Les concerts Série prestige au Gesù de la 30e édition du Festival Nuits d’Afrique (12–24 juillet 2016) ont célébré la nickelharpa, instrument médiéval suédois à cordes frottées et la kora, instrument ouest-africain, l’un des ancêtres de la harpe. Deux concerts ont été consacrés à ces deux instruments antiques lors des deux soirées du 23 et du 24 juillet. Deux voyages fascinants dans l’univers envoûtant des musiques du monde.
Le premier concert a été donné par l’Espagnole Ana Alcaide (voix, nickelharpa) accompagnée par l’Allemand Rainer Seiferth (guitare) et l’Américain Bill Cooley (oud, psalterium, percussion). Avec ses envolées lyriques naturelles, Ana Alcaide a enchaîné les balades à travers le répertoire des cantiques médiévaux, ses légendes, ses mythes et ses histoires d’amour captivantes. Ses compositions rendent hommage notamment à sa ville d’adoption Tolède, qui a vu grandir en elle la passion pour la musique et plus particulièrement pour la nickelharpa dont elle a fait la découverte lors d’un séjour d’études en Suède.
L’identité multiculturelle de Tolède inspire grandement le répertoire d’Ana Alcaide. Elle réserve une place de choix au patrimoine séfarade qui a marqué l’histoire de cette cité aux trois cultures – chrétienne, juive et musulmane. L’exemple le plus éloquent est son album Como la Luna y el Sol dont elle a chanté quelques pièces lors de cette première rencontre avec le public montréalais, qui a été conquis par la grâce de l’artiste. Ana Alcaide adore s’aventurer dans les espaces extrêmement diversifiés des musiques traditionnelles (nordiques, celtiques, bulgares, perses, etc.), comme elle l’a souligné dans ses échanges très spontanés avec la salle, affirmant sa soif permanente de découvertes musicales.
La nuit de la kora
La kora a été la vedette incontestée de la dernière soirée des Nuits d’Afrique. Les organisateurs ont vu juste. Quoi de plus éloquent pour clore en apothéose ce grand rendez-vous de la musique du monde ! Deux illustres joueurs de cet instrument à 21 cordes ont été invités à faire voyager le public à travers les sonorités cristallines de cet exemple par excellence du patrimoine artistique et culturel africain. Morikeba Kouyaté, virtuose sénégalais basé à La Nouvelle-Orléans, est célèbre pour sa parfaite maîtrise de la kora et pour sa grande habileté dans l’art du conte oral. Zal Sissokho est un artiste montréalais dont l’un des ancêtres sénégalais fut le premier joueur de la kora de l’histoire.
Ce concert était un bel hommage aux expressions ancestrales de la culture africaine grâce au mariage équilibré que les deux artistes ont pu réussir entre les deux dimensions : la musique de la kora et la communication de l’héritage de leur tradition orale.
Par leur grande sensibilité musicale, la douce mélancolie envoûtante propre au chant africain, les contes et bonnes paroles qu’ils ont pris soin d’insérer entre les morceaux musicaux, les deux artistes ont su, chacun à sa manière, créer l’ambiance favorable pour faire passer merveilleusement le message d’amour et de rapprochement que véhiculent les fêtes de la musique du monde à travers la planète. On en a vraiment besoin par les temps qui courent.