This page is also available in / Cette page est également disponible en: English (Anglais)
Samy Moussa, un jeune compositeur montréalais, verra son œuvre créée à l’occasion du 375e anniversaire de la Ville de Montréal par l’Orchestre symphonique de Montréal. Âgé de 32 ans, Moussa vient de remporter le prix Hindemith 2017, décerné à un compositeur contemporain et accompagné d’une bourse de 20 000 euros. Le compositeur n’en est pas à sa première collaboration avec l’OSM, puisque la pièce sobrement intitulée Symphonie est sa cinquième commande de l’orchestre. Il s’agit néanmoins de son œuvre la plus longue et la plus ambitieuse. Dans un bref entretien, Moussa nous a parlé des circonstances de la création de l’œuvre et de son processus de création.
Symphonie
Avant même l’idée d’une œuvre célébrant Montréal, Kent Nagano avait déjà en tête de commander une œuvre symphonique d’une plus grande envergure qu’auparavant à Moussa. C’est en 2015 que la commande s’est précisée et que l’idée de faire coïncider sa création avec l’anniversaire de Montréal s’est concrétisée. « Il y avait en même temps la volonté d’une œuvre plus longue, mais également un anniversaire à célébrer », résume Moussa. Plus tard, la compagnie d’art multimédia Moment Factory s’est greffée au projet et s’occupera d’ajouter des éléments visuels au concert. Bien que Samy Moussa ait travaillé conjointement avec le studio, il affirme que la musique aura la primauté : « J’insiste sur le fait que la musique précédera la musique, que les images seront fonction de la musique. Cela n’empêche pas que nous ayons eu des discussions. Moi, je ne suis pas un compositeur de musique de film. » Il désire simplement que son œuvre puisse être recréée sans dépendre d’une autre variable et que la musique garde son autonomie.
« Il est toujours compliqué pour moi de parler d’inspiration », confie Moussa. Il avoue avoir été obsédé par le contexte de la commande, par Montréal, et que finalement, cela aura nui à son processus créatif puisqu’il n’était pas habitué àtravailler dans un tel contexte. « Je ne fais pas d’ordinaire d’œuvres de circonstances. J’en ai déjà fait, c’était pour l’orgue, mais il s’agissait d’un projet purement musical. » En effet, faire des références et des analogies n’est pas vraiment dans ses cordes, puisqu’il considère que ce n’est pas là le rôle de la musique de concert, pour reprendre ses mots. « Je ne fais pas ça, je ne crois pas à ça. » Pour Moussa, l’inspiration est inconsciente et abstraite et ne peut être traduite par des mots. « Sinon, on ne ferait pas de la musique. J’écrirais un livre qui décrit Montréal si je pouvais mettre mon inspiration en mots. » Le jeune compositeur reconnaît toutefois que l’inspiration que lui a apportée la ville est subjective. Selon lui, les auditeurs entendront non pas Montréal, mais bien la ville selon sa perspective, son vécu et la période pendant laquelle il a composé sa pièce Symphonie. Ainsi, loin de lui l’idée d’évoquer la célébration de la ville avec des tambours et des trompettes. Il affirme en effet que la volonté dans cet événement est de célébrer avec un sens plus profond, et c’est pour cela, selon lui, que l’on se tourne vers les artistes, en l’occurrence lui ou Moment Factory. Cependant, la ville de Montréal a tout de même inspiré le compositeur d’une manière très abstraite. Nécessairement, il ne semble pas s’agir d’une œuvre pragmatique et descriptive : « Elle ne décrit pas les choses d’une manière romantique, ce n’est pas une musique de film. » C’est plutôt la notion de territoire qui inspire Moussa, un objet qu’il décrit de façon très concrète, comme le territoire géographique de la ville, mais dont il s’inspire de façon purement idéelle.
Volonté d’universalité
« Bien sûr, mon inspiration dépasse la notion de territoire. » Samy Moussa souhaite en effet que la musique soit indépendante et autonome, qu’un auditeur n’ait pas besoin de connaître Montréal pour comprendre et apprécier son œuvre. C’est pour cette même raison qu’il souhaite que sa Symphonie puisse vivre et être recréée sans le visuel. Ce qui ne veut pas dire, selon lui, que Montréal est exclue du processus créatif.
Il souhaite, dit-il, se rapprocher d’une certaine universalité. Cette déclaration ne surprend guère, faisant écho à une autre entrevue accordée par Moussa où il affirmait vouloir composer des œuvres accessibles autant à des amateurs des quatuors de Haydn qu’à des passionnés des symphonies de Beethoven. Cela semble s’opposer à sa vision très subjective de l’interprétation de la musique, paradoxe apparent qu’il résout en rappelant que « l’universel n’est possible que lorsqu’il peut être adapté à plusieurs réalités. » Créer une musique universelle n’est pas un objectif nouveau pour les compositeurs occidentaux : les plus grands s’y sont risqués et seule la postérité peut rendre un jugement. Il s’agit sans aucun doute d’un défi de taille auquel on ne s’attaque qu’avec beaucoup de modestie et d’humilité.
Symphonie Montréalaise, Concert de clôture de la saison 2016-2017. Événement spécial pour le 375e anniversaire de Montréal, Orchestre symphonique de Montréal, Kent Nagano, chef d’orchestre. Moment Factory, studio multimédia, 31 mai au 2 juin 2017, www.osm.ca
This page is also available in / Cette page est également disponible en: English (Anglais)