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L’âge n’est qu’un chiffre, mais il peut avoir une forte influence. Le violoniste canadien James Ehnes, qui a célébré son quarantième anniversaire plus tôt cette année, a profité de cette étape importante pour partir en tournée dans son pays natal avec une série de concerts célébrant la famille, la communauté et, bien entendu, la musique. Quoiqu’il soit plein de boutades au sujet de son âge, Ehnes n’est pas près de ralentir sa carrière, comme en témoigne son horaire chargé.
Natif de Brandon, au Manitoba, Ehnes a commencé le violon à l’âge de 4 ans. Dès 9 ans, il étudie avec le violoniste et pédagogue de renom Francis Chaplin. Entre 1993 et 1997, il étudie à Juilliard, où il remporte le prestigieux Peter Mennin Prize for Outstanding Achievement and Leadership in Music. Parmi ses autres exploits, on compte le grand prix en cordes du Concours de musique du Canada (1987), le premier prix en cordes au Festival de musique du Canada (1988), le premier prix commémoratif Ivan Galamian, le prix Virginia Parker du Conseil des arts du Canada et une bourse de carrière Avery Fisher (2005). Il est également le plus jeune membre à avoir été élu de la Société royale du Canada.
La tournée canadienne James Ehnes@40, qui a pris son envol à Ottawa le 28 avril 2016, est une virée dans chaque province et territoire. En compagnie de son accompagnateur de longue date, Andrew Armstrong, et de son Stradivarius « Marsick » datant de 1715, Ehnes se sera produit dans plus de 25 villes canadiennes d’ici la fin de l’année: une section de la tournée s’est terminée au printemps dernier et la deuxième s’amorce en automne.
Interrogé sur la raison derrière cette tournée, Ehnes répond en riant: « C’est un peu bête, non? Un quarantième anniversaire, c’est artificiel, mais tout le monde en parle. ‘Ah, tu deviens vieux!’ La date approchant, j’ai compris que certains projets spéciaux auraient une grande signification pour moi. Toute cette saison a été consacrée à ces projets. »
Pour Ehnes, les projets de cette année comprenaient une présentation du Concerto pour violon de Beethoven avec l’Orchestre philharmonique de New York le 26 janvier, la soirée précédant son anniversaire. Avec le Quatuor Ehnes – qui comprend la violoniste Amy Schwarz Moretti, l’altiste Richard O’Neill et le violoncelliste Edward Arron –, Ehnes a joué tous les quatuors à cordes de Beethoven en juin et juillet. En août, il a interprété l’intégrale des sonates et partitas pour violon solo de Bach.
Établi en Floride avec sa femme Kate et leurs deux jeunes enfants, Ehnes explique que le retour à ses racines canadiennes, grâce à sa tournée, est sans doute l’aspect le plus spécial du projet. « L’idée de passer le plus de temps possible au Canada a beaucoup résonné avec moi. J’ai épousé une Américaine et fait ma vie aux États-Unis. J’ai été très choyé de pouvoir garder un lien avec le Canada, mais je passais de plus en plus de temps dans les grandes villes – Montréal, Toronto, Vancouver – avant de voler chez moi. C’est bien, mais ce n’est pas vraiment représentatif de tout le pays. »
Puisqu’Ehnes est citoyen canadien, ses enfants le sont aussi. Sa fille de quatre ans et demi est assez âgée pour apprécier le voyage. « Je voulais qu’elle sente une connexion avec le pays, qu’elle puisse voir les lieux où j’ai grandi, voir l’océan Pacifique, les Rocheuses, les Prairies, le Canada français et les Maritimes; tout cela est très important pour moi. »
Un horaire bien rempli
Ehnes avait originalement planifié de visiter la plus grande partie du Canada, mais c’était trop ambitieux pour l’horaire initial. À la suite de problèmes d’organisation dans l’Est canadien et au Québec, une deuxième étape a été ajoutée à la tournée. Ces concerts additionnels en automne permettent à Ehnes d’honorer des engagements antérieurs, notamment en tant que directeur artistique de la société de musique de chambre de Seattle.
En raison de sa carrière de soliste international, Ehnes n’a pas souvent l’occasion de visiter des petites salles de concert.
« En tant que jeune artiste, j’ai acquis mes expériences les plus précieuses lors de tournées. Par exemple, j’ai voyagé dans plusieurs petites villes du Québec avec les Jeunesses Musicales. On apprend beaucoup en communiquant ainsi avec le public: ces gens m’ont offert énormément de soutien et je suis reconnaissant de pouvoir y retourner, dit Ehnes. Partout où je vais, je remarque une appréciation pour la musique. C’est cet intérêt musical présent dans les plus petits centres qui m’a beaucoup aidé au début de ma carrière. »
Déjà à mi-chemin, la tournée semble être un succès personnel et professionnel pour Ehnes. Se remémorant la première étape de la tournée, Ehnes est plein d’enthousiasme. « C’est un si beau moment de l’année. En mai, le Canada est magnifique, fait-il remarquer. Je peux à la fois rétablir le contact avec des gens et partager les endroits que j’aime avec ma famille et Andy. Cela me rend très fier de mon pays. »
Regard vers le passé, regard vers l’avenir
Les attentes d’une audience variée ont posé un défi pour Ehnes lors de la sélection du répertoire pour sa tournée. Armstrong et lui ont créé un récital de chambre visant à plaire à tous, en mélangeant des classiques et des morceaux moins connus mais accessibles.
« Je voulais assembler un programme qui fonctionnerait tant dans les villes cosmopolites que dans les lieux où il n’y a pas plus de 30 récitals de violon par année ou les endroits où l’on n’a pas organisé de concert de violon en 5 ans, dit Ehnes. Si je joue à Iqaluit, j’évite de programmer des œuvres trop spécialisées, afin de donner une bonne idée de ce qu’est un récital de violon. »
À cette fin, le répertoire planifié comprend la Sonate no 5 en fa majeur « Le Printemps », de Beethoven, la Sonate en ré majeur de Haendel et des pièces de concert comme Tzigane de Ravel et le Praeludium et l’Allegro de Kreisler. Ehnes considère que toutes ces pièces sont représentatives du répertoire pour violon. Peu de pièces sont aussi accessibles et instantanément aimables que « la sonate ‘Printemps’ de Beethoven, mais c’est aussi l’une des pièces les plus raffinées du répertoire », explique Ehnes.
Les œuvres moins connues du programme correspondent au même profil. Stream of Limelight, une pièce commandée à Bramwell Tovey, est toujours un succès à chaque prestation d’Ehnes et Armstrong. Ehnes décrit l’œuvre comme « l’un des plus beaux cadeaux qu’il ait jamais reçus. »
Sorte de métacommentaire sur la profession musicale, la pièce est un mélange de plusieurs influences, y compris le jazz. Comme l’explique Ehnes, le nom de l’œuvre évoque le fait « qu’en tant qu’interprètes, nous devons entrer dans la peau d’un acteur pour créer toutes sortes d’atmosphères et de personnages. Il y a des parties très lyriques et d’autres très virtuoses, et l’interaction avec le piano est fantastique. L’arc narratif est excellent. »
Pour Ehnes, la pièce est surtout importante pour son lien avec Tovey. « J’ai connu Bramwell très tôt dans ma vie, je crois l’avoir rencontré à 13 ou 14 ans, dit-il. J’ai partagé tant d’expériences musicales avec lui, et il m’a ouvert plusieurs portes. La pièce a fini par être un succès total – c’est vraiment l’une des meilleures choses que nous faisons dans cette tournée. »
Des visages familiers
Ehnes, Armstrong et compagnie repartiront en tournée le 14 septembre, lançant cette nouvelle étape à Edmonton et atteignant Montréal vers la mi-octobre. Profitant de l’occasion, Ehnes jouera le Concerto pour violon de Dvořák avec l’Orchestre symphonique de Montréal les 13 et 14 octobre sous la direction de Juraj Valčuha.
En tant qu’artiste en résidence à l’OSM, Ehnes a des liens profonds avec Montréal. Il a fait ses débuts professionnels avec l’orchestre il y a plus de 27 ans et a tenu le rôle d’ambassadeur lors de la Virée classique de l’an dernier.
« Montréal sera toujours une ville spéciale pour moi. Non seulement parce que c’est la résidence du premier orchestre majeur avec lequel j’ai joué, mais parce qu’ils ont été très bons à mon égard et très fidèles pendant de nombreuses années, admet Ehnes. J’ai probablement joué avec l’OSM plus souvent qu’avec tout autre orchestre. »
Les éloges d’Ehnes pour la scène montréalaise ne se limitent pas à l’OSM. « C’est toujours merveilleux de jouer pour le public montréalais. Parfois, je regarde la foule et je remarque le visage souriant de quelqu’un que je connais depuis 25 ans. »
Tourné vers le passé, tourné vers l’avenir
Cette année, Ehnes a amplement eu l’occasion de réfléchir sur son identité canadienne et sur les possibilités qu’elle lui offre. «Je suis fier des valeurs du Canada. Bien entendu, chaque pays a ses problèmes, chaque pays a ses divisions et désaccords, mais je crois réellement qu’il y a des aspects fondamentaux du Canada qui sont vraiment admirables. Je crois aussi que des aspects fondamentaux de la scène musicale canadienne sont remarquables.» Ehnes est tout particulièrement reconnaissant pour les bourses qui lui ont été accordées par le Conseil des arts du Canada, et pour le violon qui lui a été prêté par la Banque d’instruments de musique du Conseil des arts.
Véritable hommage musical au pays où il a fait ses débuts, James Ehnes@40 se termine le 5 novembre à St-John’s, Terre-Neuve, au Tuckamore Chamber Music Festival.
Interrogé sur ce que l’avenir lui réserve, Ehnes avoue que les prochaines années auront un rythme différent. «Je serai plus prudent avec mon temps, aussi efficace que possible, et je passerai certainement moins de temps loin de la maison. Dès le début de la saison 2017–18, les choses vont être différentes, révèle Ehnes. J’ai hâte d’arriver à cette étape.»
Traduction par: Michèle Duguay
» James Ehnes à 40: Canada Tour: www.jamesehnes.com
» James Ehnes joue le Concerto pour violon de Dvorák avec l’OSM le 13 octobre à 20 h et le 14 octobre à 19 h, à la Maison symphonique. (www.osm.ca)
» Ehnes et Armstrong jouent Beethoven, Franck et Ravel le 16 octobre à 14 h 30, à la Maison symphonique. (www.osm.ca)
» Ehnes et Armstrong jouent Haendel, Beethoven et Tovey le 18 octobre à 20 h, à le Palais Montcalm, salle Raoul-Jobin, Québev. www.clubmusicaldequebec.com.
» Ehnes revient à Montréal le 30 avril 2017 pour clore la série de concerts du LMMC. www.lmmc.ca
» Lisez l’entrevue complète avec James Ehnes ici.
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