Certaines conditions exceptionnelles donnent parfois lieu à des moments que l’on n’est pas prêt d’oublier. Le concert du 13 février présenté à la Maison symphonique par les Productions GFN fait incontestablement partie de ces moments-là. Au programme, les requiems de Fauré et Duruflé interprétés par seulement douze choristes professionnels de l’Ensemble vocal Arts-Québec (trois par pupitre) sous la direction de Francis Choinière. Seul autre musicien sur scène, Jonathan Oldengarm contrôlait les jeux de l’orgue Pierre-Béique à distance. Mais, vous l’aurez compris, tout n’était pas qu’une question de chiffres.
Compte tenu de la taille minimale de l’effectif, chaque choriste occupait un rôle de quasi-soliste. Dans le Requiem de Fauré, les voix des trois ténors se sont particulièrement bien mariées ensemble pour offrir une belle cohésion de groupe et faire ressortir les magnifiques lignes mélodiques de ce chef-d’œuvre. Les véritables parties de solistes ont été remarquablement exécutées par le baryton Dominique Côté et la mezzo-soprano Marie-Andrée Mathieu ainsi que la soprano Dorothéa Ventura dans les premiers instants de l’In paradisum. Au-delà de la maîtrise vocale de chacune et chacun, ce qui a frappé avant tout, c’est l’humilité des interprètes face à l’œuvre des compositeurs, leur recueillement au service de la musique. Ainsi, la valeur du sacré a été préservée et profondément respectée.
L’ensemble vocal s’est montré tout aussi irréprochable dans l’interprétation du Requiem de Duruflé, beaucoup plus exigeant techniquement et rythmiquement. Les solos étaient également plus difficiles à négocier: tantôt plus aigus pour le baryton, tantôt plus graves pour la mezzo-soprano. De son côté, l’organiste a réussi à traverser sans encombre les nombreux passages de virtuosité.
On peut aimer ou ne pas aimer la musique de ce compositeur, mais celle-ci mérite d’être écoutée au moins une fois dans sa vie tant elle offre un mélange original de chants grégoriens et contemporains, ces derniers venant à s’imposer sur le reste. Et comme certains films d’auteurs de la même époque, soit au milieu du XXe siècle, l’œuvre finit de manière inattendue. De ce point de vue, on peut se demander s’il n’aurait pas été préférable d’inverser l’ordre des requiems et finir en beauté par le Fauré.