Entendre une œuvre de la Nativité en français est une chose rare. Il y a même un certain bien-être à comprendre et être captivé par un drame qui nous parle dans notre langue maternelle. À voir la quantité de représentations du Messie de Haendel durant la période des fêtes, il semblerait que les orchestres du Québec soient plus attachés à la tradition qu’autre chose. L’Orchestre symphonique de Montréal, quant à lui, a fait le choix de se renouveler en proposant L’enfance du Christ de Berlioz, un oratorio méconnu qui a pourtant toute sa place parmi le répertoire de Noël.
Le 19 décembre dernier, les musiciens de l’OSM étaient sous la direction du chef français Hervé Niquet, dont la précédente apparition remontait à 2019. Ils étaient joints sur scène par une pléiade de solistes, la plupart étant régulièrement invités à se produire dans la métropole. Fidèle à leur réputation, Julie Boulianne et Gordon Bintner l’ont été par le lyrisme et la richesse de leur timbre, Tomislav Lavoie par sa voix d’autorité, Geoffroy Salvas par son aisance vocale et sa diction irréprochable. On a pu apprécier l’intensité du jeu dramatique de Robert Gleadow, mais son vibrato saccadé et la faible résonnance de sa voix de baryton-basse n’ont pas été de nature à offrir une incarnation convaincante d’Hérode, qui ordonna le massacre des nouveaux-nés d’Israël.
Cyrille Dubois, dans le rôle du récitant, a été la découverte de la soirée. Sa tessiture aigue et sa technique solide lui ont permis raconter en toute fluidité les trois épisodes rapprochés de la vie de Jésus au moment de la Fuite en Égypte. Ses présences au début, au milieu et à la fin du spectacle ont été toutes caractérisées par l’éloquence.
La prestation du ténor français est à mettre en relation avec les qualités intrinsèques de l’œuvre. Sur le site de l’OSM, on pouvait lire fort justement à propos de Berlioz : « Il narre les divers épisodes de cette fresque biblique avec une délicatesse, une simplicité et une intensité remarquables qui donnent vie à chaque personnage. »
C’est l’exact sentiment qui nous a habité au fil de la soirée. Chaque scène avait sa raison d’être pour nous faire comprendre les enjeux du drame et notamment nous rendre sensible au sort de la Vierge Marie et de Joseph, cherchant refuge à Saïs. En seulement 1 heure 20, Hervé Niquet a offert une lecture dynamique et sans temps morts de L’enfance du Christ.