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Delphian5
Ethel Smyth était une lesbienne masculine de la classe moyenne, issue d’une famille de militaires anglais, qui est allée en prison pour la cause des suffragettes et que l’on a vue diriger ses codétenues à la prison de Holloway à l’aide d’une brosse à dents. Telle est, en résumé, l’impression donnée par Thomas Beecham et d’autres admirateurs avisés. Virginia Woolf a dit un jour qu’être aimée par Ethel était « comme tomber entre les pinces d’un crabe géant ». L’indélicatesse physique de la compositrice a occulté tout ce qu’il y avait de valable dans sa musique, qui s’est évanouie avec sa mort en 1944.
La récente reprise de son opéra The Wreckers par Glyndebourne a été réparatrice et plusieurs maisons d’opéra allemandes l’ont repris. Que reste-t-il à découvrir ?
Essayez la Sonate pour piano no 2 en do dièse mineur. Composée en 1877 dans un élan de passion pour une chanteuse d’opérette, la sonate se situe à mi-chemin entre Schumann et Brahms, avec une présence suffisamment forte pour véhiculer une individualité marquée. Smyth avait 19 ans à l’époque et étudiait à Leipzig. C’est une sacrée sonate pleine de promesses.
Les Variations in D-Flat Major on An Original Theme (of an Exceeding Dismal Nature), écrite un an plus tard, nous montre que Smyth ne se prenait pas au sérieux plus qu’il le fallait. Il s’agit d’une suite de 20 minutes d’une facilité arrogante qui remet fermement à leur place des compositeurs comme Grieg et Tchaïkovski (qu’elle connaissait). Ce n’est pas du tout minable, mais plutôt sarcastique et moqueur à l’égard des collets montés autour de la table.
La conviction est ici portée par la pianiste Hanni Liang, professeure d’académie à Munich. À travers les œuvres de Smyth, Liang interprète quatre modernités, dont Night Dances de Sally Beamish, brillamment évocatrice. Les autres morceaux, plus excentriques, sont signés Erollyn Wallen, Chen Yi et Eleanor Alberga. Pas une seule phrase ennuyeuse.
Delphian, soit dit en passant, est une étiquette indépendante d’Édimbourg qui a un don pour l’inattendu. On n’entendrait jamais un tel récital sur Warner, Sony ou autres vieux compagnons classiques. Cinq étoiles pour l’initiative. La critique faite, je le réécoute maintenant par pur plaisir.
Traduction par A. Venne
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