Pierre Bourgie, mécène

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(Une version de cet article a été publiée en novembre 2011.)

L’homme d’affaires et mécène Pierre Bourgie semble être né sous une bonne étoile. En 2005, il est devenu le principal donateur du Pavillon Bourgie du Musée des beaux-arts de Montréal, un projet qui combinait ses deux passions artistiques. Il en apprécie aujourd’hui le succès : en quelques années seulement, le Pavillon a transformé la scène musicale et artistique à Montréal.

Ce n’était pas la première fois qu’il saisissait une opportunité. En 1996, à l’âge de 40 ans, M. Bourgie a vendu l’entreprise familiale de pompes funèbres Urgel Bourgie et utilisé le produit de la vente pour investir dans les instruments financiers et l’immobilier. M. Bourgie attribue sa bonne fortune à une philosophie très simple, celle de régir sa vie selon une perspective à long terme, comme l’ont fait trois générations de sa famille.

L’art et la culture font partie depuis toujours du legs de la famille Bourgie. Dans la salle d’attente de ses bureaux, on aperçoit un magnifique buste de Beethoven, une œuvre de son grand-père. C’est tout ce qui reste de l’ancien siège social, ravagé par un incendie en 1956.

Vers l’âge de six ou sept ans, il a a commencé des leçons de piano avec sœur Thérèse Laramée à Mont-Jésus-Marie. Il a abandonné au bout de cinq ans, parce qu’il ne répétait pas assez, mais son initiation à Haendel et à Bach lui a donné l’amour de la musique.

Pendant sa jeunesse, M. Bourgie trouvait toujours des moyens d’assister gratuitement à des concerts, notamment grâce à sa petite amie qui était placière à Place des Arts. Par la suite, étudiant à l’Université d’Ottawa, il s’est mis à sortir avec une autre placière, au Centre national des Arts cette fois. Il étudiait la finance, mais il a particulièrement aimé son cours en option sur le dadaïsme et le surréalisme. Un de ses professeurs des beaux-arts lui a fait découvrir Fais voile vers le soleil, œuvre de Stockhausen qui lui a donné la piqûre de la musique contemporaine.

De retour à Montréal, M. Bourgie a travaillé pour l’entreprise familiale, dont il est devenu président à l’âge de 32 ans. « Une entreprise de pompes funèbres est une entreprise comme toute autre, dit-il. Il faut gérer du personnel, des immeubles, des services de comptabilité et de marketing, des voitures et des ateliers de réparation. Ce sont les commentaires des familles qui nous motivaient. Nous avions un rôle social à jouer et je pense que nous l’avons fait comme il faut. »

La qualité d’une entreprise dépend de la qualité de son personnel, d’après lui. « Il faut travailler avec les gens et, chaque matin, savoir comment ils se sentent, souligne-t-il. On est l’entraîneur ou le chef d’une équipe. Il faut savoir les faire jouer ensemble dans la bonne humeur, sinon ça ne fonctionne pas. »

La vie de M. Bourgie a pris un autre tournant en 1996, époque où les fusions se multipliaient. « Ça faisait des années qu’on y pensait, et je me suis rendu compte que c’était un moment qui ne durerait pas très longtemps. » Décision difficile à prendre pour une entreprise centenaire, mais le père de M. Bourgie, qui avait alors 70 ans, a confié la décision à son fils.

C’était le moment ou jamais. À l’âge de 40 ans, M. Bourgie avait déjà une longue feuille de route dans les affaires, mais il lui restait encore plusieurs années devant lui. « Il ne faut pas s’attacher à une entreprise. Nous avons eu de la chance. Nous l’avons vendue à un groupe qui l’a ensuite revendue, quatre ou cinq ans plus tard. »

À présent, l’entreprise de pompes funèbres porte encore le nom d’Urgel Bourgie, pratique courante dans l’industrie d’après M. Bourgie.

M. Bourgie s’est lancé dans le service communautaire en 1986, lorsqu’il a été invité à devenir président de la Fondation de l’Hôpital Sainte-Justine. En 1990, il a commencé à siéger au conseil d’administration du quotidien Le Devoir (dont il était président durant la crise de 1993) et trois ans plus tard, il a entamé un mandat de dix ans au conseil du Musée d’art contemporain.

« Nous avons toujours contribué à différentes causes, dit M. Bourgie. Après la vente de l’entreprise, mon père a décidé de créer une fondation pour l’éducation afin de distribuer des bourses; c’est ma sœur qui s’en occupe. »

Pendant son mandat au conseil de la formation Les idées heureuses, de 2000 à 2005, M. Bourgie s’est rendu compte qu’il n’existait aucune salle de concert vouée à la musique de chambre à Montréal.

« Il y a cinq ou six ans, j’ai créé ma propre fondation orientée vers la musique et les arts visuels, rappelle-t-il. Je voulais me consacrer à une cause en particulier afin d’améliorer les choses au lieu de me disperser un peu partout. J’ai commencé à examiner différents projets visant une nouvelle salle, mais le financement était difficile à trouver. C’est alors que j’ai entendu parler de ce projet au Musée. »

Nathalie Bondil, directrice du Musée des beaux-arts de Montréal, a informé M. Bourgie de la transformation imminente de l’ancienne église Erskine and American en pavillon d’art canadien. À ce moment-là, on ne savait pas encore exactement ce que deviendrait la nef. M. Bourgie a alors suggéré de la transformer en salle de concert, idée qui a plu à Mme Bondil.

« Ensuite, notre famille a décidé de verser le don principal au pavillon, précise-t-il, et j’ai créé la fondation Arte Musica, qui est en résidence dans le Musée et chargée du fonctionnement de la salle de concert. » La conseillère de M. Bourgie à cette époque était Isolde Lagacé. Il lui a confié la gestion courante de la fondation et de la salle.

Le don de M. Bourgie, dont le montant est inconnu, a donné le coup de départ de la campagne de financement de ce projet d’une valeur de 42,2 millions $, y compris le fonds d’immobilisations pour faire fonctionner le pavillon. Les gouvernements au palier fédéral, provincial et municipal y ont tous contribué, attirés par le fait que le capital d’exploitation était garanti par M. Bourgie.

M. Bourgie conseille volontiers aux gens d’affaires de s’engager. « Nous devons exercer nos devoirs civiques. Redonner à la communauté est une forme de civisme. Une société dépend de l’engagement des citoyens. Ce n’est pas seulement la politique qui doit bouger. Si tout le monde faisait du bénévolat, que ne pourrait-on pas réaliser ! Je vois que les gens sont emballés par mon projet, et cela engage ma responsabilité. Mais c’est excitant : sans responsabilité, la vie serait ennuyeuse. »

Et M. Bourgie de conclure : « Ce que je dirais aux mécènes, c’est de s’engager dans ce qui les passionne. Pour ma part, ce sont la musique et les arts visuels. Quelle chance pour moi de pouvoir réunir mes deux passions sous le même toit ! »

Dossier Salle Bourgie

 

 
 

Traduction par Anne Stevens

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