Dans la famille Kanneh-Mason, le talent musical ne manque pas. Ils sont 7 frères et sœurs à avoir choisi de poursuivre une carrière en musique. Avec leur propre site web, leurs propres stratégies marketing et leurs enregistrements collectifs, les Kanneh-Masons ont fait de leur nom une marque de commerce. Sheku, jeune violoncelliste de 24 ans, est le troisième de la fratrie et a déjà 6 albums à son compteur, tous parus chez Decca.
L’aînée a 27 ans et se nomme Isata. C’est peu dire qu’une certaine réputation la précédait à l’aube de son récital à la Salle Bourgie, le 10 octobre dernier. Pour le premier concert de la série « Pianistes d’exception », le public était en droit de s’attendre à une artiste vraiment exceptionnelle. L’enthousiasme est toutefois retombé au fil de la soirée.
Au programme, des œuvres centrées sur la période romantique avec, en entrée, la Sonate pour piano no 60 de Haydn, suivie de la Sonate de Pâques de Fanny Mendelssohn, les Scènes d’enfants de Schumann et la Sonate pour piano no 3 de Chopin.
On connaît Haydn pour son sens dramatique, ses attaques-surprises et son malin plaisir à contourner les conventions musicales en matière de sonate. Les ressorts expressifs de la partition étaient bien là, Isata Kanneh-Mason aurait pu s’en emparer. Or, la jeune pianiste britannique est trop restée en surface. La virtuosité du dernier mouvement, Allegro molto, était certes bien rendue, mais il a manqué ce supplément d’âme qui fait que l’interprète se métamorphose en artiste, porteur d’une vision personnelle de l’œuvre.
Dans le Schumann, on aurait pu s’attendre à du mouvement, du relief, des vagues montantes et descendantes. Au lieu de ça, placidement, Isata Kanneh-Mason a donné le sentiment de dérouler son programme sans se renouveler. Son interprétation a souffert, en conséquence, d’une absence de communion avec le public.
Parmi les points culminants de cette soirée, l’éxécution de la Sonate de Pâques de Fanny Mendelssohn, œuvre inspirée et inspirante d’une femme compositrice qui est trop longtemps restée dans l’ombre de son frère Felix. La Sonate no 3 de Chopin a été également l’occasion pour la pianiste de briller dans un répertoire qu’elle connaît bien pour l’avoir interprété dès ses débuts au concours de la BBC Young Musician en 2014. Son jeu a gagné en expressivité sous l’effet des arpèges et de l’élasticité du tempo, typique dans la manière d’interpréter Chopin.
Prochain concert dans cette série : Labyrinth avec David Greilsammer, le 26 octobre à 19h30. Le programme, très écléctique, inclut des œuvres de Jean Sébastien et Carl Philipp Emanuel Bach, Beethoven, Crumb, Janáček, Ligeti Lully, Mozart, Pelz, Rebel, Satie et Scriabine.
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