Diction française : quelques points pour les non-francophones

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Pour les chanteurs non francophones, les difficultés à chanter correctement le français peuvent être faciles à expliquer. Les problèmes sont les suivants : le français a plus de voyelles que beaucoup d’autres langues, en particulier l’anglais, incluant des voyelles nasales particulières. Les liaisons sont également troublantes pour les non-francophones, mais il existe des directives de base pour celles-ci. On dit aussi souvent que le français n’a pas d’accent tonique, alors le problème se pose : comment un chanteur peut-il interpréter le phrasé « familier » sans éviter les accents propres à la musique classique, c’est-à-dire le premier et le troisième temps dans une mesure de 4/4 ? Ensuite, il y a les nombreuses difficultés grammaticales, comme les terminaisons de verbes qui devraient être silencieuses (« ils chantent » devrait ressembler à « il chante », par exemple), ainsi que tout ce que je vais aborder brièvement. Je vais tenter d’expliquer les choses du point de vue d’un chanteur, car un chanteur doit résoudre des problèmes inexistants pour la voix parlée.

François Leroux. Photo : Philippe Delacroix

Premièrement, les voyelles : de façon générale (sauf exception bien sûr), une voyelle française est longue lorsqu’elle est accentuée par un accent circonflexe ou suivie d’une seule consonne. Elle est courte lorsque suivie de deux consonnes. Par ordre alphabétique :

A – Le français a deux voyelles « a » : une est très similaire à celle de l’anglais « fat », largement ouverte et pas trop « bâillée », comme dans « calme ». La seconde, généralement marquée « â », est plus profonde, comme dans « pâle » – plus profonde encore que dans le « past » anglais.

E – Plus problématiques sont les « e » et « eu » (ou « œu »), car beaucoup sont écrits d’une façon, mais ont plus d’une option pour la prononciation : « il pleure » et « cœur » (avec un « e » ouvert), et « il pleut » et « vœu » (« e » sombre).

I – Pour « i », le long et très horizontal, c’est facile : il est similaire au son anglais dans « sea », comme dans « fini ». Quand une idée onomatopéique est impliquée, comme dans « pique » ou « tic-tac », le « i » est plus court, comme dans l’anglais « sick ».

O – Il y a deux « o ». Un est clair, généralement suivi de deux consonnes, comme dans « mort », et l’autre est sombre, écrit « ô », « au » ou « eau », comme dans « pôle », « pauvre » ou « peau ».

U – Le son « u » est similaire au « ü » allemand comme dans « süss » ; ici encore, il y a des exceptions lorsque des idées onomatopées sont présentes, comme dans « stuc », où le « u » est court.

OU – La plus profonde de toutes les voyelles françaises est généralement sombre, comme dans « doux » et jamais diphtonguée ! Le son est plus court, comme cela a été mentionné précédemment, quand il est suivi de deux consonnes, comme dans « court ».

Les sons nasillards sont plus « nasalisés » que proprement nasaux. Essayez de cambrer le palais comme la voûte d’une cathédrale gothique en formant un « a » et vous approcherez du « an ». Et ainsi de suite, de « e » à « en », de « i » à « in », de « o » à « on », de « u » à « un ».

Le son « ui » (comme dans « nuit », ou « fui » ou « bruit ») est problématique. Ce ne sont pas deux sons mais un seul et on devrait aller directement à « i » via un « u », comme dans un sifflement (en français, une expression onomatopéique pour quelque chose qui disparaît en un éclair est « pfuit », presque comme un sifflet).

Pour les liaisons et le phrasé, la règle est assez simple : si le texte est un poème versifié, les règles poétiques s’appliquent. Je recommande le livre de David Hunter intitulé Understanding French Verse, publié par Oxford University Press (2005) pour une idée pratique et bien documentée des règles très strictes qui existent et de la manière dont les poètes célèbres les changent. Tous les grands compositeurs français connaissaient ces règles, qui étaient enseignées à l’université (mais ne le sont plus).

Quelques petites choses supplémentaires : en vers alexandrins (composé de douze syllabes), la seule coupe possible est au milieu, après la 6e syllabe. Cela vous aidera à choisir où respirer dans plusieurs mélodies ! Une autre règle facile à comprendre est la fin « masculine » et « féminine » d’un verset. « Masculin » veut dire qu’un chanteur doit finir une phrase avec une syllabe entièrement chantée, comme dans « voi-là », lorsque le « a » est fort. « Féminin » signifie que vous chantez pleinement l’avant-dernière syllabe et que la fin est « calme ». Le « e » muet à la fin d’un mot doit toujours sonner sans accent; essayez d’avoir le son « e » qui monte vers le palais, jamais vers l’avant. Essayez « bleue » en faisant un « eu » très sombre et accentué, puis soulevez le son et ouvrez-le pour « e ». Qui aurait pensé à quel point les couleurs d’un mot à deux syllabes pouvaient être excitantes ! « Bleu-e ».

Pour terminer ce court propos, ne jamais oublier qu’aucun bon compositeur n’indiquerait à un chanteur où respirer : quand ils écrivent un silence ou une coupure, c’est pour la poésie elle-même et pour éviter les hiatus, ce qui est strictement interdit : « ces rais sur lesquels / il ne faut pas que l’on marche » (Montparnasse de Poulenc). La plupart des compositeurs ont accompagné des chanteurs et les respectent trop pour leur donner des ordres. Après tout, un chanteur est un musicien, mais aussi un diseur !

Traduction par Richard Turp

Ce texte du célèbre baryton François Le Roux a été composé pour le site internet Sparks and Wiry Cries et originalement publié en anglais)

 

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