Le concert d’ouverture de la saison 2022-2023 à la salle Bourgie a été marqué par deux faits majeurs : d’abord, la présentation officielle devant public des deux successeurs d’Isolde Lagacé à la direction générale et artistique, Caroline Louis et Olivier Godin; ensuite, une rétrospective de la vie d’Isolde Lagacé elle-même, bien évidemment en musique et accompagnée d’une série de témoignages de la principale intéressée.
L’après-midi de ce dimanche 18 septembre allait réserver quelques surprises et beaucoup d’émotions, à commencer par le Prélude et fugue pour orgue en do majeur, BWV 553, de Jean Sébastien Bach, augmenté par l’arrivée soudaine d’un percussionniste et de trois trompettistes. Cette prestation, pleine de solennité, a été une magnifique introduction au programme du concert et à la tonalité globale de l’événement. En effet, à l’orgue, il y avait Mélisande McNabney, la fille d’Isolde, et Matthias Soly-Letarte, le neveu d’Isolde, aux timbales.
L’actuelle directrice générale et artistique (jusqu’au 15 novembre) en a profité pour dire quelques mots sur l’orgue fabriqué par Helmut Wolff, une commande passée par les parents d’Isolde pour les besoins musicaux de la famille Lagacé, au départ, avant d’être vendu, quelques décennies plus tard, à la Salle Bourgie.
Elle a ensuite raconté les fois où, toute jeune, elle écoutait avec plaisir le jingle d’une émission de télévision à Radio-Canada sur l’Histoire. Celui-ci reprenait, sans qu’elle le sache à l’époque, les premières mesures du Concerto pour deux trompettes, RV 537, de Vivaldi. Non pas une, mais deux autres surprises sont venues de la scène avec la présence exceptionnelle de Mireille et d’Éric Lagacé, la mère et le frère d’Isolde. On peut seulement regretter les quelques fausses notes de la seconde trompette qui ont un peu nui à l’expérience de ce morceau.
La transcription de trois sonates de Scarlatti pour concerto grosso par Charles Avison a été un ravissement. Par son sens dramatique et sa remarquable vitalité, cette musique a confirmé ce que nous savions déjà à propos des chefs d’œuvre du répertoire baroque : leur caractère intemporel, de sorte qu’ils résonnent encore comme des musiques d’aujourd’hui.
La cantate Jauchzet Gott in allen Landen, BWV 51, de Bach fait partie de la grande histoire familiale. Elle a non seulement été entendue au mariage de Mireille Bégin et de Bernard Lagacé, mais également à la génération d’après, au mariage d’Isolde Lagacé et de Douglas McNabney. De toute évidence, cette cantate devait se retrouver en bonne place dans le programme. La partie de soliste a été interprétée brillamment par Magali Simard Galdès. La soprano a impressionné par son sens du phrasé, sa musicalité, et sa confiance au point qu’elle s’est pleinement appropriée la scène, devant l’orchestre.
La dernière œuvre au programme, le Concerto pour piano en la majeur no 23, K. 488, de Mozart, se voulait une allusion aux nombreuses fois où Isolde Lagacé a entendu la musique du compositeur-prodige résonner dans la maison de ses grands parents Bégin, en compagnie de ses parents également.
Le pianiste Ilya Poletaev s’est joint à l’Ensemble Caprice, sous la direction de Matthias Maute, sa partition dans les mains, comme à l’ancienne, et a joué sur le superbe pianoforte construit par l’Américain Rodney J. Regier. Même si l’on a admiré le toucher de l’interprète au clavier et sa large palette de nuances, dans les passages doux comme forts, on se demande si on ne préfère pas mieux la puissance d’un piano moderne pour ce répertoire concertant.
Prochain concert, ce soir, le 21 septembre, avec le pianiste Alain Lefèvre dans un répertoire français du XIXe et du XXe siècle. https://www.mbam.qc.ca/fr/activites/alain-lefevre-piano-1/