L’opéra en Europe revient sur scène

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Traduction par Mélissa Brien

En mars dernier, tandis que la plupart des pays se sont retrouvés confinés, les organisations musicales du monde entier ont pris la difficile décision d’annuler le reste de leurs saisons 2019-20. Certaines ont annulé ou reporté tous les spectacles en direct jusqu’en janvier 2021 pour des raisons de sécurité et de budget, laissant des milliers de musiciens, machinistes, décorateurs, techniciens et autres sans emploi jusqu’à nouvel ordre. Alors que la scène opératique nord-américaine se fait encore silencieuse, les compagnies européennes ont trouvé des moyens créatifs de présenter à nouveau des opéras en direct à leur public. 

En Allemagne, le Deutsche Oper Berlin a proposé une solution des plus créatives et bizarres pour présenter l’opéra en toute sécurité devant un public : Das Rheingold de Wagner a été joué, avec une mise en scène complète, dans un stationnement extérieur. Une heure a été retranchée de la durée habituelle de deux heures et demie et 12 chanteurs ainsi que 22 musiciens distancés physiquement ont interprété l’orchestration réduite de Jonathan Dove de 1990. L’orchestre a nécessité une amplification, mais pas les chanteurs, qui ont bénéficié de ce qui est, apparemment, une bonne acoustique pour la voix. Il s’agissait de la première représentation d’opéra devant public en Allemagne depuis la fermeture des théâtres. Huit cents billets étaient offerts et, en douze minutes, toutes les représentations étaient complètes. 

En Autriche, le Festival de Salzbourg, l’un des événements musicaux les plus huppés d’Europe, a célébré son 100e anniversaire avec un programme réduit de 90 concerts. Les spectacles ont été présentés devant des spectateurs distancés qui devaient porter un masque jusqu’à ce qu’ils soient assis dans la salle à demi-capacité. Cependant, il n’y avait aucune distanciation sur scène. Les musiciens de l’Orchestre philharmonique de Vienne ainsi que les chanteurs et les acteurs ont été régulièrement testés et ont obtenu leurs résultats en quelques heures. Elektra de Strauss, mis en scène par Krzysztof Warlikowski, a ouvert le festival, suivi de Così fan tutte ainsi que de plusieurs récitals, dont un Liederabend avec Matthias Goerne et Jan Lisiecki. La pièce Jedermann de 1911 de Hugo von Hofmannsthal a également été jouée. Aucun incident majeur lié à la COVID-19 n’a été signalé. 

Photo: Javier del Real

Le Teatro Real de Madrid a adopté une approche différente. Bien que la ville ait été particulièrement touchée par la crise actuelle du coronavirus, une production complète de La Traviata de Verdi a été présentée à 27 reprises au cours du mois de juillet avec une distribution prestigieuse, incluant Lisette Oropesa et Marina Rebeka, qui se partageaient le rôle de Violetta, et Michael Fabiano et Matthew Polenzani qui alternaient le rôle d’Alfredo. L’œuvre était programmée depuis longtemps et l’opéra était déterminé à la présenter dans son intégralité, avec orchestre et chœur, mais devant un public réduit et distancé. Chaque chanteur sur scène, y compris les membres du chœur, devait rester dans un carré d’environ deux mètres de côté, bien délimité sur le sol de la scène, et ne pouvait se déplacer que si un carré se libérait à côté. Les scènes solos et les duos permettaient une plus grande liberté sur scène, mais aucun contact n’était autorisé. Les représentations ont connu un tel succès qu’Oropesa a interprété en rappel son dernier air, Addio del passato, faisant d’elle la première femme à chanter un « bis » dans l’histoire de l’opéra espagnol. 

Alors qu’une deuxième vague se profile à l’horizon en Europe, il est difficile de prévoir avec précision ce qui se passera à l’automne ou l’année prochaine d’ailleurs. Certaines grandes institutions, dont le Royal Opera House de Londres et l’Opéra national de Paris, ne prévoient pas de spectacles avant le Nouvel An. D’autres, comme le Teatro alla Scala, proposeront des saisons modifiées. Le théâtre le plus prestigieux d’Italie ouvrira sa saison d’automne avec le Requiem de Verdi, un choix symbolique étant donné que la région de Lombardie, dans laquelle se trouve Milan, a connu un nombre élevé de morts. Le directeur musical Riccardo Chailly dirigera le Requiem et les solistes seront Krassimira Stoyanova, Elīna Garanča, Francesco Meli et René Pape. La compagnie présentera également deux opéras en concert, La Traviata sous la direction de Zubin Mehta et Aida sous la direction de Riccardo Chailly, ainsi que La Bohème en version intégrale, utilisant l’ancienne production de Zeffirelli, et un gala de ballet avec une reprise de Giselle. De nombreux récitals sont également au programme, donnés par des stars telles qu’Anna Netrebko, Jonas Kaufmann, Placido Domingo, Simon Keenlyside, Erwin Schrott, Marina Rebeka, Sabine Devieilhe, Maurizio Pollini et Daniel Barenboim. Plusieurs autres événements, dont une version pour enfants de La Cenerentola interprétée par l’Académie du Teatro alla Scala, seront présentés avant le début de la nouvelle saison, laquelle s’ouvre traditionnellement le 7 décembre.

Terminons en espérant que les compagnies nord-américaines trouveront des moyens de présenter de l’opéra en direct devant public le plus tôt possible.

 

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