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Chandos5
La mode actuelle est au remixage des 16 quatuors de Beethoven, en choisissant un quatuor de chaque période – début, milieu et fin – dans des cycles de concerts et d’enregistrements. Cela ne fonctionne pas toujours, mais le dernier disque du Doric String Quartet, un ensemble britannique en milieu de carrière, établit un équilibre parfait entre deux des quatuors de l’opus 18 et des jalons majeurs des périodes ultérieures.
L’opus 18/2 en sol majeur est l’une des invitations de Beethoven à la danse, une proposition plus dans l’esprit que sur la piste. L’opus 18/5 en majeur investit entièrement l’esprit et est une de ses œuvres les plus autocontemplatives, si précoce qu’on est encore au 18e siècle. Les Doric font de ces contrastes une vertu, ouvrant chaque œuvre avec une expression interrogative – est-ce là ce qu’il voulait vraiment dire ? Le menuet de l’opus 18/5 est comme une danse sur un aphorisme de Wittgenstein, une énigme philosophique sur trame de fond musicale.
Chacune de ces œuvres de jeunesse trouve son pendant ultérieur. Le sol majeur est associé au massif si bémol majeur opus 130, une œuvre dans laquelle Beethoven s’affranchit des contraintes commerciales. Deux mouvements centraux proposent une danse allemande et une cavatine, cette dernière si fantomatique qu’elle en est effrayante. Beethoven a terminé le quatuor par la Grosse Fuge, d’une durée de 15 minutes. Les éditeurs l’ayant jugée trop longue, il l’a remplacée par une autre de dix minutes. Les deux sont jouées ici, un choix instructif pour l’auditeur.
Le dernier morceau est l’opus 59/2 en mi mineur, daté de 1806. Alors que l’armée française occupait Vienne, Beethoven avait demandé la protection de l’ambassadeur russe, le comte Razoumovski, qui employait quatre instrumentistes à cordes pour divertir ses invités. Le troisième mouvement contient un air russe. Le reste est du Beethoven pur et dur. Le jeu n’a rien de tape-à-l’œil non plus. Il s’agit d’une musique qui oblige à repenser ce qu’on croyait savoir auparavant. Ainsi, le plaisir dure plus longtemps.
Traduction par A. Venne
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