Critique de disque : Luc Beauséjour – Moments baroques au piano

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2 1234_CouvertLuc Beauséjour est l’une des figures de proue de la scène baroque montréalaise. Maître incontesté du clavecin, il accompagne depuis maintenant une vingtaine d’années des ensembles, chanteurs et instrumentistes de musique ancienne et baroque pour l’étiquette Analekta. Dans Moments baroques au piano, Beauséjour délaisse momentanément le clavecin pour transposer son répertoire habituel au piano. Il explique que peu de clavecinistes se sont aventurés à jouer les œuvres de géants baroques au piano, et c’est pourquoi il nous offre des extraits de Scarlatti, Bach, Purcell, Rameau et compagnie, en passant aussi par des compositeurs moins joués tels que Böhm et Frescobaldi.

Des notes de programme détaillées avisent l’auditeur des défis posés par la transition du clavecin au piano : entre les deux instruments se retrouvent nombre de différences au niveau de la durée des sons, du timbre et de l’emploi de la pédale, pour n’en nommer que quelques-unes. Techniquement, les pièces sont très bien exécutées par Beauséjour. Le son est clair, propre, et les voix sont bien mises en évidence. Il semble parfois timidement éviter l’exploitation des nuances, de la pédale, des particularités du piano qu’on voudrait entendre résonner. Son jeu à l’instrument moderne rappelle son jeu au clavecin, mais on s’ennuie un peu du son brut qu’il tire de l’instrument dans ses enregistrements précédents. Selon moi, le mécanisme du clavecin—le son des cordes pincées, des vibrations et de l’action—fait autant partie de l’effet final d’une prestation que la musique elle-même. C’est cet aspect rustique qui manque à cet enregistrement au piano, où tout est poli.

Malgré cela, l’album ne manque pas de beaux moments. J’ai tout particulièrement apprécié le son chantant qui ouvre le Concerto en ré mineur BWV 974 de Bach, et les extraits entraînants et rythmiques des Indes galantes de Rameau, arrangées pour clavier. La Sonate en ré mineur de Scarlatti qui ouvre l’album met en vedette la solide technique de Beauséjour, et son attaque détachée révèle son expérience de claveciniste.

Après quelques écoutes, je me suis retrouvée tiraillée entre l’enthousiasme pour cette aventure de Beauséjour dans un nouveau territoire et l’impression que j’aurais peut-être apprécié l’album plus pleinement s’il avait été joué au clavecin, là où Beauséjour excelle déjà… À vous de juger !

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A propos de l'auteur

Michèle est traductrice et représentante en vente à La Scena Musicale, et y occupait précédemment le poste d’assistante à la rédaction. Après avoir obtenu son baccalauréat en musique à l’Université d’Ottawa en 2014, elle s’est établie à Montréal pour y poursuivre une maitrise en théorie musicale à l’université McGill. Elle complète présentement une thèse au sujet des tempéraments inégaux au 19e siècle et de leur influence sur la musique de Frédéric Chopin. Elle débutera un doctorat en musique à City University of New York en septembre 2016. Le piano, la guitare, et la lecture comptent parmi ses autres intérêts.

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