Débat / Culture Montréal : Que peuvent les prétendants à la mairie pour les arts ?

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par Hassan Laghcha
La question de l’avenir de la culture et des arts à Montréal était au centre du débat organisé récemment par l’organisation Culture Montréal et auquel les quatre principaux candidats à la mairie ont été invités à présenter leurs visions en la matière et à répondre aux questions du public. La question du financement a pris une large place lors de ce débat, animé par le journaliste Michel Désautels et qui s’est déroulé devant une salle comble au Club Soda.
 
Denis Coderre évite les engagements financiers
 
Prenant la parole au début de cette rencontre, Denis Coderre évite de faire un engagement clair en faveur de l’augmentation progressive du budget du Conseil des arts de Montréal (CAM) de 12,5 millions à 20 millions dans quatre ans, tel que revendiqué par Culture Montréal dans ses « 21 propositions pour accélérer l’édification de Montréal comme métropole culturelle durable » http://www.culturemontreal.ca/fr/publications/details/533/
 
« Il faut d’abord examiner la situation budgétaire de Montréal », estime l’ancien député fédéral et ex-ministre libéral, tout en reconnaissant que « la culture n’est pas une dépense, mais un investissement ». Pour D. Coderre, il faut « repenser la géographie culturelle de la métropole ». Pour ce faire, il propose de créer un poste de commissaire au développement économique affecté à la culture. Ce candidat s’engage également à revoir le règlement du stationnement au centre-ville, notamment en fin de semaine et en soirée, pour faciliter l’accès aux spectacles. M. Coderre s’engage aussi à baisser de 30 % les taxes foncières sur les locaux d’artistes. « Cette mesure contribuera à améliorer la situation financière souvent précaire des artistes », dit-il.
 
Fidele à sa passion pour les nouvelles technologies de l’information, Denis Coderre promet de faire de Montréal une ville intelligente. « Il s’agit d’un réseau numérique en termes de bibliothèques et de maisons de la culture, explique-t-il. La ville intelligente inclut des abribus transformés en vitrine numérique, le développement des musées virtuels et le déploiement d’un réseau Wifi pour qu’on puisse se connecter partout dans la ville. »
 
Mélanie Joly veut une charte de la vie nocturne
 
De son coté, Mélanie Joly, la plus jeune des prétendants à la mairie, propose notamment de créer un poste de conservateur en chef pour établir une ligne directrice de la politique culturelle et pour « mieux gérer la protection et la mise en valeur du patrimoine culturel de Montréal ». Sur le plan financier, elle s’engage à instituer une taxe sur l’affichage publicitaire dédiée au financement de la culture, à l’instar de Toronto et de Vancouver.
 
M. Joly plaide également pour l’instauration d’une charte de la vie nocturne, inspirée par l’exemple de Barcelone et de Toronto, « pour régler les tensions entre résidents et propriétaires de bars et restaurants ». Elle promet par ailleurs de créer des ateliers créatifs pour les artistes émergents qui sont en manque de ressources.
 
Aussi propose-t-elle de faire du Silo no 5 sis au Vieux-Port de Montréal une immense toile de projection à la disposition des vidéastes montréalais. « Un Moulin à images qui ne coûterait rien ! Et qui aura la vertu de stimuler la contribution citoyenne à la culture et permettra de célébrer le patrimoine culturel de Montréal », soutient-elle en exprimant son désir de créer un WikiMontréal, une plateforme consacrée à la présentation des initiatives et des atouts artistiques et communautaires de la Ville.
 
Marcel Côté pointe le « complexe d’infériorité »
 
« Nous couvrons aisément les 21 propositions de Culture Montréal et sur certains points nous allons plus loin », affirme pour sa part le candidat de la formation Coalition Montréal, Marcel Côté. Il reconnaît que la Ville de Montréal est « un peu chiche » lorsqu’il est question des arts et s’engage à augmenter de 10 % par année le budget du CAM pour atteindre, en 2017, 18,3 millions $. Il promet aussi d’intégrer dans les missions commerciales que dirige le maire à l’étranger des membres du milieu artistique. « La culture fera partie intégrante de la signature mondiale de Montréal au même titre que l’économie », insiste-t-il. Et d’ajouter : « Nous inciterons les arrondissements à se doter de politiques culturelles et à donner beaucoup plus d’importance à la médiation culturelle. » M. Côté promet également de s’attaquer au problème de stationnement que connaît notamment le Plateau Mont-Royal, le deuxième arrondissement en termes de théâtres. Problème qui, d’après lui, cause la diminution des abonnements annuels.
 
« L’image de marque de Montréal repose sur les grandes forces créatives qu’on trouve dans la scénographie, le cirque, la danse, le théâtre, etc. Il faut exploiter cette image de marque en s’inspirant des villes comme Barcelone et Berlin, dit-il. Nous avons tous les atouts entre les mains. Malheureusement, nous avons un complexe d’infériorité et nous n’osons pas nous affirmer sur la scène mondiale. »
 
Abordant la question des ateliers d’artistes, Marcel Côté pense que le grand problème est plutôt celui de la diffusion des œuvres. Ce gestionnaire, fraîchement engagé en politique, insiste sur le devoir des arrondissements d’adopter de véritables politiques culturelles qui font la part belle à la médiation culturelle pour encourager l’interaction entre les artistes et la population. Il affirme également que la Ville doit s’impliquer davantage et faire pression sur le Conseil des arts du Canada pour qu’il augmente le budget dévoué au rayonnement des artistes à l’étranger.
Projet Montréal promet les 20 millions au CAM
 
« On peut atteindre facilement les 20 millions $ revendiqués par Culture Montréal étant donné la part infime réservée à la culture dans le budget de la Ville », affirme François Croteau, le maire de l’arrondissement Rosemont–La Petite-Patrie qui a remplacé le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, en deuil de sa mère. « Les artistes montréalais ont un revenu annuel moyen de 24 600 $. Ce qui constitue à peine 40 % du revenu annuel moyen d’un travailleur à Montréal », déplore ce responsable de Projet Montréal, affirmant que la précarité dans le milieu artistique est un vrai fléau qu’il faut combattre. Pour ce faire, il annonce que l’objectif de son parti est d’augmenter de 1 million de pieds carrés la superficie totale des locaux dédiés aux artistes. « Ce qui permettrait d’éviter les expulsions récurrentes des artistes de leur lieu de travail », affirme M. Croteau qui cite le cas récent de l’expulsion des artistes des Lofts Moreau dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve. « Les artistes ont besoin de lieux de création qui leur sont accessibles. Nous nous engageons à protéger les espaces de création pour permettre à ces artistes de créer dans des conditions décentes », promet-il. Et d’ajouter que Projet Montréal insiste sur l’importance de l’art public dans tous les projets de revitalisationet considère comme capital le fait que les arrondissements aient des politiques culturelles solides qui leur sont propres.
 
« Montréal a beaucoup à faire pour mériter son titre de ville UNESCO du design », indique-t-il par ailleurs, en soulignant les efforts de mobilisation artistique et culturelle qui s’imposent pour fêter comme il se doit le 375e anniversaire de la ville en 2017. 

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