Ayant envie d’une dose de Brahms, je suis tombé sur une nouvelle édition de son double concerto pour violon et violoncelle, écrit en 1887 et la dernière partition qu’il ait composée pour orchestre, dix ans avant sa mort. Le concerto était une offrande conciliante à son ami de toujours Joseph Joachim. Il faisait suite à une amère dispute concernant le divorce du violoniste et de sa femme Amélie, dans laquelle Brahms était soupçonné d’avoir pris le parti d’Amélie. Joachim l’avait accusée, à tort, d’infidélité avec un éditeur. Lorsque Robert Hausmann, membre du quatuor à cordes de Joachim, demanda si…
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Maintenant à sa trentième année d’existence, le New Century Chamber Orchestra, de San Francisco, a une forte tendance à commander de nouvelles œuvres. Une bonne chose, n’est-ce pas ? Cela dépend de l’œuvre. Les quatre morceaux présentés ici ne sont pas tant un méli-mélo qu’un étalage de Walmart assemblé par l’intelligence artificielle. Le troisième concerto pour piano de Philip Glass oscille entre la puérilité des comptines et la musique d’ascenseur. J’ai l’esprit ouvert en ce qui concerne Glass, mais il s’agit de l’œuvre la plus triviale qu’il m’ait été donné d’entendre depuis des années. Son troisième mouvement est dédié…
Le titre de ce récital violon-piano nécessite quelques explications. En 1919, deux des compositeurs cités sont morts et un troisième était épuisé. Seul Leos Janáček fonctionnait à plein régime − en fait, plus qu’il ne l’avait jamais fait auparavant. Si 1919 a été une référence, cela ne ressort pas clairement de leurs cycles de vie. Cependant, cette année marque la fin de l’ère de la guerre et ces sonates existent dans ce passé immédiat, sans penser au présent ou à l’avenir. La sonate de Janáček, achevée en 1915 et révisée pendant six ans, est un chef-d’œuvre composé dans le…
Je ne peux pas, en toute conscience, donner à cet enregistrement une note, ni même une critique détaillée. La soliste est Elisabeth Leonskaïa, une pianiste légendaire dont les introspections sont peut-être le meilleur souvenir vivant de son ami Sviatoslav Ritchter, aujourd’hui décédé. Il y a un élément organique dans le jeu de Leonskaïa, sans évidence d’intervention humaine, qui rend la pianiste à la fois imprévisible et incontestablement fidèle au compositeur. Je ne l’ai jamais vue faire un enregistrement qui ne soit pas une contribution unique à l’histoire de l’interprétation de l’œuvre. Depuis 1978, date à laquelle elle a…
Le contexte est choquant. En parcourant la liste des concerts donnés par les détenus du camp de concentration de Theresienstadt entre 1942 et 1944, j’ai été surpris de trouver une œuvre de chambre de Bruno Walter. La plupart des musiques interprétées étaient des œuvres de grands noms autrichiens et tchèques, dont un bon lot de compositeurs eux-mêmes incarcérés dans le camp − Ullmann, Haas, Krasa, Ilse Weber − et tous destinés à être déportés au camp de la mort d’Auschwitz. Bruno Walter était un cas à part dans cette histoire. Chef d’orchestre formé par Gustav Mahler à Hambourg…
En 1925, à l’âge de 60 ans, le compositeur national du Danemark a sombré dans la dépression. « Si je pouvais revivre ma vie, a dit Carl Nielsen, je suivrais une formation en commerce ou ferais un autre travail utile qui aboutirait à un résultat tangible. Le sort de l’artiste créateur n’est pas heureux. » Nielsen travaillait alors à sa sixième symphonie, la « Symphonie simple », bien qu’elle n’ait rien de simple. Son mariage s’était décomposé et il ne se sentait pas apprécié. Sa cinquième symphonie, en deux mouvements, était empreinte d’une rage impuissante. La sixième est réduite…
Si son concerto pour violon vous a amené à vous attendre à de jolis airs et à des cordes moelleuses, vous risquez d’être déçu par les trois quatuors, écrits à dix ans d’intervalle au cours d’une carrière qui a commencé dans la Vienne de Mahler et s’est achevée dans les Pacific Palisades. Le premier quatuor de 1923, en plein succès de l’opéra de Korngold avec La Ville morte, a une ouverture atonale qui pourrait être destinée au congrès annuel de la Société internationale de musique contemporaine. Après avoir été créée à Vienne par le quatuor d’Arnold Rosé, beau-frère de Mahler,…
Vous parlez de Glenn Gould, le compositeur ? Eh bien, il a toujours eu une personnalité trop forte pour entrer dans les souliers d’un pianiste. À l’adolescence, le génie canadien s’est essayé à diverses petites partitions, mais aucune d’entre elles ne satisfaisait son caractère inquiet. La première composition justifiant un numéro d’opus fut un quatuor à cordes d’une demi-heure, achevé en 1955 alors qu’il avait 23 ans et créé l’année suivante à Montréal. Gould était alors une étoile montante et quatre membres de l’Orchestre de Cleveland s’empressèrent d’enregistrer le quatuor en un seul mouvement pour CBS Records, qui…
Je sais qu’on est à peine en avril, mais j’ai déjà classé cet album dans ma liste des meilleurs de l’année et ne vous attendez pas à ce qu’il soit délogé. Le projet a été conçu à l’envers : au lieu qu’un chanteur approche une maison de disques avec un cycle à enregistrer, c’est dans le cas présent la pianiste française Hélène Grimaud qui a gardé le cycle dans son cœur vingt ans en attendant le bon chanteur. Celui qu’elle a trouvé est un jeune baryton germano-roumain, Konstantin Krimmel.Quand ils sont arrivés ensemble à Berlin l’été dernier, ils ont été…
Compte tenu de l’ascension de Missy Mazzoli depuis une décennie qui en a fait la première femme à recevoir une commande du Metropolitan Opera, il est quelque peu étonnant de constater que ses seuls enregistrements jusqu’à présent sont parus sur une étiquette exclusivement locale, New Amsterdam Records. L’étiquette suédoise Bis est allée là où les grandes maisons craignent de s’aventurer en donnant à sa musique une empreinte baltique. On peut toutefois craindre pour la survie de l’industrie musicale si un talent de cet ordre est ignoré pendant si longtemps par les labels majeurs. Mme Mazzoli, 42 ans, s’est fait…