Nouvelles de l’industrie

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Gustavo Gimeno à Toronto… et Berlin

Le chef d’orchestre espagnol de 45 ans a fait ses débuts devant public à titre de directeur musical du Toronto Symphony Orchestra le 10 novembre, plus d’un an après avoir commencé son mandat et plus d’un an et demi après la fermeture du Roy Thomson Hall en raison de la pandémie. Résidant à Amsterdam, M. Gimeno s’est également fait remarquer le 7 octobre à la barre de la Philharmonie de Berlin. « Pourquoi Gustavo Gimeno ? », a demandé le critique Felix Stephan dans le Berliner Morgenpost. La réponse, a-t-il supposé, avait quelque chose à voir avec son statut de protégé de Mariss Jansons (1943-2019) et de Claudio Abbado (1933-2014), deux chefs « chers à la Philharmonie ». Le travail de M. Gimeno dans le Concert Românesc de Ligeti l’a dûment impressionné : « La finesse de l’esprit et le souffle inspiré font penser à Abbado, alors que l’attention passionnée et la concentration intense sont celles de Jansons. » En revanche, le Schéhérazade de Rimski-Korsakov a mis en lumière son « approche disciplinaire » qui l’amène à pousser l’orchestre « d’un moment fort à l’autre ». Isabel Herzfeld dans Der Tagesspiegel a été plus impressionnée par le somptueux chef-d’œuvre, citant notamment « la sonorité veloutée des cordes » et « l’éclat des cuivres ». L’interprétation du Ligeti a été la première du genre par la Philharmonie. Augustin Hadelich a été le soliste du Concerto no 2 pour violon de Prokofiev. Le premier violon, l’Américain Noah Bendix-Balgley, a joué les parties solos du Schéhérazade. Le concert est accessible sur le site de la Philharmonie de Berlin. Sinon, pour 10 $, vous pouvez vous procurer un billet électronique pour le concert du 10 novembre à Toronto. www.tso.ca.

Nathalie Stutzmann à Atlanta

Contralto française devenue cheffe d’orchestre, Nathalie Stutzmann prendra les rênes de l’Atlanta Symphony Orchestra à compter de la saison 2022-23, succédant à Robert Spano. Elle est considérée comme la deuxième directrice musicale d’un « grand » orchestre américain – Marin Alsop aurait été la première à la tête du Baltimore Symphony. (JoAnn Falletta, qui dirige le Buffalo Philharmonic depuis 1997, qualifierait sûrement son orchestre de « grand », tout comme Xian Zhang, succédant à Jacques Lacombe en 2016 à la tête du New Jersey Symphony Orchestra.) Âgée de 56 ans, Mme Stutzmann est aussi première cheffe invitée du Philadelphia Orchestra (Yannick Nézet-Séguin en étant le directeur musical), ce qui explique pourquoi les Montréalais auront la possibilité de l’entendre diriger le 4 juin prochain la Symphonie no 6 « Pathétique » de Tchaïkovski par l’Orchestre Métropolitain (dont Nézet-Séguin est directeur artistique). Avant la pandémie, il avait également été prévu qu’elle dirigerait les représentations de septembre de l’opéra Iphigénie en Tauride de Gluck au Metropolitan Opera. Le concert de juin avec l’OM ne constitue toutefois pas ses débuts à Montréal puisqu’elle a participé comme contralto à la saison 2006-2207 du Ladies’ Morning Musical Club.

Yannick se défoule… sur le plan vestimentaire

Le maestro a inauguré la saison du Philadelphia Orchestra au Carnegie Hall en octobre avec un programme de Valerie Coleman (Seven O’Clock Shout), Chostakovitch (Concerto pour piano no 2), Iman Habibi (Jeder Baum spricht), Bernstein (ouverture de Candide), Beethoven (Symphonie no 5) et… un pantalon particulièrement flamboyant. Pas simplement pâle et bien moulant, mais orné de motifs fleuris qui ont apparemment échappé à la compréhension du public. « Quelqu’un peut-il expliquer les motifs mystérieux ? », pouvait-on lire dans le Philadelphia Inquirer par un David Patrick Sterns qui voulait aussi comprendre le lien entre le pantalon excentrique et le somptueux veston de cérémonie bleu. Mais Yannick n’était pas le seul sur scène à s’écarter de la norme vestimentaire. Tous les hommes avaient délaissé les traditionnelles cravates blanches et queues-de-pie, arborant des costumes noirs à l’exception d’un mouchoir blanc. Disons simplement que pour une fois, la soliste du Chostakovitch, Yuja Wang, a été reléguée au second plan… si ce n’est de son tatouage du nouveau logo du Carnegie Hall « CH » bien en évidence sur son bras droit. Le concert du 6 octobre, accessible en webdiffusion sur Medici.tv, représentait le premier concert en direct au temple new-yorkais après une interruption de 572 jours en raison de la pandémie.

La salle Pierre-Mercure renaît

Toutes les salles de concert sont en mode rattrapage, mais la salle Pierre-Mercure sort d’un marasme qui ne date pas d’hier. La salle de 875 places du Centre Pierre-Péladeau de l’UQAM a été inaugurée en 1992 avec l’orchestre I Musici de Montréal, l’un des principaux locataires. Malheureusement, l’orchestre de chambre sous la gouverne de son fondateur Yuli Turovsky n’y a pas fait long feu en raison du peu d’envie des abonnés, issus de quartiers résidentiels de classe moyenne, de faire le trajet jusqu’au Quartier latin. Aujourd’hui, I Musici est de retour au centre-ville avec son nouveau premier chef invité Jean-François Rivest. Son concert inaugural était le 4 novembre, cinq jours avant le début de la saison de son concurrent naturel, l’Orchestre classique de Montréal, qui a aussi décidé d’essayer la salle. Leurs publics répondront-ils à l’appel ? La rue Saint-Denis n’est plus en construction. Quoi qu’il en soit, la Société de musique contemporaine du Québec a toujours son siège au Centre Pierre-Péladeau et six de ses sept concerts en 2021-22 ont lieu à Pierre-Mercure.

Carlisle Floyd, 1926-2021

Le compositeur américain de Susannah (1955), Of Mice and Men (1970), Willy Stark (1981) et Cold Sassy Tree (2000) est décédé le 30 septembre à Tallahassee, en Floride, à l’âge de 95 ans. « Son langage compositionnel est un mélange très personnel de mélodie accessible, de polytonalité et de style américain qui reflète les racines anglaises, irlandaises, écossaises et galloises de son jardin du sud », peut-on lire dans l’hommage publié par sa maison d’édition Boosey & Hawkes. Natif de la Caroline du Sud et fils de pasteur méthodiste, M. Floyd écrivait toujours ses propres librettos. Il était venu à Montréal en 1999, pour une série de représentations de Susannah par l’Opéra de Montréal au Théâtre Maisonneuve. Cette histoire d’intrigues se déroulant dans les États religieux du Sud – on dit parfois que c’est le deuxième opéra américain le plus joué après Porgy and Bess de Gershwin – avait été mise en scène par le Manitoba Opera en novembre 2019, en ouverture d’une saison forcément raccourcie. La dernière création d’un opéra de M. Floyd, par le Houston Grand Opera en 2016, a été celle du Prince of Players, un opéra de chambre inspiré par la vie d’Edward Kynaston, dernier homme à jouer le rôle de femmes au théâtre de l’époque de la Restauration anglaise. Peu connues, ses autres œuvres comprennent (toujours selon Boosey & Hawkes) « des cycles de mélodies et de chorals à petit et grand déploiement, une sonate pour piano particulièrement complexe, des livres d’études et plusieurs mouvements symphoniques ». Peut-être qu’un présentateur entreprenant envisagerait de faire connaître ces compositions à l’occasion de son centenaire de naissance, en 2026.

Edita Gruberová, Bernard Haitink, Udo Zimmermann…

Octobre compte plusieurs décès dans le monde de la musique. La soprano colorature slovaque Edita Gruberová, résidente de Zurich mais vénérée à Vienne et Munich, est décédée le 18 octobre d’un traumatisme crânien après avoir fait une chute. Elle avait 74 ans. Sa dernière prestation remontait au 27 mars 2019, au Théâtre national de Munich. Nous avons facilement trouvé sur YouTube ce qui semble être un enregistrement sur téléphone cellulaire de sa prestation avec discours d’adieu et ovation.

Le chef néerlandais Bernard Haitink est décédé chez lui à Londres le 21 octobre à l’âge de 92 ans. Chef principal de l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam pendant 27 ans en plus de multiples collaborations avec le Royal Opera, le Glyndebourne, le London Philharmonic Orchestra et le Chicago Symphony, M. Haitink a dirigé son dernier concert en 2019.

Le compositeur allemand Udo Zimmermann, qui a collaboré avec le Dresden Semperoper, le Deutsche Oper Berlin, l’Orchestre symphonique de la Radiodiffusion bavaroise et l’opéra de Leipzig – pour lequel il a créé 27 œuvres à titre de directeur – est décédé dans sa ville natale de Dresde le 22 octobre. Son œuvre la plus connue est l’opéra La Rose blanche, composé en 1967 (et révisé en 1986), qui porte sur le mouvement étudiant du même nom de résistance au nazisme.

 George Crumb, Sofia Goubaïdoulina…

Un certain nombre de compositeurs nonagénaires se portent plutôt bien. L’Américain George Crumb, connu pour des classiques avant-gardistes comme Black Angels (quatuor à cordes contre la guerre du Vietnam) et Vox Balaenae (trio pour flûte, violoncelle et piano en l’honneur des baleines) a eu 92 ans le 24 octobre. Son œuvre Metamorphoses (Livret II) pour piano solo a été créée en décembre dernier par Marcantonio Barone à Philadelphie. La Russe née au Tatarstan Sofia Goubaïdoulina, qui vit en banlieue de Hambourg, a eu 90 ans le même jour. Parmi les concerts et événements tenus en son honneur, mentionnons la journée Goubaïdoulina au Gewandhaus de Leipzig. Un nouvel enregistrement paru sous étiquette Deutsche Grammophon par cet orchestre sous la direction d’Andris Nelsons comprend son troisième concerto pour violon (Dialogue: I and You) avec le soliste Vadim Repin. 

Le grand retour de Bright Sheng

Ayant établi une nouvelle norme d’ineptie woke en désavouant Bright Sheng – le membre le plus estimé de sa faculté de composition –, l’University of Michigan a renoncé à son intention d’ouvrir une enquête officielle sur sa conduite en classe. Le « crime » de M. Sheng avait été de montrer la version d’Othello de Laurence Olivier dans un cours explorant la façon dont Verdi avait adapté la pièce de Shakespeare pour créer son opéra Otello. M. Olivier, voyez-vous, était affublé de maquillage noir dans le film de 1965. Les gestes de M. Sheng, a déclaré le doyen de la faculté de musique David Gier – un tromboniste, soit dit en passant – « ne sont pas conformes à l’engagement de notre école en matière d’action antiraciste, de diversité, d’équité et d’inclusion ». Les instigateurs de cette histoire ont exigé que M. Sheng soit « immédiatement démis de ses fonctions de professeur du séminaire de premier cycle sur la composition » – une demande à laquelle l’école s’est pliée avec le soutien enthousiaste d’un de ses collègues de composition, un violoniste inconnu du nom d’Evan Chambers. Les réactions indignées à cette insanité ont fusé autant de sources libérales traditionnelles que du mouvement Étudiants et jeunes internationalistes pour l’égalité sociale. « Dans le milieu universitaire américain contemporain, obsédé par la race, peut-on lire dans un éditorial sur le sujet, il est devenu criminel de faire voir aux étudiants l’une des plus grandes pièces de Shakespeare, interprétée par l’un des plus grands acteurs du 20e siècle. » La musique de M. Sheng a été interprétée par de grands orchestres du monde entier, notamment lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’été de Beijing de 2008.

Un triomphe pour Fazioli

Bruce Liu a remporté le premier prix de l’édition 2021 du Concours international de piano Frédéric-Chopin à Varsovie. Et il l’a fait sur un Fazioli, la marque italienne qui, au cours des trois dernières décennies, s’est considérablement rapprochée de celle qui détient presque le monopole en la matière, Steinway. Les autres finalistes ayant choisi un Fazioli sont Martin Gárcia Gárcia (3e prix) et Leonora Armellini (5e prix). Les candidats avaient le choix entre cinq instruments : un Fazioli, un Kawai, deux Steinway et un Yamaha. La popularité de Steinway ne se dément pas : 64 des 87 participants ont choisi cette maison. Bien loin derrière suivent Yamaha (neuf pianistes), Fazioli (huit) et Kawai (six). Tout de même, quelques pianistes canadiens bien connus, dont Angela Hewitt et Louis Lortie, affichent ouvertement leur préférence pour Fazioli. Fondé en 1981, l’atelier situé au nord de Venise a réalisé l’une de ses premières ventes importantes à la ville de Montréal. L’instrument acquis en 1987 par la Chapelle historique du Bon-Pasteur avait provoqué un tollé en raison de son prix exorbitant : 82 000 $. À l’époque, un piano à queue Steinway ne coûtait que 68 000 $.

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A propos de l'auteur

Arthur Kaptainis has been a classical music critic since 1986. His articles have appeared in Classical Voice North America and La Scena Musicale as well as Musical Toronto. Arthur holds an MA in musicology from the University of Toronto. From 2019-2021, Arthur was co-editor of La Scena Musicale.

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