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Un article de Philip Ehrensaft et Wah Keung Chan
Le milieu de la musique classique au Québec fonctionnera et continuera à être rentable grâce à de nouveaux dispositifs après l’ère COVID-19, apprend-on dans un sondage mené auprès des consommateurs culturels et réalisé par La Scena Musicale.
Le nouveau visage de l’économie en matière d’organisation de concerts se traduit par une réduction des événements avec public, par la diffusion payante de spectacles en direct et d’archives; par un soutien gouvernemental accru, par l’augmentation du financement de la part du privé et par davantage de dons individuels, malgré des conditions socio-économiques incertaines. Le défi est de taille, mais pas impossible à relever.
La Fondation du Grand Montréal a accordé à La Scena Musicale une modeste subvention pour mener une enquête sur la fréquentation des concerts anticipée et les choix de consommation en matière numérique qui se heurtent souvent à des questions d’argent. Réalisée en juillet et en août, l’étude nous livre des résultats pertinents à la fois pour les spectacles en salle qui respectent le nombre autorisé d’auditeurs et pour les diffusions de grande qualité sur Internet.
Conclusion no 1 : le public est très partagé sur le retour dans les salles de concert
Une proportion importante du public, 46 %, est prête à assister de nouveau aux concerts en salle à court terme (29 % immédiatement, 11 % après un mois et 6 % après deux mois); 19 % du public prévoit une période d’attente allant de trois à 12 mois. Près du tiers des répondants ont l’intention d’attendre plus longtemps (12 % jusqu’à ce qu’un vaccin soit disponible et 3 %, plus de 12 mois). Dix-neuf p. cent sont encore incertains, ce qui n’indique pas une volonté de retour en salle à court terme.
- Commentaires : étant donné que les salles du Québec limitent leur capacité d’accueil du public à 25 % et qu’elles n’acceptent pas plus de 250 auditeurs par concert, il est probable que les représentations se tiendront à guichet fermé.
Les réponses favorables à cette question (46 %) sont plus élevées que dans d’autres enquêtes menées précédemment.
- Les masques devraient être rendus obligatoires. Une grande majorité de répondants (71 %) pensent que tous les auditeurs devraient porter un masque pendant des représentations en salle, contrairement à ce que préconise le gouvernement du Québec.
- L’utilisation des toilettes pose un problème logistique. Une très grande majorité de répondants (93 %) disent avoir besoin d’un accès sécurisé en entrant et en sortant du site ainsi que d’un accès sécurisé aux toilettes. Une majorité indique qu’ils utilisent souvent ou parfois les toilettes. Celles-ci sont petites, fermées, et présentent un risque de contagion. Les longues files d’attente et les distances resserrées entre spectateurs peuvent également causer des difficultés.
Conclusion no 2 : le public opte plutôt pour des diffusions gratuites
Pendant la pandémie, 80 % des répondants ont regardé au moins une représentation en ligne. Parmi ceux-ci, seulement 30 % ont payé pour un contenu similaire.
En ce qui concerne les perspectives de revenus pour les orchestres et organismes musicaux, une majorité (87 %) des personnes interrogées déclarent être disposées à payer pour du visionnement en ligne à un prix fixe ou par un don. La plupart d’entre eux, cependant, ne paieraient pas la somme équivalente au prix d’un billet de concert en direct. Seulement 5 % seraient prêt à payer le plein prix.
L’expérience de socialisation n’est pas un facteur important. On pense souvent que les interactions sociales à une soirée au concert sont irremplaçables. Les données récoltées indiquent que cela n’est pas nécessairement le cas : 53 % des répondants indiquent qu’il s’agit d’un facteur important pour eux, contre 88 % qui privilégient l’interprète ou la production et 65 % qui apprécient la spontanéité du spectacle vivant. Étonnamment, seulement 15 % des personnes interrogées valorisent le fait d’être en famille ou entre amis. L’expérience de la musique et le contact direct avec l’interprète viennent en premier.
Cinquante-trois p. cent des répondants qui apprécient les contenus numériques mettent en avant le fait qu’ils se sentent en sécurité chez eux, ce qui incite les institutions musicales à élargir leur offre payante en la matière; 48 % valorisent la commodité de visionner les concerts depuis leur ordinateur et 36 % évoquent l’accès au même événement à un coût plus bas.
Autres observations :
- D’après le sondage, on observe que les personnes habitant dans les villes migrent vers la banlieue ou la campagne à l’ère de la COVID-19, en quête de sécurité et d’une moindre densité de population.
- Alors que les répondants disent aimer pouvoir accéder à une diffusion en ligne à un faible coût, on observe une baisse du coût des téléviseurs grand écran et des chaînes sonores de haute qualité, ce qui est aussi à leur avantage.
- Les personnes interrogées préfèrent les diffusions qui traduisent la spontanéité du spectacle vivant et l’expérience du concert en direct.
Remarques finales :
Soixante p. cent des répondants à cette enquête avaient 55 ans ou plus et 84 % détiennent un diplôme universitaire. À noter que la moitié d’entre eux ont un diplôme de troisième cycle. Il s’agit d’un public averti, susceptible d’être conscient des risques associés à l’absence de masques dans une salle de concert. Si la politique du gouvernement du Québec de ne pas exiger de masques dans les salles de concert persiste, certains répondants qui ont indiqué leur intention de retourner au concert en direct pourraient revenir sur leur décision.
Les résultats indiquent que le contact en personne avec l’interprète est plus important que l’expérience collective. Dans tous les cas, la diffusion virtuelle comme option pour le concert en direct rencontre une forte adhésion de la part du public.
Les répondants affichent leur volonté de payer pour le visionnement de contenus en ligne tant que le prix est inférieur à celui des billets de spectacle en salle. Il est raisonnable de conclure que la diffusion en ligne continuera de faire partie des nouvelles habitudes de production culturelle après la pandémie.
Traduit par Justin Bernard
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