Critique | Jusqu’à ce qu’on meure : l’éblouissant cirque de Poupart

0
Advertisement / Publicité

Brigitte Poupart convoque ses meilleurs collaborateurs dans Jusqu’à ce qu’on meure, une magnifique fête du cirque, du théâtre et des sens dans laquelle on se laisse glisser. Un must. Du 2 au 13 novembre, à l’ARSENAL ART CONTEMPORAIN MONTRÉAL

L’actrice et metteure en scène Brigitte Poupart s’était déjà mesurée aux grosses machines de type Cirque du Soleil, depuis Luzia (2015). Avec Jusqu’à ce qu’on meure, un partenariat inédit entre Transthéâtre, MONTRÉAL COMPLÈTEMENT CiRQUE et Multicolore (Piknic Electronik), l’artiste multidisciplinaire fait plutôt dans la dentelle un peu trash et on en redemande.

Jusqu’à ce qu’on meure commence par la fin. Une voiture accidentée, des corps. Une catastrophe naturelle, une pandémie sont-elles arrivées? Brigitte Poupart dessine à rebours le parcours d’une soirée improbable, pour que la représentation entraine les spectateurs du début angoissant à la fête de la fin, où spectateurs et interprètes se rencontrent sur la même scène, conviés aux mêmes bars. La soirée se poursuit ensuite avec une musique irrésistible. Est-ce une allégorie de notre aveuglement face à l’inéluctable finalité des changements climatiques?

L’acrobate Yury Paulau ouvre la seconde partie du spectacle Crédit photo : Transthéâtre

Un numéro de sangles ouvre la partie rebours du spectacle Crédit photo : Transthéâtre

Un cirque qui groove

Depuis ses premières créations, Brigitte Poupart repousse les conventions habituelles de la représentation, vise une scénographie immersive. Jusqu’à ce qu’on meure plonge réellement le spectateur au cœur d’une expérience artistique. Il se déplace à son gré et jouit d’une rare proximité avec les artistes. Il voit des histoires se déployer, s’enchainer, se croiser. puis se chevaucher totalement. Entre les numéros de danse ou de cirque, les laser et les subtilités des décors à détailler, on ne s’ennuie pas une seconde. Le spectacle est visuellement plaisant et souvent poétique mais pas uniquement – le téléphone d’une cabine distille des messages dans toutes les langues, par exemple.

Un artiste de cirque tombe du ciel dans un sas souligné par des éclairages au laser. Des artistes circassiens prennent leur élan sur le toit d’une voiture, pour un numéro de sangles qui est d’autant plus spectaculaire de par sa proximité avec le public. Un acrobate utilise une planche de bois comme barre fixe pour se glisser dans une cuisine démolie et retournée; il marche sur les murs. L’équipe est inventive et le résultat épatant; le spectacle est très exigeant et il est livré à la perfection. Oubliez le gnangnan, Jusqu’à ce qu’on meure est l’expression d’un cirque narratif renouvelé, décomplexé qui se sent bien dans l’expression de toutes ses facettes.

Une équipe de feu

Une excellente conception sonore ambiophonique (surround) contribue au succès de l’expérience immersive du spectacle (Conception sonore Mathieu Roy) et le niveau de la musique est parfait. L’un des musiciens les plus demandés ces dernières années, Alex McMahon (Daniel Bélanger, Ariane Moffatt, la trame sonore de la série Expat ) signe la musique qui tapisse le spectacle, d’un bout à l’autre, sans lasser une seconde… On aimerait avoir ces morceaux sur une liste d’écoute.

Marie-Reine Kabasha, Axelle Munezero et Lakesshia Pierre Colon dans Jusqu'à ce qu'on meure de Brigitte Poupart. Crédit photo : Transthéâtre

Marie-Reine Kabasha, Axelle Munezero et Lakesshia Pierre Colon dans Jusqu’à ce qu’on meure de Brigitte Poupart. Crédit photo : Transthéâtre

L’unique Dave St-Pierre signe d’époustouflantes chorégraphies, très pop, qui prennent d’assaut toutes les surfaces utilisables de l’Arsenal. Le chorégraphe et collaborateur de longue date signe aussi la conception des nombreux costumes des interprètes. Le niveau d’énergie du spectacle évoque d’ailleurs un peu la prodigieuse rage de vivre de l’artiste, diagnostiqué de fibrose kystique avant l’age de vingt ans. On retrouve aussi sur les planches l’ex Carbone 14 Jeffrey Hall, complétement hallucinant. Il danse, joue, saute de scène en scène comme un jeune homme – c’est un autre survivant qui en impose. .

Les acrobates Yuma Aias, Fernando Gonzales, Eduardo Grillo, Michaël Hottier, Audrey Labeau, Bia Pantojo et la danseuse Lakesshia Pierre Colon. Crédit photo : Transthéâtre

La notion de métissage et la place des femmes est depuis toujours au centre de la démarche de Transthéâtre. La rencontre d’artistes de différents horizons culturels ou artistiques (danse, musique et multimédia) prend tout son sens dans l’approche multidisciplinaire de la mise en scène de Jusqu’à ce qu’on meure. Il faut souligner l’apport de la reine du freestyle Marie-Reine Kabasha (EBNFLOH, Tentacle Tribe, Grand Poney, Caroline Laurin-Beaucage…) celui de l’éblouissante interprète et chanteuse Lakesshia Pierre Colon, révélée au grand public par le clip de Loud Toutes les femmes savent danser. La gracieuse Axelle Munezero (Corneille, Arcade Fire) complète ce trio électrique de danseuses.

Afin de mieux profiter de la représentation, mettez de bonnes chaussures et laissez vos affaires au vestiaire pour bouger facilement et, pourquoi pas, danser. Du 2 au 13 novembre, à l’ARSENAL ART CONTEMPORAIN MONTRÉAL

Avec Yuma Aias (Acrobate) Fernando Gonzales (Acrobate) Eduardo Grillo (Acrobate) Jeffrey Hall (Danseur) Michaël Hottier (Acrobate) Joy Isabella (Danseuse) Marie-Reine Kabasha (Danseuse) Audrey Labeau (Acrobate) Bia Pantojo (Acrobate) Yury Paulau (Acrobate) Lakesshia Pierre Colon (Danseuse) Axelle Munezero (danseuse).

Partager:

A propos de l'auteur

Laissez une réponse

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.