Défendue par une distribution impeccable, la savoureuse comédie musicale Lili St-Cyr ramène la légendaire stripteaseuse dans ses anciens quartiers, le Red Light du Montréal de 1940. Au TNM, jusqu’au 22 juin et en tournée partout au Québec Lili St-Cyr – Théâtre Musical (lilistcyr.ca)
Après avoir été présentée l’été passé à Kingsey Falls, puis dans une première tournée un peu partout au Québec, la comédie musicale de Mélissa Cardona est brièvement présentée dans le cadre des Francofolies avant de repartir en tournée. C’est une rare occasion de plonger dans l’atmosphère du Montréal des cabarets des années 1940, leur passé trouble et haut en couleur.
Entre fresque historique et fiction, Lili St-Cyr raconte comment la célèbre effeuilleuse a choisi Montréal et les circonstances qui ont entouré la création du mythique numéro de la baignoire transparente. Ce numéro fit la renommée internationale du Théâtre Gayety – le même bâtiment qui abrite actuellement le Théâtre du Nouveau Monde. Le fameux Crazy Horse Saloon de Paris aurait été créé par Alain Bernardin après avoir vu le spectacle de Lili St-Cyr au Gayety.
C’est que la loi, à cette époque, interdit aux danseuses de quitter la scène avec moins de vêtements qu’à leur entrée sur les planches. Qu’à cela ne tienne, Lili St-Cyr contourne allègrement le règlement en imaginant commencer nue, dans une baignoire pleine de bulles. Son numéro consistait donc en un rhabillage lent et sensuel.
Des femmes de caractères
Lili St-Cyr dérange, elle prône avec aplomb la liberté de choisir sa vie professionnelle comme elle l’entend et révèle les nuances des autres personnages. Elle encourage et pousse sur la voie du succès Sophie Leblanc, une jeune artiste qui veut chanter comme Édith Piaf, sans faire de compromis et qui la prend pour une rivale. Lili St-Cyr bouscule aussi Jessie Fisher, la première conseillère élue à l’Hôtel de ville, que l’autrice Mélissa Cardona a transformée en ennemie acharnée du vice, passionaria du nettoyage du Red Light. Lili ST-Cyr découvre les libertés que la politicienne prend avec la vérité, ce qui façonne le personnage et le rend plus intéressant.
Marie-Pier Labrecque est frappante dans ce rôle-titre, elle a appris à maitriser sa voix, elle bouge et chante de façon très, très assurée et convaincante. Lunou Zucchini (Sophie Leblanc), formée en théâtre musical au Collège Lionel-Groulx et révélée par la Star Académie, est touchante de simplicité et sa voix et son jeu sont justes. Grande habituée des comédies musicales, la toujours excellente Kathleen Fortin campe une Jessie Fisher aux prises avec des difficultés auxquelles plusieurs femmes en quête d’indépendance se heurtaient.
Du côté des comédiens, Roger La Rue est épatant dans les multiples rôles qu’il endosse. Maxime Denommée, plus connu pour son jeu et ses mises en scènes, révèle un joli doigté à la guitare et une voix bien placée. Le comédien, chanteur et dramaturge Stéphane Brulotte, qui incarne notamment Jimmy Orlando, l’ancien joueur de hockey des Red Wings de Détroit, devenu gérant du cabaret El Morocco et amant de Lili St-Cyr, est sur scène comme un poisson dans l’eau.
Lili St-Cyr est une comédie musicale fort bien documentée. Les personnages ont de la profondeur et les chansons font avancer l’intrigue. Kevin Houle signe une musique aux accents swing et jazz, dont l’incontournable Guido Del Fabbro a fait les arrangements. La mise en scène de Benoit Landry est simple et efficace, tout comme les chorégraphies d’Alex Francoeur. Les spectateurs ont aussi apprécié les costumes de Sylvain Genois, qui évoquent parfaitement l’époque de la seconde guerre mondiale.
Le spectacle a eu le temps de se déposer et il est évident que les comédiens le possèdent sur le bout des doigts et s’amusent sur scène. Alors, ne boudez pas votre plaisir, la tournée du spectacle se poursuivra tout l’été et à l’automne, partout au Québec. Tous les détails au Lili St-Cyr – Théâtre Musical (lilistcyr.ca)