Peter Simon: Bâtir l’avenir

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L’on peut dire que Peter Simon a bouclé la boucle. Son parcours musical a débuté par l’étude du piano auprès de Boris Berlin, au Conservatoire royal de musique (CRM) de Toronto. Il a poursuivi ses études à l’école Juilliard, à New York, puis à l’université du Michigan, où il a obtenu son doctorat sous la direction de Leon Fleisher. Fleisher est, au dire de Simon, « le professeur que j’ai toujours recherché… l’un des plus grands penseurs musicaux que j’aie jamais rencontrés ». Simon était loin de se douter alors que le célèbre pianiste et chef d’orchestre nourrirait son inspiration comme musicien et responsable artistique pour les années à venir. 

D’artiste à directeur artistique, Simon a un parcours jalonné d’événements « fortuits et inattendus ». En 1989, il se voit encouragé à postuler à la Manhattan School of Music de New York. Proposer sa candidature pour un emploi dont il ignorait la nature était, selon ses mots, une « expérience ». Au terme de l’entretien d’embauche, il s’est vu offrir la possibilité de devenir directeur de l’école. N’ayant pratiquement aucune expérience en matière de gestion, il était toutefois persuadé d’avoir « la personnalité de l’emploi » et ne doutait nullement du pouvoir de la musique et de l’importance de l’éducation musicale. 

Deux ans plus tard, en 1991, Simon retourne à Toronto, cette fois en tant que directeur du CRM. Son retour au bercail a coïncidé avec une « situation particulière » : le Conservatoire royal, devenu depuis peu une entité indépendante, était en proie à de graves difficultés financières. Nullement découragé, Simon y voit l’occasion de « dénicher des possibilités », de canaliser son « optimisme indéfectible » et de « soulever l’enthousiasme du public ». « Je ne suis pas un fantaisiste, ajoute-t-il en riant, mais un rêveur. » Et il a osé rêver !

Simon était porteur d’une vision originale de l’avenir du CRM, incomparable à celle des autres écoles de musique canadiennes. Inlassablement, sept jours sur sept, il a tout mis en œuvre pour rendre l’éducation musicale de haut niveau accessible aux élèves de tout âge, tant au Canada qu’à l’étranger. 

Pour concrétiser sa vision, de nombreuses initiatives ont vu le jour, notamment la création du programme Apprendre par les arts (Learning Through The Arts ou LTTA), l’ouverture de l’école Glenn Gould, le lancement des programmes de certificat d’enseignement et d’artiste en résidence du CRM et de leur division de l’apprentissage numérique, le réaménagement de la Taylor Academy, la fondation de l’ensemble regroupant les artistes du Conservatoire royal (ARC Ensemble), la construction du Koerner Hall, l’inauguration du Marilyn Thomson Early Childhood Education Centre et le changement d’appellation de l’école communautaire du CRM, désormais l’Oscar Peterson School of Music. 

En 1997, au début de son mandat, Simon a été le maître d’œuvre d’un projet qui lui tenait particulièrement à cœur : l’inauguration de l’école Glenn Gould (anciennement la RCM Professional School). La philosophie qui anime cette école puise son inspiration dans le parcours musical de Simon en tant qu’ancien élève et musicien. 

« La relation entre l’élève et l’enseignant ou l’enseignante est très importante, dit-il. Les élèves doivent passer beaucoup de temps avec leurs professeurs pour approfondir leurs connaissances et leur compréhension et apprendre à travailler de façon autonome. » À l’école Glenn Gould, les élèves reçoivent une attention hautement personnalisée dans un environnement bienveillant, à l’échelle humaine. Outre les cours de maître, les répétitions et les prestations musicales, les quelque 130 élèves ont une heure et demie d’enseignement particulier par semaine; ces élèves reçoivent donc une éducation musicale de haut niveau dans un environnement à la fois axé sur la personne et solidaire. 

L’école Glenn Gould est l’une des réalisations dont Simon tire un grand sentiment de fierté, car il trouve passionnant de « voir les élèves qui y ont obtenu leur diplôme réussir aux quatre coins du monde, sachant que l’école les y a préparés ».

Simon est également très fier de la salle Koerner, une salle de concert achevée en 2009 qui fait partie intégrante du TELUS Centre for Performance and Learning. « Toronto notamment, et plus généralement le Canada, ne disposait pas d’une grande salle de concert. » Il est d’avis que « la musique prend vie ou s’étiole selon la qualité de l’acoustique et l’atmosphère de l’environnement dans lequel elle est jouée. La musique orchestrale mérite d’être écoutée dans “une salle où l’acoustique est impeccable”. » Dotée d’une acoustique exceptionnelle, la salle Koerner, intimiste, comble une importante lacune dans le paysage musical classique canadien. Il ajoute : « Les artistes internationaux adorent cette salle et souhaitent de façon unanime s’y produire. »

L’accessibilité à l’éducation musicale a toujours été au cœur de l’œuvre de Simon au sein du CRM. À l’école Glenn Gould, la plupart des élèves bénéficient d’une bourse d’études complète. Le Marilyn Thomson Early Childhood Education Centre met à la disposition des parents des outils numériques d’éducation musicale utilisables partout dans le monde. Simon ajoute que « le programme Oscar Peterson offre aux personnes moins favorisées une éducation musicale exceptionnelle ». Ce travail, Simon le trouve « extrêmement gratifiant en raison de son potentiel transformateur ». 

Le célèbre pianiste de jazz, dont la mémoire a été honorée en 2021 par l’adoption par l’école de son patronyme, est décrit par Simon comme « une personne et un musicien extraordinaire et l’un des plus grands artistes canadiens de tous les temps. Oscar Peterson était d’avis que la formation musicale classique est la pierre d’assise de l’apprentissage d’un instrument. » Pour commémorer cette légende du jazz, il allait de soi de renommer l’école en son honneur. 

À bien des égards, le CRM transcende les activités traditionnellement dévolues à une école de musique. L’ARC Ensemble en est un parfait exemple. Composé de membres enseignants du CRM et de quelques personnes qui y ont obtenu leur diplôme, il s’est produit dans toute l’Amérique du Nord, en Europe et en Asie et a enregistré sept albums. Les membres de l’ensemble ont également participé activement à la recherche et à la reprise d’œuvres musicales tombées dans l’oubli durant l’Holocauste. 

En août 2024, Peter Simon quittera ses fonctions de président et directeur général du CRM. La portée de ses réalisations est considérable. Qu’est-ce qui l’anime ? Simon avoue que sa motivation première est son amour de la musique et sa foi en son pouvoir. « Il faut vraiment y croire, affirme-t-il. Le fait de jouer de la musique vous emporte dans une autre dimension, dans un endroit magnifique. Le monde est loin d’être toujours beau ! La musique a le mérite de vous reconnecter à cette beauté. » 

Même si sa contribution au CRM touche à sa fin, Simon entretiendra toujours un lien étroit avec la musique, que ce soit en assistant à des concerts au Koerner Hall, la salle qu’il affectionne tant, ou en jouant ses morceaux préférés lors de ses prestations annuelles à l’occasion de son anniversaire. Comme il se plaît à dire : « J’adore la musique, j’aime la jouer et l’écouter. »

Traduit par Lina Scarpellini

Des élèves du CRM se produiront au Carnegie Hall de New York le 7 mai prochain dans le cadre d’un premier engagement international. Pour plus de détails sur ce concert, sur les diverses initiatives du CRM et sur Peter Simon, consultez le rcmusic.com/Carnegie

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