Critique de disque | Philippe Jaroussky, Gelosia! Artaserse, Erato

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Philippe Jaroussky — Gelosia!

Philippe Jaroussky, contre-ténor ; Artaserse

Erato, 2025

Le dernier enregistrement de cantates italiennes par le contre-ténor Philippe Jaroussky et son propre ensemble baroque, Artaserse, s’articule autour de deux adaptations de Perdono amata Nice de Metastasio, parfois appelées La Gelosia. Elles sont très différentes. La version de Nicola Porpora, datant de 1746, est inhabituelle en ce qu’elle comprend une courte ouverture. Ses récitatifs accompagnés et les deux arias da capo – « Bei labbri » et « Giuru in nocchier che, al mare » – sont assez élaborés et comportent de nombreuses ornements supplémentaires dans leurs reprises de la section A. La version de Baldasarre Galuppi a été écrite 36 ans plus tard et est de facture plus classique. Elle conserve la forme da capo et est plus sobre en termes d’ornements vocaux, mais plus intéressante sur le plan rythmique. Les deux enregistrements sont des premières mondiales.

L’enregistrement comprend trois autres œuvres. Ombre tacito e sole de Scarlatti raconte l’histoire d’un amant méprisé errant dans l’obscurité sur une côte rocheuse. Ses deux arias sont assez majestueuses et empreintes d’une grande noirceur, en accord avec le texte qui comprend la phrase « à mort par l’amour trahi ». Cessate, omai cessate de Vivaldi est nettement plus dramatique, avec une écriture intéressante pour les cordes et beaucoup plus d’ornementations vocales. La dernière pièce est une adaptation très précoce de Mi palpita il cor écrite par Haendel avant son séjour en Italie. Elle est inhabituelle en ce qu’elle comporte trois arias, bien que la première, « Agitata è l’alma mia », soit très courte, mais néanmoins riche en coloratures impressionnantes. Les deux autres arias contrastent par leur tempo : la première est lente et lyrique, tandis que la seconde est élaborée et assez rapide, mais toutes deux font un usage intensif et intéressant de la flûte. Au total, les cinq cantates offrent environ 70 minutes de musique.

Cette musique correspond tout à fait au registre de Jaroussky. Je le trouve parfois un peu léger et féminin dans l’opéra (hérésie pour beaucoup, je sais !), mais sa voix légère, souple et magnifique convient parfaitement à ce répertoire. Il maîtrise également le style baroque, avec une technique qui lui permet d’orner autant qu’il le souhaite et une musicalité suffisante pour ne pas en faire trop. Il peut également assombrir son timbre lorsque cela est nécessaire. On en trouve un bon exemple dans l’air « Nell’orrido albergo » de l’œuvre de Vivaldi. Artaserse est une création de Jaroussky et ils fonctionnent à merveille ensemble. L’ensemble est assez réduit : deux violons, un alto, un violoncelle, une flûte, un théorbe/guitare baroque et un clavecin. Tous les musiciens sont accomplis et idiomatiques, mais je tiens à souligner l’excellente interprétation du flûtiste Serge Saïtta dans l’œuvre de Haendel.
L’enregistrement a été réalisé en 2024 à la bibliothèque de l’abbaye de Royaumont, à Asnières-sur-Oise, en France, et il est clair et bien équilibré. Je l’ai écouté en format numérique sans perte 44,1 kHz/16 bits, mais il est probable que la version 192 kHz/24 bits offre plus de présence et de détails. Il est également disponible en CD physique, en MP3 et en streaming Dolby ATMOS. Le livret contient les textes complets et leurs traductions, ainsi que de nombreuses informations contextuelles.

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A propos de l'auteur

After a career that ranged from manufacturing flavours for potato chips to developing strategies to allow IT to support best practice in cancer care, John Gilks is spending his retirement writing about classical music, opera and theatre. Based in Toronto, he has a taste for the new, the unusual and the obscure whether that means opera drawn from 1950s horror films or mainly forgotten French masterpieces from the long 19th century. Once a rugby player and referee, he now expends his physical energy on playing with a cat appropriately named for Richard Strauss’ Elektra.

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