Opus : 22e prise

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La 22e édition des prix Opus a culminé avec le gala du 3 février dernier, lors duquel 30 prix ont été remis aux artistes et organismes du milieu musical québécois. Ces prix viennent récompenser la persévérance et l’excellence de ceux qui œuvrent activement, année après année, pour le rayonnement de la musique québécoise. Sous la direction artistique d’Oriol Tomas et animé par Jocelyn Lebeau, le gala suivi d’un cocktail alliait agréablement chaleur, rigueur et convivialité.

La Société d’art vocal de Montréal a défié les pronostics en remportant deux Opus devant les plus prestigieuses institutions, grâce au concert du baryton-basse Gerald Finley accompagné par le pianiste Michael McMahon en mai 2018. Ces prix récompensent également 20 ans d’un travail passionné et courageux de la part du directeur général André Lemay-Roy et de son équipe, incluant des concerts, mais aussi de nombreuses conférences, soirées d’écoute ou de visionnement et autres activités visant à sensibiliser le public au répertoire lyrique. Les concerts intimes permettent une expérience édifiante de communion avec les artistes, et nombre de ces activités se déroulent au Café d’art vocal, lieu à la fois inspirant et chaleureux qui permet à l’art lyrique de respirer d’une manière singulière.

Également dans le domaine vocal, l’opéra baroque Vénus et Adonis de John Blow a remporté un Opus. Cette récente collaboration entre le claveciniste Luc Beauséjour et la chorégraphe Marie-Nathalie Lacoursière, tous deux spécialistes du baroque, permet de faire revivre des opéras en mêlant musique et danse, dans un souci d’authenticité à l’égard de ce répertoire. Vénus et Adonis est le début d’une aventure qui s’est poursuivie avec Actéon de Marc-Antoine Charpentier en septembre 2018 et qui, on l’espère, va s’exporter dans les années futures pour gagner un public encore plus important.

Jean Derome. Photo : Charles Belisle

Gabriel Dharmoo. Photo : Charles Belisle

La musique contemporaine et actuelle était également à l’honneur lors de cette célébration. En témoignent les nombreux prix qui lui ont été attribués, attestant de la vitalité de cette scène. Ainsi, le Quatuor Molinari, l’ensemble Paramirabo, l’ensemble SuperMusique ainsi que les compositeurs Jean Derome, Gabriel Dharmoo et Ana Sokolović ont été primés. La compositrice native de la Saskatchewan Nicole Lizée a reçu quant à elle le prix de Compositrice de l’année, succédant à André Hamel et Simon Martin.

François Bourassa. Photo : Charles Belisle

Jazz, musique du monde et musique traditionnelle, qui sont souvent les oubliés, ont eu leur place et leur moment de gloire. Côté jazz, le pianiste et compositeur François Bourassa a raflé deux prix pour son dernier album en quartette, Number 9, œuvre énergique avec une grande dose de liberté, résultat d’une longue et fructueuse collaboration avec les musiciens de son quartette. Le quintette de musique klezmer Kleztory a remporté un Opus dans la catégorie Concert de l’année, musique du monde, qui récompense aussi, sans doute, la magnifique tournée mondiale réalisée par les cinq musiciens et leur agent Marc Labelle. Kleztory prépare actuellement un nouvel album qui devrait paraître dans quelques mois. Un nouveau prix a fait son apparition cette année : le prix Concert de l’année en musique traditionnelle a été décerné à Genticorum pour le concert-album Avant l’orage présenté au Festival Mémoire et Racines à l’été 2018. La musique traditionnelle était également bien représentée avec une récompense pour le groupe É.T.É., découverte de l’année, ainsi que pour l’album Saimaniq de la compositrice Katia Makdissi-Warren mêlant chants de gorge inuits, flûte japonaise et musique électronique.

Danick Trottier. Photo : Charles Belisle

Les prix Opus récompensent également l’article de l’année. Cette année, le gagnant est le musicologue et professeur à l’UQAM Danick Trottier, pour un article au sujet de l’opéra Another Brick in the Wall de Julien Bilodeau. Dans cet article, l’auteur réfléchit sur la transformation d’une œuvre de rock en opéra ainsi que sur la question des attentes et de la réception du public. Spécialiste du XXe siècle dans son ensemble, englobant musiques savantes et populaires, Danick Trottier mène actuellement une grande enquête sur la profession de compositrice et de compositeur au Québec.

Le prix Opus de l’interprète de l’année revient assez logiquement à Charles Richard-Hamelin, qui mène depuis le concours Chopin de 2015 une vie haletante de concertiste et récitaliste à travers le monde, avec de nombreux passages au Japon où il est une véritable icône. Le pianiste vient de faire paraître un nouvel album chez Analekta, enregistrement des deux concertos pour piano de Chopin avec l’OSM et Kent Nagano, qui fait l’objet d’un article de la présente revue. On retrouvera également dans ce numéro un article dédié au prix Opus Hommage remis cette année à Gilbert Patenaude.

Enfin, diffuseurs et institutions, artisans de l’effervescence du milieu musical, ont également été récompensés lors de ce gala. Ainsi les Diffusions de la Coulisse, le Domaine Forget et le Centre des musiciens du monde ont chacun reçu un prix. La maison de disque ATMA Classique a été quant à elle triplement récompensée. D’année en année, les prix Opus permettent de constater l’excellence de notre scène musicale et leur ouverture donne la possibilité à des scènes plus marginales d’obtenir une reconnaissance bien méritée. Laissons les vainqueurs se repaître de leur précieux trophée, et à l’année prochaine !

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A propos de l'auteur

Benjamin Goron est écrivain, musicologue et critique musical. Titulaire d’un baccalauréat en littérature et d’une maîtrise en musicologie de l’Université Paris-Sorbonne, il a collaboré à plusieurs périodiques et radios en tant que chercheur et critique musical (L’Éducation musicale, Camuz, Radio Ville-Marie, SortiesJazzNights, L'Opéra). Depuis août 2018, il est rédacteur adjoint de La Scena Musicale. Pianiste et trompettiste de formation, il allie musique et littérature dans une double mission de créateur et de passeur de mémoire.

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