Stingray Classica: le nouveau départ

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Chef de fil mondial sur le marché des services musicaux destinés aux câblodistributeurs, le groupe Stingray Digital connaît une croissance fulgurante ces dernières années. Juste en 2017, l’entreprise fait l’acquisition de six chaînes consacrées à la musique, dont Classica, rachetée en début d’année à la société de production allemande Unitel. C’est en misant sur un modèle d’affaires qui privilégie les acquisitions que l’entreprise a su se tailler la part du lion dans un marché de la musique qui subit encore les contrecoups de la révolution numérique.

Les débuts

Fondée à Montréal en 2007, l’entreprise se lance tout d’abord sur le marché du karaoké par l’acquisition de la société Soundchoice. Forte de l’expérience de ses fondateurs Eric Boyko et Alexandre Taillefer, Stingray prend rapidement de l’expansion et rachète peu de temps après les chaînes musicales Galaxie, alors détenues par la Société Radio-Canada. Cette transaction lui assure alors une place de choix sur le marché local tout en lui ouvrant les portes des marchés internationaux. C’est ainsi que Stingray rachète 33 entreprises œuvrant dans le domaine musical, assurant ainsi la diffusion de son contenu dans plusieurs pays d’Europe et d’Amérique.

Aujourd’hui, l’entreprise offre plus de 3000 chaînes audio et 12 chaînes vidéo spécialisées et rejoint plus de 400 millions de foyers dans 156 pays, en plus d’offrir des services musicaux destinés aux entreprises commerciales. Cette réussite repose en partie sur une judicieuse stratégie d’implantation qui privilégie une programmation musicale adaptée aux goûts et aux genres musicaux propres aux différents marchés exploités. Pour ce faire, Stingray compte sur les services de 150 spécialistes qui veillent à offrir aux abonnés un contenu musical sur mesure : jazz, musique classique, rock, pop, mais également des artistes issus des scènes locales de partout à travers le globe. Au Québec, ces chaînes sont offertes aux abonnés des services de câblodistribution Vidéotron.

Classica

Si Stingray fait l’acquisition en 2017 de Classica, bien qu’elle possède déjà des chaînes au contenu similaire, c’est que l’entreprise cherche avant tout à s’affirmer comme l’un des plus importants pôles de diffusion de musique classique à l’échelle mondiale. Comme le mentionne Mathieu Péloquin (vice-président principal, marketing et communication), « on veut être numéro un dans le classique, mondialement ». C’est dans cette optique que sont conclues au fil du temps des ententes avec une quarantaine de maisons de production de musique classique, telles qu’Unitel, Paramax et C Major Entertainment. Ce faisant, Stingray met la main sur un imposant répertoire d’enregistrements de concerts classiques, en plus d’obtenir les droits de diffusion d’une cinquantaine de primeurs par année. Dans un avenir rapproché, l’entreprise souhaite devenir propriétaire d’une plus grande portion de son catalogue afin d’être en mesure d’offrir à ses abonnés jusqu’à 3000 heures de contenu audiovisuel.

Classica se distingue des autres chaînes de musique classique de Stingray au chapitre de la clientèle visée. Alors que Brava se veut plus accessible, en misant notamment sur la diffusion de courts métrages qui documentent les préparatifs de certains concerts et dressent le portrait des musiciens et des compositeurs, Classica s’adresse davantage à une clientèle de connaisseurs : la programmation est axée sur des productions d’orchestres européens qui requièrent de l’auditeur une certaine connaissance du répertoire classique. Cependant, une attention particulière est portée aux habitudes de la clientèle afin de créer une programmation musicale adaptée au contexte de longue écoute. Les émissions sont donc regroupées selon des thématiques quotidiennes et hebdomadaires de manière à fidéliser la clientèle.

Promouvoir le contenu local

Fondée en Allemagne en 1997, Classica accordait jusqu’à ce jour une grande part de sa programmation aux prestations d’orchestres européens. Cependant, le rachat de la chaîne par le groupe Stingray pourrait bien changer la donne : soucieux de mettre en valeur la production canadienne et québécoise, Stingray collabore depuis quelque temps avec divers ensembles locaux tels que l’Orchestre symphonique de Montréal et l’Orchestre Métropolitain de Montréal. À titre d’exemple, la chaîne a récemment réalisé un programme spécial à l’occasion d’une prestation de l’ensemble Les Violons du Roy au Domaine Forget. En plus d’assurer la diffusion du concert, une équipe de tournage s’est rendue sur les lieux afin de réaliser un documentaire qui offre aux abonnés un accès privilégié aux coulisses de l’événement. Ce type de projet favorise une plus grande proximité entre les ensembles et les auditeurs, constituant même une solution possible aux problèmes de renouvellement de public auxquels sont confrontés de nombreux acteurs du milieu de la musique classique.

Démocratiser la musique classique

Pour Péloquin, cette nouvelle façon d’aborder le concert – en tant qu’événement à la fois musical et médiatique – constitue une véritable opportunité pour les orchestres. S’il déplore que le manque de revenus et le vieillissement du public de la musique classique minent la prospérité des ensembles, il remarque toutefois un changement de mentalité en ce qui a trait à la diffusion : « On sent qu’il y a de plus en plus d’ouverture […] Le milieu [réalise] qu’aujourd’hui un artiste peut diffuser sa musique facilement, mais il reste que le streaming amène une homogénéisation des genres. » Un tel constat peut sembler paradoxal, surtout venant d’une entreprise qui offre à ses abonnés des milliers de chaînes musicales spécialisées. C’est pourquoi des chaînes comme Classica ont leur utilité : Péloquin préconise une collaboration accrue entre les diffuseurs et les orchestres afin de permettre à ces derniers de prendre en main leurs finances tout en assurant un maximum de visibilité aux orchestres classiques. En offrant aux orchestres et aux artistes les moyens de faire rayonner leur talent à l’étranger, Stingray participe à leur essor et, plus généralement, à la démocratisation de la musique classique.

www.classica.stingray.com

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A propos de l'auteur

Arnaud G. Veydarier est actuellement étudiant en musicologie à l’Université de Montréal et nourrit un intérêt prononcé pour le jazz, la musique contemporaine et les liens entre musique et développement urbain. Il est pigiste pour La Scena Musicale depuis septembre 2017.

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