L’autrichienne Florentina Holzinger vient à Montréal pour la première fois et en met plein les yeux avec TANZ, présenté à guichet fermé à l’Usine C, 20-22 février https://usine-c.com/
Il faut revenir sur TANZ, l’œuvre phare de la chorégraphe Florentina Holzinger qui a été proposée au centre de création et de diffusion national et international du quartier Centre-Sud de Montréal. Sur le site de l’Usine C, on peut lire : « Ce spectacle comporte des scènes de perçage en direct, de suspension corporelle, de nudité ainsi qu’une représentation explicite de violence sexuelle. Certaines scènes ont recours à des crochets, des aiguilles, du sang et des lumières stroboscopiques ». Le public est donc plus qu’averti.
Troisième volet d’une trilogie sur la métamorphose du corps, le spectacle commence par une classe de ballet peu conventionnelle, donnée par Beatrice Cordua, 83 ans, première ballerine à danser nue Le sacre du printemps en 1972. La Maîtresse de ballet détaille avec précision la mécanique des muscles sollicités, la douleur endurée et évoque le désir de légèreté et d’envol des ballerines. TANZ caricature l’héritage du ballet, reprenant la trame du romantique Sylphide (1832). Certaines ballerines finiront d’ailleurs par s’élever dans les airs, se suspendant par les cheveux ou se juchant sur des motos volantes.
Mais, pour l’instant, le personnage de Beatrice Cordua, qui est assise dans un fauteuil roulant pendant la performance, incite les six ballerines à se dévêtir, transformant peu à peu une séance d’exercices à la barre en ode à la sexualité assumée et (très) franche. Une sorcière grotesque, une vidéaste et de mystérieuses interprètes, dont l’une est juchée sur une structure accrochée au plafond et voilée, complètent le premier tableau.
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TANZ enchaine des tableaux saisissants où l’hémoglobine n’est pas en reste. Crédit photo : Eva Würdinger
Les douze interprètes féminines sont d’âges variés et de morphologies diverses. L’ambiance est punk, gore, les ballerines sont couvertes de (faux) sang, la Maîtresse de ballet accouche d’un gros rat et la scène est filmée de près à la vidéo. Tout est grotesque et plutôt amusant. Florentina Holzinger, un bras immobilisé mais nue elle aussi, se présente un moment sur scène pour expliquer les raisons de son absence sur scène. Elle explique Tanz, qui tourne depuis sept ans, est en fin de parcours et que la suite du spectacle sera plus chimérique.
La scène de perçage est filmée en direct et retransmise sur les deux écrans qui flanquent la scène. Le tableau qui suit, celui de la suspension corporelle, a été plus difficile à regarder pour certains spectateurs qui ont quitté la salle. La femme percée, suspendue par des pinces qui lui transpercent le dos, se balance et ricane de façon inquiétante. On lui passe un balai et un nouveau personnage de sorcière apparait, insoumis et excentrique, affirmant la force des femmes, leur liberté et leur indépendance. Le spectacle est mémorable et la scénographie est autant à souligner que l’aspect visuel de la production.
Aussi, pour que l’Usine C puisse continuer à faire venir de telles productions en ces temps amers de coupures budgétaires, il importe de soutenir le centre de création et de diffusion qui souligne cette année 30 ans d’activité. Consultez l’excellente programmation à venir, participez à la campagne de financement ou même à l’évènement bénéfice autour de la pièce Histoire de la violence, d’après le roman d’Édouard Louis, mis en scène par Thomas Ostermeier de la Schaubühne de Berlin.
TANZ, présenté à guichet fermé à l’Usine C, 20-22 février https://usine-c.com/