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Présentée pour la première fois en anglais, la production King Dave raconte l’histoire d’un jeune garçon de Montréal-Nord qui enchaîne les mauvaises décisions et plonge dans la violence armée. Sur une musique de Jenny Salgado.
Le metteur en scène Christian Fortin accompagne King Dave dans toutes ses métamorphoses scéniques depuis les premiers balbutiements du texte. Il a un lien privilégié avec l’auteur, qui a été son élève au cégep et qu’il a aidé à préparer ses auditions pour les écoles de théâtre. Une relation fructueuse, puisque la pièce a valu à Alexandre Goyette le Masque du texte original et celui de l’interprétation masculine (2005). Adapté au cinéma par Podz (2016), le texte a ensuite été entièrement remanié par Alexandre Goyette et Anglesh Major, le talentueux jeune acteur d’origine haïtienne qui a personnifié Dave chez Duceppe (2020).
« King Dave est un texte important; que sa nouvelle mouture ait fait salle comble dans un théâtre aussi populaire le souligne », dit Christian Fortin. Et partout en tournée, les salles étaient pleines. Il était temps d’envisager l’adaptation anglaise du texte : « Je voulais cette traduction depuis longtemps, mais il a fallu être patient. » Finalement, Eda Holmes, la directrice artistique du Centaur, a manifesté son intérêt et c’est Patrick Emmanuel Abellard, le comédien bilingue qui a porté le texte aux quatre coins du Québec et qui est aussi un familier du Centaur (Paradise Lost, Choir Boy) qui s’est mis à la tâche.
Partitions musicales
Jenny Salgado, membre fondatrice du groupe Muzion, un groupe pionnier de la scène hip-hop francophone, signe la conception sonore et musicale du spectacle. Mais elle a aussi été très présente comme collaboratrice dans la salle de répétition. Christian Fortin explique : « Nous passions d’un acteur blanc à un acteur de couleur et il fallait être vigilant; j’ai donc demandé à Jenny de m’accompagner dans le processus. » Le metteur en scène respecte en effet les opinions de la musicienne montréalaise de descendance haïtienne et admire sa franchise. « Encore aujourd’hui, un méfait ou un crime commis par une personne de couleur n’a pas les mêmes conséquences s’il est commis par un blanc. » Christian Fortin a donc voulu être conseillé afin de prendre des décisions éclairées sur ce qu’il fallait mettre en place pour que l’ensemble soit vraisemblable pour tous les publics.
« Jenny n’est pas intervenue dans le texte, mais elle l’a sondé », reprend Christian Fortin. Les arrangements musicaux devaient-ils appuyer ou adoucir la portée des répliques ? « Le texte en lui-même est très musical, il a une rythmique très particulière et il est joué comme une partition – d’une certaine manière, c’est le comédien qui rappe. » Les quelques phrases ajoutées en créole ont été conservées dans la version anglaise. Jenny Salgado tenait aussi à intégrer un peu de musique religieuse haïtienne dans la conception sonore du spectacle. « J’ai acquiescé, car je trouvais le résultat excellent et je voulais que sa palette teinte la quinzaine de morceaux de la production. » La musique est très présente dans les scènes clefs et il y a de longues pauses. Mais le metteur en scène laisse entendre que la compositrice a aussi créé des pièces entières, qu’il écoute volontiers dans son téléphone : « Jenny pourrait tirer un disque de ce travail. »
Le son de Montréal
La musique d’un spectacle aide souvent à mieux saisir la psychologie d’un personnage. Ici, King Dave n’ayant pas de décor réaliste, la trame sonore accompagne et situe instantanément l’action. Christian Fortin donne des exemples : « Quand Dave arrive dans le métro, le public entend les wagons sur un fond de mélodie; s’il arrive dans un party, on le sait instantanément à l’écoute des bruits de la fête au loin. » Il y a un piano sur scène et Patrick Emmanuel Abellard s’y installe à plusieurs reprises. Les morceaux ont été composés par Anglesh Major. Les notes du piano s’intègrent dans l’environnement sonore, qui a été mixé de façon magistrale, dit Christian Fortin.
King Dave est une pièce très urbaine. Le protagoniste utilise les transports en commun, il nomme des parcs montréalais, le quartier Saint-Michel. La production aborde des questions liées à l’appartenance et aux préjugés, laissant deviner l’aspect multiculturel de la métropole. Quand Dave visite sa mère, on perçoit des airs haïtiens – on est ailleurs, mais toujours à Montréal. Puis, d’un coup, c’est du heavy métal et on saisit immédiatement que Dave arrive chez un motard québécois. « Ce mélange d’influences, c’est l’identité, le son de Montréal dont Jenny et son groupe Muzion sont des représentants et quand j’écoute la musique du spectacle, c’est ce que je reconnais », se réjouit Christian Fortin.
Christian Fortin travaille pour la première fois en anglais : « Ce n’est pas une langue que je maîtrise, mais je connais le texte par cœur et un acteur anglophone est à mes côtés pour que je m’assure que rien ne m’échappe. » Le texte est un peu plus court en version anglaise et il faut le faire correspondre avec les moments déclencheurs de la partition musicale, au même moment qu’en français. « Patrick l’a traduit en le jouant, alors ça fonctionne très bien. » Le metteur en scène rêve de présenter King Dave sur la côte est. « Je veux que tout le monde découvre ce spectacle. » En attendant, King Dave est au Centaur.
King Dave, au Centaur, du 28 mars au 16 avril.
www.centaurtheatre.com
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