La rentrée 2023 : perspectives torontoises

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Musiques en scènes

Les festivals, comme celui en juillet dans son centre-ville ou l’autre à Markham en août, ne sont pas les seules tribunes du jazz de la métropole ontarienne. La note bleue se fait entendre un peu partout en ville sur une base régulière, parfois dans ses salles de concert comme le Koerner Hall, mais surtout dans ses clubs, tels

le Jazz Bistro (251 Victoria), le Tranzac (292 Brunswick), le Rex Hotel Jazz & Blues Bar et Drom Taberna (196 et 458 Queen Ouest respectivement), sans oublier deux autres hôtels, le King West (1, rue King Ouest) et le St-Regis (325, rue Bay).

Musiques en conserve

À défaut de ne pas vivre dans la ville, il y a toujours les productions discographiques pour rester au fait de sa scène musicale. L’une des artistes les plus visibles en ce moment est la guitariste Jocelyn Gould, sa participation dans presque tous les festivals nationaux depuis deux ans rehaussant considérablement son image au pays. Cet automne, elle lance son troisième album intitulé Sonic Bouquet, dirigeant un quintette formé d’un second guitariste, une clarinettiste, un bassiste et un batteur. Pour promouvoir son album, la guitariste part en tournée, cette fois-ci en solo, dont une soirée à Montréal au Upstairs Jazz Bar le 3 novembre.

Autre jazzwoman affichant une certaine ambition, la saxophoniste alto Allison Au propose le 27 octobre prochain Migrations, un album avec son quartette auquel se greffent un quatuor à cordes, un vibraphoniste et, en invitée spéciale sur une plage, la chanteuse Laila Biali. L’album est un hommage relatant les expériences de ses ancêtres expatriés de Chine au Canada et celles de leur progéniture.

 La chanteuse Sarah Jerrom s’apprête à son tour à lancer son nouvel album intitulé Magpie pour la fin octobre. Projet sans égal en envergure, elle propose une suite de 90 minutes composée et arrangée par elle pour un ensemble de 21 musiciens avec tout le gratin du jazz de cette ville, des musiciens classiques, un chef d’orchestre et quatre voix, elle comprise. Tout un déploiement. En dernière heure, nous apprenons que la sortie de cet album double a été remise au printemps prochain pour des circonstances imprévues.

N’oublions pas les messieurs dans cette énumération, comme le quartette très contemporain Peripheral Visions, sous la direction du bassiste Michael Herring. Cette formation a capté plusieurs de ses prestations en direct au Tranzac pour son prochain disque intitulé We’ve Got Nothing, dont cinq plages pourront être visionnées sur YouTube au cours de l’automne.

Guelph Jazz Festival – Bientôt 30 ans

Si l’OFJM sonne la rentrée jazz pour la région montréalaise, cette année étant une exception, le Guelph Jazz Festival joue un rôle similaire pour Toronto et ses banlieues tentaculaires, dont Guelph, à plus de trois quarts d’heure de route à l’ouest. Bien que cet événement de quatre jours, démarrant le 14 septembre, soit sa vingt-neuvième édition, son directeur artistique, le tromboniste Scott Thomson, qui vient tout juste de quitter ses fonctions pour prendre les commandes du Festival international de musique actuelle de Victo (FIMAV), la considère comme le coup d’envoi de la trentième année. Six ans après avoir pris le relais de son fondateur Ajay Heble, Thomson estime avoir posé sa griffe sur l’événement, sans cependant déroger à sa vocation de présentateur de musiques qualifiées d’aventureuses, d’avant-garde ou expérimentales.

« Mon prédécesseur avait une nette préférence pour le free jazz noir afro-américain, dit Thomson. Je voulais ouvrir cela à d’autres approches, d’élargir la perspective par des démarches douées de leurs propres exigences. »

L’un des traits distinctifs du festival est son colloque, activité publique tenue dans les matinées et après-midi des deux premiers jours. Enseignants, artistes et journalistes s’entretiennent sur des thématiques reliées à l’improvisation, sa conception générale et ses expressions, autant dans les arts que dans la sphère culturelle et sociale. Si le lien entre cette activité et le festival était jadis plus serré, il l’est moins aujourd’hui, Thomson se consacrant uniquement au volet spectacle, Heble conservant son rôle de coordonnateur du symposium.

Ahmed

Interrogé sur ses choix de programmation, le directeur artistique souligne un cas en particulier qui lui tenait à cœur, soit Ahmed, un quartette européen. « J’ai rencontré le saxophoniste Seymour Wright bien des années auparavant, explique Thomson, et vers 2017, il s’est joint à un trio piano, résultant en cet ensemble nommé d’après le bassiste américain Ahmed Abdul-Malik, accompagnateur de Monk dans les années 1950 et véritable pionnier de la rencontre du jazz et des musiques du Moyen-Orient à titre de joueur d’oud. L’ensemble ici ne reprend pas la musique de son dédicataire comme le ferait un groupe de répertoire, mais se l’approprie d’une manière très personnelle : il l’aborde en toute liberté et cela m’allume beaucoup. Je les avais en vue depuis quelques années et je suis très heureux de les produire au festival. »

Parmi les autres faits saillants, nommons d’emblée le Genera Sextet du clarinettiste François Houle pour lequel il a composé un hommage au défunt directeur artistique du Festival de jazz de Vancouver Ken Pickering; de Montréal, le Ratchet Orchestra avec tout le gratin des musiques improvisées de la ville sous la férule du bassiste Nicolas Caloia; le pianiste américain Cory Smythe proposant en solo une déconstruction du standard de jazz Smoke Gets in Your Eyes de Cole Porter; le Lina Allemano Four de Toronto dirigée par cette trompettiste, qui faite la navette entre la Ville Reine et la capitale allemande Berlin, ainsi que le String Ensemble de Jessie Zubot de Vancouver.

Notons de même la convivialité du festival par la présentation d’une soirée complète de concerts gratuits le vendredi ainsi qu’une journée entière en plein air dans son centre-ville le lendemain. Malgré la pandémie, le Guelph Jazz Festival a assuré sa continuité en présentant des concerts durant la période sombre, mais le voici de nouveau en pleine forme, au seuil d’une nouvelle décennie de belles aventures sonores.

Guelph Jazz Festival : 14 au 17 septembre. www:guelphjazzfestival.com

Découvrez la rentrée montréalaise ici.

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A propos de l'auteur

Marc Chénard is a Montreal-based multilingual music journalist specialized in jazz and improvised music. In a career now spanning some 30 years, he has published a wide array of articles and essays, mainly in Canada, some in the United States and several in Europe (France, Belgium, Germany and Austria). He has travelled extensively to cover major festivals in cities as varied as Vancouver and Chicago, Paris and Berlin, Vienna and Copenhagen. He has been the jazz editor and a special features writer for La Scena Musicale since 2002; currently, he also contributes to Point of Departure, an American online journal devoted to creative musics. / / Marc Chénard est un journaliste multilingue de métier de Montréal spécialisé en jazz et en musiques improvisées. En plus de 30 ans de carrière, ses reportages, critiques et essais ont été publiés principalement au Canada, parfois aux États-Unis mais également dans plusieurs pays européens (France, Belgique, Allemagne, Autriche). De plus, il a été invité à couvrir plusieurs festivals étrangers de renom, tant en Amérique (Vancouver, Chicago) que Outre-Atlantique (Paris, Berlin, Vienne et Copenhangue). Depuis 2012, il agit comme rédacteur atitré de la section jazz de La Scena Musicale; en 2013, il entame une collabortion auprès de la publication américaine Point of Departure, celle-ci dédiée aux musiques créatives de notre temps.

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