L’Hebdo Lebrecht | The Kreutzer Project (Avie)

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La Sonate à Kreutzer de Beethoven était plus longue et plus complexe que tous les concertos de son époque. Elle a inspiré une nouvelle de Léon Tolstoï et un quatuor à cordes de Leoš Janáček, tous deux piliers de la culture occidentale et fenêtres sur la psychologie humaine. L’idée de remplacer le pianiste de la sonate pour violon-piano par un orchestre de chambre et de jouer cette œuvre de 40 minutes comme un véritable concerto n’est donc ni irrévérencieuse, ni hors de propos, ni techniquement impossible. En théorie, cela devrait fonctionner.

Le travail de Colin Jacobsen avec The Knights, un orchestre de solistes de New York, me semble honorable dans son intention et nullement dénuée de sens musical. Moins convaincantes sont l’orchestration de la sonate de Janáček et la nouvelle œuvre synthétique de la compositrice anglaise Anna Clyne, établie à New York. L’œuvre de Clyne, Shorthand, tire son titre de l’épigramme célèbre de Tolstoï, pourtant dénuée de sens : « La musique est l’abréviation de l’émotion. » La contribution de Clyne, lourde dans les cordes graves et riche en gestes elgariens et en un air klezmeroïde de Fiddler on the Roof, est le seul morceau du groupe que j’ai vraiment aimé.

L’interprétation de La Sonate à Kreutzer par The Knights est écrasée par une instrumentation excessive et manque de la finesse nécessaire pour recouvrir une œuvre de chambre classique d’un lourd manteau. Un ensemble viennois pourrait s’en servir avec plus d’éclat. Les Chevaliers ont un son plus nerveux dans Janáček, mais guère plus convaincant. Le dessein du quatuor de Janáček est de transmettre l’intimité d’une histoire d’amour illicite et non consommée. Un rendez-vous galant ne sera jamais aidé par l’irruption de 20 musiciens.

La composition de Colin Jacobsen intitulée Kreutzings est la moins attrayante. Elle synthétise les différentes parties de l’album en fusionnant le style baroque et les grattages à la Kurtag. L’idée derrière ce programme était sérieuse, crédible et intelligente. Comment a-t-elle pu aussi mal tourner ?

NL

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A propos de l'auteur

Norman Lebrecht is a prolific writer on music and cultural affairs. His blog, Slipped Disc, is one of the most popular sites for cultural news. He presents The Lebrecht Interview on BBC Radio 3 and is a contributor to several publications, including the Wall Street Journal and The Standpoint. Visit every Friday for his weekly CD review // Norman Lebrecht est un rédacteur prolifique couvrant les événements musicaux et Slipped Disc, est un des plus populaires sites de nouvelles culturelles. Il anime The Lebrecht Interview sur la BBC Radio 3 et collabore à plusieurs publications, dont The Wall Street Journal et The Standpoint. Vous pouvez lire ses critiques de disques chaque vendredi.

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