Le Gala Azrieli 2018 – une soirée sous le signe de la nouveauté

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Une musique chaude, nouvelle et colorée emplissait la salle de la Maison symphonique le 15 octobre dernier. La Fondation Azrieli y donnait en effet un concert gala mettant à l’honneur les oeuvres des lauréats Azrieli 2018, Avner Dorman et Kelly-Marie Murphy, qui entremêlent la tradition musicale juive et la musique orchestrale contemporaine. L’Orchestre de chambre de McGill, les divers solistes et le chef invité Yoav Talmi, au reste, se sont acquittés de les rendre avec beaucoup de justesse.

Le programme était ainsi constitué : d’abord, deux chansons de musique liturgique, Hashkiveinu (une bénédiction rituelle) de Max Helfman et Shalom Rav (titre d’une prière qui signifie « paix abondante ») de Ben Steinberg ; ensuite, les compositions orchestrales respectives d’Avner Dorman et de Kelly-Marie Murphy, Nigunim, une pièce pour violon et orchestre, et En el escuro es todo uno (« Dans l’obscurité tout ne fait qu’un »), une sorte de double concerto pour harpe et violoncelle ; enfin, la symphonie n° 4 de Mendelssohn, dite « italienne ». Pour ma part, j’aime beaucoup ce type de programme, diversifié non seulement quant aux genres (des chansons, puis des compositions instrumentales), mais aussi quant à la notoriété des œuvres (deux compositions nouvelles, dont une création, celle de Murphy, juxtaposées à une œuvre bien connue, la symphonie de Mendelssohn), et qui néanmoins s’unifie sous l’égide d’un thème fort, central (en l’espèce, la musique juive).

Photo: Danylo Bobyk

Les Nigunim sont des chants liturgiques juifs le plus souvent improvisés. Ils ont d’abord inspiré à Avner Dorman une sonate pour violon et piano, créée à New York en 2011. Mais en 2014, le compositeur a transmuté la partie pour piano en musique orchestrale, et en 2017, il en a fait une révision qui lui a valu le prix Azrieli 2018. L’œuvre pour violon et orchestre est une sorte de voyage spirituel, gorgé d’ambiances cabalistiques. Le foisonnement et la maîtrise des couleurs aux bois, aux percussions, est tout à fait saisissante. Pour la partie de violon, Lara St. John s’est montrée d’une étonnante ténacité. Les difficultés techniques de la partition sont légion, des doubles cordes dissonantes, farcies de quarts de ton, aux pizzicati fugaces et concentrés. Sans surprise, le public l’a ovationnée.

En el escuro es un todo uno récupère de nombreux éléments musicaux ladino, en particulier des mélodies de l’ancienne culture juive de la péninsule ibérique. Les mélodies choisies proviennent de chansons qui portent sur les femmes et la maternité. Murphy en a fait une sorte de florilège, plein de verve et d’inventivité. La partie pour harpe, par exemple, s’apparente par moments à de la musique pour oud, un mélange fort rafraîchissant. Un regret cependant : au regard d’un double concerto, la présence du violoncelle m’a paru un peu discrète.

La soirée a été marquée par l’annonce d’une nouvelle de la Fondation Azrieli. Un nouveau prix est créé, le Prix Azrieli canadien, d’une valeur de 50 000 dollars. Ce dernier récompense la compositrice ou le compositeur d’une œuvre célébrant la musique canadienne. La Fondation lancera un appel de propositions en février 2019. Que les compositrices et les compositeurs du Canada se le tiennent pour dit !

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