Juan Andrés Arango : X500

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Le réalisateur montréalais explore l’identité culturelle, la métamorphose et la migration

Après avoir été présenté dans pas moins de 16 grands festivals dans le monde, le film X500 (X Quinientos) sortira en salle cet hiver à Montréal. Primé au Festival de films de Los Cabos dans la catégorie Meilleur long métrage mexicain et présenté en sélection officielle au TIFF, le film explore le processus de construction identitaire pendant l’adolescence et la dure réalité auxquels font face trois migrants dans trois pays différents : le Canada, le Mexique et la Colombie.

Né à Bogotá, en Colombie, le réalisateur Juan Andrés Arango se découvre une passion pour la cinématographie à Vancouver. Après avoir obtenu une bourse d’études à une école secondaire internationale, l’adolescent photographie la Colombie-Britannique pendant deux ans. D’abord attiré par la philosophie, il décide finalement d’étudier le cinéma et passe une année à Concordia. Installé à Montréal depuis douze ans, il est marié à une Québécoise et père de deux enfants. Son premier long métrage Playa D.C. a été présenté en 2012 dans la section Un certain regard du Festival de Cannes, en plus de représenter officiellement la Colombie dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère à la 86e édition des Oscar. Nous avons rencontré M. Arango pour en apprendre davantage sur ce qui l’a incité à entreprendre ce projet panaméricain.

Qu’est-ce qui vous attire dans les films et plus particulièrement X500 ?

Juan Andrés Arango

Juan Andrés Arango

Deux choses : observer la réalité et tenter d’en partager ma perception. C’était mon objectif en photographie, ça l’est dorénavant en cinéma. Mes films ne sont pas des histoires abstraites qui germent dans ma tête. Contrairement à bon nombre de réalisateurs, je ne m’enferme pas dans un studio pendant six mois pour ensuite donner naissance à un film. Je dois descendre dans la rue pour y observer les lieux qui mettront en scène mon histoire, où j’y capterai mes images. J’étudie, je parle aux gens qui y vivent, pendant plusieurs mois, voire des années, et c’est à l’issue de ce travail d’observation que mon film voit le jour. Même s’ils relèvent de la fiction, mes films sont très proches du documentaire : le lien étroit qu’ils entretiennent avec les milieux d’où ils sont issus leur donne ce cachet d’authenticité, cet éclairage cru.

Dans X500, je tente d’explorer des réalités particulières dans ces trois villes. Montréal ici n’est pas une destination touristique ou le Plateau, mais le lieu de vie d’une communauté philippine et sa façon de profiter de la ville et de la ressentir. De la même façon, je dépeins Mexico par rapport à ce qu’en vit un adolescent du peuple indigène mazahua et Buenaventura par un Afro-Colombien de retour des États-Unis. Je m’efforce de mettre mon public dans la peau de mes personnages afin qu’il redécouvre ces espaces par le biais de leurs expériences. Je voulais raconter une histoire panaméricaine et ces trois lieux m’ont interpellé, car j’y ai vécu comme immigrant à des moments différents de ma vie. Je tenais à révéler à travers eux la façon dont une expérience humaine commune peut se transformer selon un espace et un contexte donnés. J’ai passé deux ans à observer et à réaliser des entrevues de sorte que petit à petit, j’ai recueilli les fragments qu’il me fallait pour construire une histoire et en écrire le scénario.

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Et les trois protagonistes sont des adolescents…

Selon moi, deux éléments conduisent à la métamorphose radicale de l’être humain : la migration et l’adolescence. Ce sont des moments et des expériences au cours desquels un être humain cherche à forger son identité, à se tailler une place dans la vie et à se créer un espace pour continuer à s’épanouir. Par conséquent, lorsqu’on les combine, il en résulte une métamorphose profonde.

En qualité de cinéaste montréalais, que ressentez-vous à l’idée de raconter ces autres histoires ?

C’est tout naturel pour moi. Je ne crois pas à la pureté d’une identité ou à des cultures isolées. Selon moi, les cultures sont en mutation constante. J’estime que ce qui manque dans les médias québécois – comme la télévision et les nouvelles, et même l’industrie cinématographique –, c’est la réalité du Québec actuel, façonné en profondeur par de multiples cultures et vagues d’immigration. Il est donc tout à fait normal d’aborder ces sujets en marge des médias traditionnels qui imposent l’image du Québécois ou du Montréalais type. Je me sens profondément Montréalais. Cette ville incarne en grande partie ce que je suis. Plus qu’une communauté francophone et blanche : elle me représente en raison de sa complexité culturelle formidablement dynamique.

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À votre avis, comment les Québécois accueilleront-ils votre film ?

Les Québécois possèdent une culture très forte, que j’aime beaucoup et qui m’a convaincu de vivre parmi eux. Cette culture n’est pas fragile; elle ne se brisera pas au contact d’autres cultures ou en s’ouvrant à celles-ci. Je pense que mon cinéma décrit en partie cette réalité – la nature dynamique, évolutive d’une culture – et le fait que la culture québécoise existe en harmonie avec d’autres ne veut pas dire qu’elle disparaîtra ou qu’elle est menacée. Cette coexistence, au contraire, est un signe de sa grande vitalité, en évolution perpétuelle. J’invite les Québécois et particulièrement les Montréalais à découvrir un film qui présente un autre visage de leur métropole, du point de vue de mes personnages, à voir des lieux en Amérique latine qu’ils n’avaient probablement jamais imaginés et qu’ils pourront mieux comprendre grâce au film.

Traduction : Véronique Frenette

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A propos de l'auteur

Camilo Lanfranco is Assistant Manager at La Scena Musicale. Cradled to sleep by live music events, Camilo grew up surrounded by different rhythms, sounds and musical philosophies. These expressions soon led him to focus on Cultural Interactions in the Arts, specifically Cinema and New Media. He holds an Hon. Bachelors in Sociology and Economics from the University of Toronto and he is a current MA Film Studies student at l’Université de Montréal. He is also the founder of MUSI Magazine (2008-2011) and producer of several documentaries.

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