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CPO3
Le Times de Londres a réduit sa section de critiques de disques classiques hebdomadaire à quelques centimètres. D’autres journaux ignorent complètement les enregistrements, sauf dans les récapitulatifs du temps des fêtes. Le secteur classique est en train de mourir par manque d’attention et les maisons de disques mettent à pied leurs spécialistes.
Raison de plus pour que des publications en ligne comme celle-ci assurent une couverture continue d’une partie vitale de l’économie musicale. Mon choix de la semaine peut sembler ésotérique. Elle provient de Ludwigshafen, dans l’ouest de l’Allemagne, et est interprétée par la Deutsche Staatsphilharmonie Rheinland-Pfalz, sous la direction du Britannique Michael Francis. La compositrice est une Irlandaise qui a vécu à Paris dans la seconde moitié du 19e siècle et qui est pratiquement oubliée dans ses deux pays. Augusta Holmès (1847-1903) n’a pas pu étudier au Conservatoire parce qu’elle était une femme. Elle publia plusieurs œuvres sous un pseudonyme masculin et reçut les éloges de César Franck et de Camille Saint-Saëns. Catholique convaincue, elle a eu cinq enfants hors mariage avec le poète juif Catulle Mendès, époux de l’amante de Richard Wagner, Judith Gautier. Incestueux, direz-vous ? C’est Paris.
La musique orchestrale de Holmès est intense, vigoureuse et bien faite, souffrant dans le pire des cas d’un excès de wagnérolâtrie, mais sans en pâlir pour autant. Dans le meilleur des cas, elle est mélodieuse, propulsive et curieuse. Une symphonie de 23 minutes basée sur le Rolando Furioso d’Ariosto possède un mouvement lent enchanteur. Un poème symphonique sur Andromède n’est pas moins captivant, avec des clins d’œil à Berlioz et à Wagner. Mais il s’agit d’une compositrice ayant une voix propre et une compétence bien supérieure à la moyenne française.
Ce qui retient l’attention ici, ce sont deux poèmes symphoniques sur l’Irlande et la Pologne, l’un aussi improbable que la Guinness verte et l’autre d’un sentimentalisme maladif (lâchez cette harpe !). Peu importe : ce disque me donne envie d’entendre plus de Holmès, et vite. La Deutsche Staatsphilharmonie Rheinland-Pfalz, un orchestre qui a grand besoin d’une nouvelle image de marque, est un ensemble formidable avec des solistes à vent de classe mondiale ; le chef d’orchestre est un ancien du LSO. Que demander de plus ? Croyez-moi, vous voudrez entendre.
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