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Tous deux originaires de Caraquet, la soprano Christina Haldane et le pianiste Carl Philippe Gionet se côtoient depuis longtemps.
Née d’une mère acadienne et d’un père britannique, Christina Haldane a vécu longtemps en Angleterre où elle a fait la plus grande partie de sa carrière à l’opéra. Voulant se consacrer à l’enseignement, elle revient aux sources en Acadie et enseigne le chant depuis 2019 à la Mount Allison University de Sackville au Nouveau-Brunswick. De son côté, le pianiste et artiste multidisciplinaire Carl Philippe Gionet a obtenu une maîtrise et un doctorat de l’Université de Montréal et s’est ensuite spécialisé auprès de maîtres européens reconnus mondialement comme pianistes collaborateurs.
Toujours très près de leurs racines acadiennes, c’est dans le cadre du Festival acadien de Caraquet en 2017 que Christina et Carl interprètent trois arrangements de chants folkloriques signés par le pianiste, L’Escaouette, Wing tra la et Tout passe. « C’est de là que le projet est né. Il est très important pour moi, parce que les chansons acadiennes sont mes premiers souvenirs musicaux, parce que ma mère me les chantait. Les arrangements de Carl créent un beau mélange entre la musique classique et mes souvenirs d’enfance, confie Christina. C’est également un moyen de partager la culture et les histoires acadiennes d’une toute nouvelle façon en s’initiant à la musique classique. »
Tout au long de l’album, le piano et le chant sont mis sur un pied d’égalité, comme dans la tradition des mélodies françaises ou allemandes. En ne consultant pas de documents d’archives, Carl voulait éviter d’être pris dans un carcan et n’a pas hésité à changer un peu les mélodies pour mettre en valeur la voix de Christina ou l’ordre des couplets lorsqu’il le jugeait opportun, tout en restant fidèle à la pièce traditionnelle. « Au début, nous avons vraiment travaillé dans la tradition orale, sans partition et sous forme d’improvisation, commente M. Gionet. Je me suis donné comme défi de seulement arranger des chants que je connaissais déjà au complet par cœur pour les inclure dans un contexte de récital classique. Lorsque nous avons décidé d’en faire un album, il a fallu que je mette le tout sur papier, parce que les réalisateurs en avaient besoin. »
Si les arrangements peuvent parfois sembler simples en les écoutant, ils sont pourtant d’une grande complexité musicale, un peu à l’image des lieder de Schubert. Carl Philippe a tâché d’être minimaliste et précis dans ses indications. Quant à leur pièce préférée de l’album, Christina confie qu’elle a une grande affection pour Le pommier doux, alors que cette chanson a constitué pour elle un défi en raison de son caractère et de ses nombreuses répétitions. Tous deux s’entendent toutefois sur Partons, la mer est bellecomme coup de cœur. « Au début, je ne voulais pas vraiment arranger cette chanson, car je l’avais tellement jouée dans le passé, mais Christina m’a convaincu. C’est la dernière que j’ai terminée, j’étais à l’Île-du-Prince-Édouard, c’était le 15 août au matin. J’ai écouté l’enregistrement que je venais de faire et j’étais incapable de la chanter parce que je pleurais trop fort. Alors c’est peut-être celle que je préfère maintenant », explique Carl, ému. « Carl a créé quelque chose de vraiment singulier avec cette pièce », renchérit Christina.
Aux douze chants traditionnels s’ajoutent trois nouvelles œuvres. Icare : premier fragment d’Adam Sherkin, dont le texte est tiré du roman Icare de Carl Philippe Gionet, paru aux Éditions Prise de parole en 2021, etPour une Amérique engloutie et Il va sans dire de Jérôme Blais. « Afin de faire un équilibre avec les chansons folkloriques acadiennes, nous avons ajouté ces trois pièces, dont celle de Sherkin qui a une esthétique assez moderne. C’est comme un petit bonbon à la fin de l’album », rigole la soprano.
Le recueil de partitions des douze chants folkloriques acadiens sera édité et disponible sous peu chez Doberman-Yppan.
www.facebook.com/carlphilippegionet
Tu me Voyais / Christine Raphaëlle Haldane et Carl Philippe Gionet / Leaf Music LM257
Le charmant album Tu me voyais met de l’avant la voix riche de la soprano Christina Haldane dans des arrangements de 12 chants folkloriques acadiens de Carl Philippe Gionet qui joue également le piano pour l’ensemble des 15 pièces de l’album. Très inspirés, les arrangements s’inscrivent dans la tradition de la mélodie française et sont dotés d’une grande subtilité du point de vue tant vocal que pianistique. Souvent impressionnistes, on croirait entendre du Roussel à plusieurs reprises, grâce à une écriture raffinée et délicate qui réserve plusieurs surprises, tant au chapitre des nuances que des changements de tempo qui ajoutent beaucoup de charme aux chansons folkloriques. D’ailleurs, dans plusieurs cas, on oublie qu’il s’agit de chansons issues de la tradition orale et non pas de « vraies mélodies françaises ». Une grande langueur teintée de nostalgie s’empare de nous dans plusieurs pièces, notamment Écrivez-moi et Tout passe. La très célèbre Partons, la mer est belle est rendue de façon poignante avec plusieurs silences évocateurs et quelques changements au refrain qui ajoutent à l’aspect dramatique du texte. Petit bémol, malgré une très bonne diction française en général, l’on perd beaucoup de mots dans les pièces rapides. C’est notamment le cas dans L’escaouette et Au chant de l’alouette.
L’album est complété par trois pièces contemporaines de Jérôme Blais et Adam Sherkin. Malgré leurs grandes qualités, l’on se demande un peu ce qu’elles font dans un album de folklore. Mention spéciale à l’envoûtante Pour une Amérique engloutie de Jérôme Blais, sur un texte du poète acadien Léonard Forest.
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