À moins d’atterrir directement de la planète Mars, vous avez forcément entendu parler des festivités du 375e anniversaire de Montréal. Mais avez-vous pris le temps d’éplucher les événements exclusifs de cette fastueuse et très éclectique programmation ? Il n’est pas trop tard pour bien faire; la programmation qui se déploie depuis le 11 décembre réserve en effet plusieurs moments forts. Voici donc quelques idées qui devraient vous donner envie de mettre l’histoire et le patrimoine de notre belle ville à votre agenda.
Vous l’avez certainement remarqué, une nouvelle mise en lumière magnifie maintenant la structure de la Biosphère de l’île Sainte-Hélène, soulignant aussi le 150e du Canada et le 50e d’Expo 67. La spectaculaire mise en lumière interactive du pont Jacques-Cartier sera, pour sa part, inaugurée en grande pompe le 17 mai prochain, à l’occasion de la journée anniversaire de la fondation de Montréal. On attend beaucoup de ce concept de Moment Factory : six studios multimédias et spécialisés dans la conception de mise en lumière, tous de Montréal, ont collaboré à ce projet de grande envergure qui devrait renouveler et faire rayonner l’image de la métropole, ici comme à l’étranger. Le pont est d’ailleurs le thème central des célébrations – Montréal en compte tout de même 27, après tout.
Grand théâtre de rue et initiatives citoyennes
Les magnifiques Géants de la compagnie nantaise Royal de Luxe, l’une des plus emblématiques compagnies françaises de théâtre de rue, débarqueront à Montréal avec une création spécialement conçue pour le 375e anniversaire de la métropole (les 19, 20 et 21 mai). Le point commun des productions de ces inventeurs géniaux : la surprise du public qui n’en revient pas de voir ces colosses pacifiques surgir de lieux jalousement tenus secrets, les gigantesques marionnettes scrutant la ville à leur aise, pour y déposer leur poésie magique et monumentale (www.royal-de-luxe.com/fr). Dans un tout autre esprit et dans le but de sensibiliser les gens à ce qui les entoure et à la place qu’ils occupent dans leur environnement, c’est bien plus bas que le joyeux projet l’Amuse-Bouches a décidé d’opérer, choisissant d’inviter les volontaires à exercer leur créativité sur les bouches d’égout du quartier Rosemont—La-Petite-Patrie. Au menu : de courtes prestations de 375 secondes, issues d’ateliers de médiation culturelle entre cinq compagnies artistiques de Scène Ouverte et autant d’organismes communautaires et scolaires du quartier, prestations qui seront présentées sur un circuit de bouches sélectionnées qui deviendront ensuite autant de haltes artistiques insolites, amusantes et rassembleuses. De mai à septembre (scene-ouverte.com/les-amuse-bouches).
Quartier par quartier
Vous l’aurez compris, des projets aussi intéressants que variés s’attachent à décliner, quartier par quartier, l’histoire de Montréal. Le parcours théâtral à grand déploiement Sur les rails s’annonce irrésistible : la chic compagnie Toxique Trottoir a créé un parcours théâtral à grand déploiement, avec 100 enfants et adolescents d’écoles de Rosemont ainsi que des citoyens du quartier. Le spectacle Sur les rails, qui sera créé dans les anciens ateliers Angus, invitera au souvenir mais aussi, à travers les yeux des enfants, à la découverte du Rosemont d’aujourd’hui. Et attention, il n’y aura que deux représentations, le 26 mai à 13 h 30 et 19 h 30 (www.toxique.ca). Du côté de la Promenade Wellington, autour d’un feu qui crépite pendant une soirée de bivouac à la belle étoile, Les contes de Verdun évoqueront les grandes étapes de l’histoire du Grand Sud-Ouest. Les conteurs rendront hommage aux communautés irlandaises, madelinoises et autochtones, montrant que la diversité est depuis toujours inscrite dans l’ADN de la communauté montréalaise. L’histoire de ces trois groupes fondateurs se dévoilera à l’aide d’une application géolocalisée qui invitera les curieux à découvrir le passé du quartier en suivant un parcours offert en libre-service. Du 1er mai au 30 novembre
Bandes dessinées et Flash mob
Dans le parc de la Petite-Italie et dans le Plateau-Mont-Royal, en partenariat avec le Festival BD de Montréal (FBDM), la Revue Planche présentera l’événement Les rues de Montréal, une exposition extérieure sur huit lieux historiques de Rosemont–La Petite-Patrie et cinq lieux historiques du Plateau-Mont-Royal, revisités par treize auteur(e)s québécois(e)s de bande dessinée. La publication complète des treize histoires sera accessible gratuitement sur Internet, tout au long de l’année 2017. Du 6 mai au 26 octobre. Toujours devant des lieux historiques, cette fois dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, Prima Danse invite petits et grands à des prestations de danse avec projections numériques et activités d’animation, les vendredis des mois de mai et juin 2017. Des cadeaux seront tirés.
En terminant, je vous invite à télécharger l’application mobile 375MTL; elle vous permettra de découvrir toute la programmation du 375e et d’ajouter des activités à vos favoris, afin de ne rien oublier ! (www.375mtl.com/app)
Jusqu’où nous mèneras-tu, Montréal ?
Comme toujours lorsqu’elle parle de théâtre, l’auteure et metteure en scène Marcelle Dubois s’anime. L’irremplaçable jeune femme, qui est aussi la directrice artistique du sympathique Festival du Jamais Lu et qui se plaît à inventer des textes aussi créatifs que tentaculaires, prépare en effet Jusqu’où te mènera Montréal ? un spectacle qui sera d’abord présenté dans le cadre du Festival du Jamais Lu. Marcelle Dubois rappelle la filiation de ce nouveau projet : « En 2012, le succès du spectacle Jusqu’où te mènera ta langue ? a démontré qu’il y avait un public pour des cabarets de la parole comme celui-là – un public qui ne va pas forcément au théâtre, mais qui aime la prise de parole, l’échange et l’actualité. » L’idée : être au plus près des actualités, pour que les auteurs se positionnent sur leur monde – ici et maintenant.
Alors, en voyant les festivités du 375e anniversaire de Montréal arriver, avec leur côté un peu préfabriqué, j’ai eu envie de faire quelque chose qui éclairerait les angles morts de ces festivités, reprend la dramaturge. Un show qui réveillerait nos perceptions de Montréal et donnerait la parole aux auteurs d’un Montréal actuel, pour donner à voir la ville telle qu’elle est, moderne et en mutation. « J’ai donc choisi trois photographes et sept auteurs qui partiront en mission de voyage dans sept quartiers de la métropole – Beaconsfield, Vieux-Montréal, Plateau Mont-Royal, Saint-Michel, Parc-Extension, Westmount, Hochelaga-Maisonneuve.» Et le texte s’écrira encore une fois jusqu’à la veille des représentations pour être le plus juste possible, insiste- t-elle.
Faire correspondre écriture et territoire
Marcelle a écrit sur l’Abitibi, sur Villeray, le territoire l’a toujours inspiré. Comment en est-elle venue à le faire correspondre aussi justement avec l’écriture ? « Je trouve qu’il y a dans notre façon d’être en adéquation (ou pas) avec notre territoire une piste de compréhension des chocs identitaires. » Ce fameux vivre-ensemble, c’est quoi au fond ? Certainement quelque chose qui tient plus du partage d’un territoire ou d’un quartier, que d’un concept politique. Alors, pour réellement vivre ensemble, Marcelle Dubois croit qu’il faut faire l’effort de comprendre de quoi est tissé le territoire et comment nos paysages intérieurs nous façonnent. Puis, en décortiquant l’imaginaire pluriel de ceux qui habitent le même bout de terre, on pourra dire, oui, on vit ensemble dans ce quartier, dans cette ville dans ce pays. Elle lance : « Un territoire, c’est le rassemblement voulu ou forcé des communautés et c’est toujours en mouvement. »
L’équipe des artistes –touristes
Avec le recul, j’ai remarqué l’homogénéité de la liste des auteurs impliqués dans Jusqu’où te mènera ta langue? J’ai donc cette fois-ci voulu aller chercher sept auteurs qui ont un rapport différent à la ville et à son identité : une auteure amérindienne, une anglophone francophile, une immigrante récente, des deuxièmes générations, des natifs de la ville ou des régions du Québec… Et cet assemblage raconte déjà quelque chose sur l’histoire de Montréal. « Ça nous apparaissait important, en cette année du 375e, d’écouter ceux qui écrivent notre Histoire – pas d’être politically correct… » insiste encore l’auteure engagée.
Les dix artistes-touristes devront créer, entre fiction et documentaire, à partir de leurs calepins de voyage. Histoires de ruelles, notes, chansons et conversations volées formeront le matériau. Comment faire exister la culture québécoise, mais surtout comment prendre acte des mutations de la société pour avancer ensemble ? La réponse est dans la poésie citoyenne, la prise de parole engagée et une critique nécessaire du Montréal d’aujourd’hui, se réjouit Marcelle Dubois.
Intéressé(e) ? Les carnets des sept touristes urbains seront présentés lors de la 16e édition du Festival du Jamais Lu, en mai. Un spectacle théâtro-littéraire sera ensuite créé dans le cadre du FTA, une exposition photographique et la publication des textes refermeront le projet. www.jamaislu.com