Winston Purdy : En souvenir du professeur de chant

0
Advertisement / Publicité

This page is also available in / Cette page est également disponible en: English (Anglais)

L’école de musique Schulich de l’Université McGill a perdu l’un de ses plus grands en novembre dernier avec le décès de Winston Purdy, professeur de chant, âgé de 76 ans. Enseignant à McGill depuis 1973, Purdy a formé plusieurs générations de chanteurs, dont plusieurs interprètes classiques de niveau international.

Les souvenirs de Purdy et de son enseignement sont invariablement évoqués avec beaucoup de chaleur et d’admiration. « Il avait une profonde compréhension du chant sous tous ses aspects, explique Dominique Labelle. Scientifique, spirituel, physique, culturel, et j’en passe. »

Labelle, une soprano accomplie, a étudié avec Purdy dans les années 1980 et, plus tard, elle est retournée à McGill comme enseignante, devenant ainsi l’une des plus proches collègues de Purdy. Ses propos traitent d’un thème maintes fois répété.

« Il était tellement intellectuel à propos du chant, mais aussi sensible et instinctif », explique la renommée mezzo-soprano Michèle Losier, qui a étudié avec Purdy de 1998 à 2002.

Rose Naggar-Tremblay, membre de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal et diplômée de McGill l’année dernière, travaillait avec Purdy à un récital conjoint avant son hospitalisation finale. C’est avec émotion que ce concert a dû être annulé.

« Il aimait nous faire travailler avec le son le plus doux et le plus subtil que la voix puisse produire », explique Naggar-Tremblay. Remarquablement, il faisait en sorte que les étudiants se sentent exaltés dans le processus, insufflant de la confiance et même un sens d’une mission plus noble. « Il nous apprenait à nous oublier et à servir la musique. »

Parmi les caractéristiques de la pédagogie de Purdy se trouvait un double engagement à transmettre des connaissances techniques approfondies sur la physiologie vocale et à susciter une appréciation richement imaginative de l’architecture musicale complète.

« Il jouait un accord et disait : “Accorde-toi à ça… ressens-le”, se souvient Losier. Je lui suis reconnaissante pour cela. Winston nous ramenait toujours à la partition. C’était très instructif. »

« Il a toujours su ce que signifiait l’accord », a reconnu le baryton Étienne Dupuis, qui a étudié avec Purdy au même moment que Losier.

La conscience du détail de Purdy était exceptionnelle. Dupuis se souvient de son animation en expliquant comment Robert Schumann a codé le nom de sa femme, Clara, dans Dichterliebe.

Le baryton Bruno Roy, élève de Purdy de 2009 à 2015, se rappelle comment son professeur « s’égayait » quand il racontait une histoire. « Vous pouviez ressentir sa passion et son enthousiasme », dit ce membre de l’Ensemble studio de la Canadian Opera Company.

Le local de Purdy était tapissé d’illustrations anatomiques. Son intérêt pour la physiologie se développa par des années d’études avec le célèbre pédagogue du Collège Oberlin, Richard Miller, un pionnier de ce genre d’analyse.

« Je me souviens d’avoir regardé une vidéo que Winston m’a donnée sur l’enseignement de Richard Miller, dit Dupuis. J’ai mieux aimé la façon de Winston de l’expliquer. »

« Winston n’essayait jamais de vous faire fabriquer un son, ajoute Losier. Il enlevait ce qui était artificiel et nous faisait découvrir notre son naturel. »

Aucun élément du style distinctif de Purdy n’est plus universellement attesté que son humour. « Il adorait rire », raconte Cécile Gendron, soprano et professeur de chant qui fut aussi la partenaire inestimable de Purdy et la compagne de ses dernières années. « Nous nous endormions en riant ! », dit-elle.

Cependant, les obstacles personnels auxquels l’humour de Purdy devait se mesurer étaient moins connus. Affligé toute sa vie d’un bégaiement, il devait s’assurer d’avoir une idée claire de ce qu’il allait dire. « Cela a amélioré son enseignement », note Gendron.

Atteint de poliomyélite lorsqu’il était enfant, Purdy utilisa une canne à la fin de sa vie, mais continua toujours à monter sans aide à son studio situé au 6e étage de la salle Pollack de McGill.

Alerté par les médecins dès 2006 de graves problèmes de santé, Purdy a finalement été informé en 2010 que son état était inopérable. « Ils ont vu que cela [était] allé trop loin, confie Gendron. Puis il a vécu sept années de plus. C’était un homme très fort. »

En effet, la vie productive, engagée et irréprochable de Purdy acquiert une dimension de quasi-sainteté : les bonnes œuvres, la vertu héroïque, la légèreté du cœur face à l’adversité – et peut-être même l’accomplissement de miracles.

« J’ai été atteint d’une paralysie des cordes vocales, lit-on dans un hommage anonyme en ligne à Purdy. Il a travaillé avec moi jusqu’à ce que je chante mieux que jamais. »

C’est une histoire qui ne surprend personne qui connaissait Purdy.

« Habituellement, en tant que chanteurs, nous ne voulons pas étudier les maladies, explique Gendron. Mais il était intéressé par tout ça, aux traitements. »

Au cours des dernières années, Purdy a fait circuler en privé aux étudiants une ébauche en constante évolution d’un livre sans titre. Consulté pour cet article, il s’avère provocateur, pratique, éminemment clair, avec des commentaires saisissants sur le vibrato, l’appoggio et la psychologie autour des prestations. Et il capture magnifiquement la personnalité et la brillance pédagogique singulière de son auteur.

Sachant que le temps était compté, Cécile Gendron a encouragé Purdy à plusieurs reprises à terminer son travail pour le rendre prêt à la publication. Mais, avec sa modestie caractéristique (ou une adroite dissimulation), il a répondu que personne ne serait intéressé à le lire.

Pour Gendron et les autres admirateurs de Purdy, la publication de cet ouvrage est une priorité compréhensible. (McGill-Queen’s University Press ferait un partenaire évident.)

Sans aucun doute le véritable chef-d’œuvre de Winston Purdy fut-il sa vie d’enseignant et son héritage, la légion de chanteurs qu’il a aidé à perfectionner et dont il a élevé le calibre artistique.

Traduction par Mélissa Brien

This page is also available in / Cette page est également disponible en: English (Anglais)

Partager:

A propos de l'auteur

Charles Geyer is a director, producer, composer, playwright, actor, singer, and freelance writer based in New York City. He directed the Evelyn La Quaif Norma for Verismo Opera Association of New Jersey, and the New York premiere of Ray Bradbury’s opera adaptation of Fahrenheit 451. His cabaret musical on the life of silent screen siren Louise Brooks played to acclaim in L.A. He has appeared on Broadway, off-Broadway and regionally. He is an alum of the Commercial Theatre Institute and was on the board of the American National Theatre. He is a graduate of Yale University and attended Harvard's Institute for Advanced Theatre Training. He can be contacted here.

Laissez une réponse

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.