CD-livre – Ciel convertible – Patenaude / Coppens

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Ciel convertible / Gilbert Patenaude, musique ; Patrick Coppens, poésie / Autoproduction, 2018.

Près de 15 ans après sa publication, le recueil du poète Patrick Coppens s’habille de nouvelles couleurs, vocales et instrumentales, dans cet album de 49 titres dont la musique est signée Gilbert Patenaude. Celui-ci, qui a œuvré pendant près de 40 ans auprès des Petits Chanteurs du Mont-Royal, et qui recevra dans quelques jours le Prix Hommage décerné par le Conseil Québécois de la Musique lors des Prix Opus, est également compositeur, en témoignent plusieurs opéras sur des livrets de Thérèse Tousignant, et cette récente collaboration avec le poète Patrick Coppens.

Patrick Coppens. Photo : TC Media

Les 49 textes sont autant de microcosmes, d’observations, de restitution d’univers oniriques façonnés par les mots et le rythme, sans temps ni lieu. Ils flottent dans un ailleurs qu’il n’est nul besoin de situer. Ils se suffisent à eux-mêmes. Les anges y côtoient les crapauds, et l’on sent transparaître au fil du livret-recueil parsemé de tendresse et d’humour une ferveur sacrée : même les vampires se surprennent à croire en dieu.

Gilbert Patenaude

À la musique des mots se superpose la composition de Gilbert Patenaude, pour quatre voix : deux humaines (Jacqueline Woodley, soprano et Julien Patenaude, baryton) et deux instrumentales (Sheila Hannigan, violoncelle et Mariane Patenaude, piano). Les différentes parties évoluent souvent de leur côté, se rejoignant de temps à autres pour se désunir à nouveau. Piano et violoncelle changent de rôle selon les textes, servant parfois d’illustrations ou développant une voix propre qui dialogue avec les textes. Soprano et baryton personnifient l’univers de Patrick Coppens. Voix parlée, récitatifs ou mélodies chantées, solos ou duos, de nombreux moyens sont mis en œuvre par le compositeur pour rendre à chaque poème son authenticité sans pour autant trahir l’unité du tout. Lignes vocales séparées d’une octave évités, homorythmie, touches de couleurs au piano, motifs brefs au violoncelle sont des composantes récurrentes de l’œuvre. Le tout est très épuré, et il est assez rare d’entendre les quatre instruments en même temps. Ce discours très aéré permet au texte d’être au premier plan et de révéler à l’auditeur toute sa richesse et sa profondeur.

Cette exploration musical de l’univers poétique de Patrick Coppens est une alliance très intéressante de la musique et des mots. En choisissant une formation et un langage musical peu chargés, Gilbert Patenaude peut explorer les multiples interactions de ces quatre voix tout en laissant le texte vivre et respirer. L’objet est à l’image de l’œuvre, triptyque (comment ne pas penser au retable) avec le disque au centre, entouré par les deux tomes du recueil de textes, tout respire, même le dessin de Patrick Coppens qui fait office de pochette. Un bel objet à acquérir pour les amateurs de poésie et les voyageurs de l’esprit.

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Gilbert Patenaude recevra le Prix Hommage lors de la 22e édition des Prix Opus. Patrick Coppens est le fondateur de la Société littéraire de Laval. Il vient de sortir le recueil Pensées pensives II.

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A propos de l'auteur

Benjamin Goron est écrivain, musicologue et critique musical. Titulaire d’un baccalauréat en littérature et d’une maîtrise en musicologie de l’Université Paris-Sorbonne, il a collaboré à plusieurs périodiques et radios en tant que chercheur et critique musical (L’Éducation musicale, Camuz, Radio Ville-Marie, SortiesJazzNights, L'Opéra). Depuis août 2018, il est rédacteur adjoint de La Scena Musicale. Pianiste et trompettiste de formation, il allie musique et littérature dans une double mission de créateur et de passeur de mémoire.

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