie les chansons et la sélection ne finit pas de surprendre − du décadent Reynaldo Hahn à Arnold Schoenberg aux portes de l’Arcadie. Je défie quiconque de prétendre connaître toutes les chansons de cette sélection.
Appl est à l’aise dans trois langues et dans une large gamme d’expressions émotionnelles. Now Sleeps the Crimson Petal de Roger Quilter, une chanson de salon édouardienne, sonne comme l’heure de fermeture d’un bar gay de Soho. La Petite Rose de Schubert se fait piétiner. Die Ballade von der Paragraphen 218 de Hanns Eisler est un joyau oublié de la licence de Weimar et Yukali de Kurt Weill − étroitement lié à Surabaya Johnny − est l’incarnation même de l’amour impossible. Baillieu est un partenaire à part entière dans cette entreprise. Je pense n’avoir jamais entendu le piano dans Urlicht de Mahler avec un phrasé aussi délicat et séduisant.
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