Le Théâtre du Futur / Les secrets de la vérité : l’imagination (délirante) au pouvoir

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Connaissez-vous la très, très sympathique compagnie Le Théâtre du Futur, maintenant en résidence au Théâtre les Écuries et célèbre pour marier comédie musicale et science-fiction théâtrale ? Guillaume Tremblay, Olivier Morin et le multi-instrumentisteNavet Confit forment ensemble cette compagnie montréalaise singulière, obnubilée par un genre plutôt rare sur les scènes : le théâtre d’anticipation. Nos amis du futur fantasment l’avenir du Québec, ce qui leur permet de flirter avec la satire politique, une des vraies forces du trio. Ainsi, après L’opéra rock de Clotaire Rapaille, une croustillante moquerie du séjour québécois du publicitaire mythomane français, L’assassinat du président, une invraisemblance où Duceppe devenu président d’un Québec libre se fait sottement trucider, Épopée nord, un voyage à l’ère des grands cataclysmes environnementaux et La vague parfaite, un opéra sur le surf un peu moins réussi, Le Théâtre du Futur revient avec Les secrets de la vérité, l’aventure martienne de Jésus. Si, si, vous avez bien lu.

Poum… Pam- pam-pam-pam. Sur les notes d’un méga succès du projet Enigma, Cindyne Bournival, une version 2.0 de Marie-Madeleine (Mylène Leclerc) reçoit la visite nocturne de  (François Ruel-Côté). Au matin, Cindyne Bournival se révèle vraiment très enceinte – d’au moins trois bébés !  Est-ce un miracle ou une infâme conspiration ourdie par le grand prêtre techno Elon Musk, prêt à tout pour coloniser la planète Mars ? Et qui est cet hypocrite chorégraphe de projets, le retors Jessy Boulianne ? (Guillaume Tremblay et Olivier Morin). Ce délire drolatique est nappé d’une paranoïa inquiétante, on nage dans une atmosphère (ultra) complotiste. Un inconnu rode et lance périodiquement des avertissements alarmants :  il voit clair dans le jeu des multinationales, il connait l’agenda caché des gouvernements, les manigances des journalistes et aussi celles des extraterrestres. Il sait tout : les chemtrails, l’oxygène, les produits chimiques, la température, l’internet, les abeilles…

Depuis toujours, l’homme aime croire qu’il existe quelque chose de plus grand que lui, d’insaisissable, d’incompréhensible. Entre ce qui est vrai et ce qui n’est pas vrai, ce n’est qu’une question de temps, écrivait Einstein, cité dans la pièce. À coup d’ellipses, de caricatures et de scènes loufoques, les gags se succèdent à un rythme effréné. Le trio tire sur tout ce qui bouge – de l’intime au religieux, en passant par la technologie –  et nous rions aux éclats de voir notre stupidité soulignée à si gros traits. Les comédiens sont excellents et poly talentueux : ils chantent, dansent, enchaînent sans souffler les saynètes débridées. Le spectacle n’est pas parfait mais cette imperfection rend la fresque d’autant plus sympathique ; surtout que sous ses allures de bric et de broc, la comédie musicale est réglée au quart de tour.  Quelque chose dans le propos et son traitement décalé rappelle avec délices le ton de la fresque de Jean-Pierre Ronfard, Vie et mort du roi boiteuxou bien les films sans queue ni tête et l’humour bon enfant de la célèbre troupe d’humoristes britanniques, les Monty Python.

Alors ne boudez pas votre plaisir, d’autant que la pièce peut être une excellente introduction au théâtre pour un public d’adolescents, de jeunes ou de moins jeunes adultes (le spectacle est pour les 14 ans et plus). Dernière chose… Saviez-vous que le vendredi, aux Écuries, c’est Vendredi-dis-ton-prix ? Vous donnez ce que vous pensez que la représentation vaut ! Et les étudiants et les voisins ont de plus droit en tout temps à un tarif spécial. Ils sont sympas comme ça, aux Écuries !

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